Conférence économique et sociale

Le parti de gauche fait des propositions

  • Publié le 14 novembre 2012 à 03:42

Dans le cadre de conférence économique et sociale initiée par le gouvernement, le parti de gauche a publié un communiqué listant ces remarques et ces propositions. Nous le publions ci-après intégralement. La conférence économique et sociale se tient ce mercredi 14 novembre 2012 au siège de la chambre de commerce et d'industrie à Saint-Denis.

"Les propositions que nous faisons ci-après se conçoivent dans le cadre politique libéral défini par l’actuelle construction de l’Europe et celui de la France qui permettent tout de même, pour le premier, en tant que RUP, un certain nombre d’exceptions au droit commun et pour le second, en tant que DOM, des adaptations législatives. La présente contribution traite en bloc des trois thématiques annoncées :

- L'emploi et notamment celui des jeunes

- Quelle stratégie de création de valeur et de développement économique (exportations, nouvelles niches d'import-substitution et gestion de l'urgence

- Le dialogue social et les outils de développement économique.

La situation sociale (60% de pauvres et 33% des ménages imposés contre respectivement 14% et 60% en métropole) couplée à l’atone croissance économique qui s’est installée depuis maintenant trois années commandent d’aborder prioritairement la question de la relance sous l’angle de l’urgence. Les politiques de l’offre développées par l’ancienne majorité ayant montré leurs limites, nous suggérons d’agir prioritairement sur la demande.

La modération salariale, l’extrême faiblesse des allocations – au regard du seuil de pauvreté monétaire institué par les pouvoirs publics eux-mêmes – la fin annoncée du bonus Cospar, etc. ne laissent aucune perspective optimiste du côté de la consommation et donc aussi des investissements des ménages.

Nous pensons donc qu’il convient de revaloriser substantiellement l’ensemble des petites allocations (144 000 allocataires) en leur accordant une majoration de revenu significative de manière à ce qu’ils deviennent de vrais consommateurs (aujourd’hui consommateurs sans réels pouvoirs) et par ailleurs libres de leurs choix. Au regard du calendrier politique annoncé le 9 septembre dernier par le chef de l’Etat (2 années d’efforts avant 3 années de redistribution), la dette de l’Etat envers le Conseil Général (supérieure à 500 millions d’euros) mise à contribution d’ici 2015 pourrait très bien faire l’affaire. Du côté du bonus Cospar, la sortie en biseau évoquée par le Ministre de l’Outre-mer ne peut qu’être conditionnée à un retour de croissante que nous pouvons fixer à plus de 3%.

C’est effectivement et uniquement de telles perspectives de croissance qui permettront aux entreprises de dégager de nouvelles marges dans le partage des gains de valeurs et de productivité. Une loi-programme doit fixer les modalités de titularisation des 13 000 agents précaires de la Fonction publique territoriale et de fait l’accompagnement des collectivités dans l’effort budgétaire qu’elles auront à supporter. Au besoin, le nouvel octroi de mer au-delà de continuer à jouer son rôle de protection de la production locale, pourrait se voir consacrer une part de cet effort. C’est cette politique de la demande qui renforcera la capacité de consommation du grand nombre et entraînera de fait une baisse de la marge unitaire donc une baisse des prix, les bénéfices étant réalisés par l’effet masse.

Du côté des investissements publics, c'est-à-dire des équipements destinés à tous, il revient à l’Etat, au-delà de sa fonction d’observateur de la commande publique et sans remettre en cause le principe de libre administration, de veiller aussi, au travers d’un nouveau système d’allocations des dotations à ce que la somme des investissements publics de toutes les collectivités et fonctions publiques confondues ne descendent pas au dessous de paliers établis conjointement dans une planification sur plusieurs années. Il s’agit, en effet, compte tenu de la pénurie de crédits publics, de distribuer prioritairement des subventions aux maitres d’ouvrages disposant de marges de manœuvre et de capacités à les consommer dans les calendriers impartis. C’est au demeurant en instaurant une telle visibilité à moyen terme que s’érige, au profit des acteurs privés, la confiance nécessaire à toute économie notamment en matière d’investissements.

Par ailleurs, si faute d’aide directe, la défiscalisation doit être maintenue, nous considérons qu’il est impératif de viser d’autres objectifs que l’enrichissement patrimonial de quelques particuliers encore à même d’investir. La défiscalisation devrait principalement servir la réduction des dépenses énergétiques des résidences principales et des entreprises, la création d’emplois, la conversion vers une agriculture propre ou l’acquisition d’’outils de production, l’amélioration des réseaux haut débit du numérique, l’acquisition de vélos à assistance, etc. La défiscalisation pourrait aussi servir à l’activation de réelle concurrence en facilitant la création de zones dédiées (au sport, à l’alimentation, bricolage, …) où se retrouvent dans un même périmètre diverses enseignes. Fléchée vers les acteurs de la publicité, elle pourrait enfin les encourager à financer les activités des Associations de consommateurs.

Au sujet des déplacements, nous rappelons que le succès du transport collectif nécessite de penser leur prolongement. Des dispositifs vélos libres sont à développer autour des pôles de transports urbains et soulager le budget transport des ménages. Une filière vélo de ville devrait dés lors pouvoir être créée.

En matière d’économie sociale et solidaire, la future banque publique devra accompagner les associations, et faciliter les créations de SCOP et de SCIC. Les secteurs du sport et la culture dont le travail de construction identitaire, de coopération régionale doivent ainsi pouvoir être redynamisés et surtout viser des objectifs d’universalité, ce qui en prime agira positivement sur le secteur du tourisme. La part des emplois avenir doit prendre en considération le ratio du nombre de jeunes non qualifiés du département dans l’ensemble national. Selon toute vraisemblance, nous devrions avoir un droit de tirage plus proche de 9 000 que de 5 000.

Compte tenu de la nature du tissu des entreprises locales, les seuils de représentativité syndicale doivent être abaissés de manière à renforcer la connaissance par les travailleurs de leurs droits et protections. Les droits à la retraite doivent intégrer la captivité des travailleurs réunionnais et le contexte socio-économique responsable de carrières discontinues.

Enfin, si la balance commerciale de l’île est aussi déséquilibrée et la production locale aussi moribonde, c’est aussi du fait que les acteurs de la grande distribution se contentent d’être exclusivement importateurs. Ils devraient aussi, au besoin en se regroupant, devenir un acteur majeur des exportations en assurant au sein de leur propre réseau hexagonal et européen la distribution des produits locaux, notamment ceux de la filière agro-alimentaire. A plus long terme, nous ne pouvons continuer à imaginer La Réunion comme un comptoir d’importations. Il nous faut basculer dans un système de développement propre qui consiste à imposer, au-delà d’un certain chiffre de vente, la fabrication locale des produits (le cas échéant, au sens import-substitution) par l’installation de petites structures industrielles. Les services de l’Etat (douanes, impôts) sont en effet en capacité de nous dire, par rapprochement des listes détaillées des importations de chaque transitaire, quels sont les produits qui pourraient être fabriqués localement. En matière d’indépendance énergétique, nous serions inspirés de nous poser la question de la pertinence des éclairages publics reproduits par simple mimétisme hexagonal.

Comme pour les carburants, nous estimons enfin que l’administration des prix des intrants agricoles – qui fait entorse au cadre libéral – est une absolue nécessité si l’on veut rendre les produits de l’agriculture locale compétitifs.

Nous restons évidemment à l’entière disposition des animateurs des ateliers pour préciser en cas de besoin ce qui pourrait ne pas avoir bien été compris.

Pour le parti de gauche

Jean-Hugues Savigny

 

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