Agriculture - Sécheresse dans le Sud

Giovanna n'a pas apporté la pluie salvatrice

  • Publié le 14 février 2012 à 10:00

Le monde agricole espérait depuis plusieurs semaines la venue de la pluie pour remédier à la sécheresse qui sévit dans l'île depuis plusieurs mois déjà. Le passage de Giovanna à proximité du département n'a apparemment pas permis de résoudre le problème. Le cyclone tropical est passé à plus de 300 km de La Réunion, et a ramené beaucoup de vent mais relativement peu de pluie. Pour les éleveurs et maraîchers du Sud, la situation est toujours aussi catastrophique.

En janvier 2012, le diagnostic du comité sécheresse faisait état d'un déficit pluviométrique inquiétant pour le territoire de La Réunion. Ce déficit touche plus particulièrement la micro-région Sud. Les exploitants agricoles ont d'ailleurs récemment signalé que sur le secteur entre Saint-Louis et Saint-Philippe et entre Cilaos et le Tampon, l'année 2011 était la plus sèche jamais enregistrée.

La venue de la pluie est donc grandement espérée afin de subvenir aux besoins de l'agriculture. On comptait sur Giovanna, mais à première vue, le cyclone a ramené plus de vent que de pluie. "Il y a bien des pluies et des rivières en crue. Cependant, il est beaucoup trop tôt pour en tirer un bilan sur leur impact sur la sécheresse du territoire. Il faudra encore attendre quelques jours pour cela", précise Julien Bonnier, ingénieur hydrologue à l'office de l'eau.

Météo France de son côté donne quelques indications sur le cumul des pluies lors de 72 dernières heures. Le Pas de Bellecombe est le secteur le plus arrosé avec 396 mm de pluie. Il a été enregistré 152 mm de pluie à Cilaos, 144 mm à Grand Coude, 120 mm à la Plaine des Cafres, et 30 mm sur le littoral de Saint-Joseph. Par ailleurs, il a très peu plus à l'Etang-Salé, les Avirons ou Saint-Pierre. Les pluies enregistrées ne sont cependant pas exceptionnelles, le cyclone étant passé relativement loin de La Réunion, explique-t-on à Météo France.

Du côté des agriculteurs, si on souligne que la pluie ramenée par Giovanna a fait du bien, on note cependant que c'est loin d'être suffisant pour remédier à la sécheresse rencontrée depuis quelque temps. "Depuis le mois d'août, on n'a pas de pluie. Là, ce week-end, on en a eu un peu, mais c'est resté superficiel, ce n'est pas avec quelques gouttes que les nappes phréatiques vont se regorger", déplore Ghislain Gonthier, éleveur à Petite-Ile.

"On va dire que les grains de pluie ont rendu service, mais avec la sécheresse qu'on connaît, on va avoir besoin de beaucoup plus d'eau pour améliorer la situation", ajoute-t-il. L'éleveur craint surtout les difficultés à venir. "Normalement, on doit commencer à préparer les stocks pour la période hivernale. Mais avec les retenues collinaires à sec, c'est impossible, et la situation va devenir catastrophique si on n'a pas de pluie bientôt".

Les maraîchers souffrent également du déficit en eau. "Depuis 4 mois, il n'y a plus d'irrigation. A cause de ça, j'ai perdu environ 70% de mes récoltes, que ce soit sur les pommes de terre, les fraises, les carottes, les salades ou les choux", raconte Jean-Philippe Smith, maraîcher sur le Piton Hyacinthe, à la Plaine des Cafres. "C'est vraiment compliqué, c'est pire que l'année dernière, parce qu'en janvier 2011, on avait eu au moins cinq jours de pluie pour améliorer la situation. Actuellement, la sécheresse est terrible. Cette année, en janvier, on n'a pas eu de pluie et tous les champs sont en souffrance", assure-t-il.

A Piton Hyacinthe, Giovanna n'aura pas non plus apporté le soulagement espéré. "On a eu un peu de pluie dimanche, mais c'est vraiment insuffisant. A côté de ça, on a des vents à 100, 120 km/h, et ce n'est vraiment pas bon pour nos récoltes. Ce matin, mes pieds de salades et de choux commençaient à en pâtir", poursuit Jean-Philippe Smith.

Conséquence de ces mauvaises récoltes : les prix des fruits et légumes locaux ont tendance à augmenter ces derniers temps. Une augmentation parfois mal vécue par les revendeurs de fruits et légumes. "Je comprends les agriculteurs, leur situation n'est pas facile. Mais parfois, c'est délicat pour nous revendeurs. Nos clients sont mécontents ces derniers temps. Quand le kilo de chouchou est à 3 euros, c'est normal, mais au final on se retrouve dans une situation inconfortable", indique la gérante d'une boutique de fruits et légumes au Tampon.

"Après, il ne faut pas s'étonner que les gens préfèrent se tourner vers les produits importés", ajoute-t-elle avec dépit. Et avec les rafales de vent qui soufflent toujours très fort à cause de Giovanna, une nouvelle hausse des prix des fruits et légumes n'est pas à exclure dès la semaine prochaine selon Jean-Philippe Smith.

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