Insee - Enquête sur le logement

Mayotte - "La situation est comparable à celle de La Réunion d'il y a 30 ans"

  • Publié le 31 octobre 2016 à 04:11

L'Insee publie les résultats d'une enquête sur le logement à Mayotte, effectuée en 2013. Ce qu'il en ressort est "très éloigné des standards nationaux", selon l'organisme. Trois logements sur dix n'ont pas d'eau courante, tandis qu'au moins un élément de confort manque dans les trois quarts des logements. Deux habitations sur trois sont surpeuplées selon l'Insee, et les étrangers sont les plus mal logés.

Fin 2013, Mayotte compte 53 200 résidences principales, dont plus d’un tiers sont des maisons en tôle. La majorité des ménages vivent dans des conditions de logement difficiles, éloignées des standards des autres départements français. Si les accès à l’eau et à l’électricité se sont améliorés, il reste encore 14 900 ménages qui n’ont pas accès à l’eau dans leur logement et 3400 sans électricité.

Par ailleurs, les deux tiers des logements de Mayotte sont dépourvus d’un des trois éléments de confort sanitaire de base que sont l’eau courante, une baignoire ou une douche, et des toilettes à l’intérieur du logement. En prenant en compte l’absence de cuisine, l’absence d’électricité ou une installation électrique dégradée, ce sont près des trois quarts des logements pour lesquels manquent au moins l’un de ces éléments de confort (contre 5 % en métropole).

De plus, les deux tiers des logements sont surpeuplés. L’accès à l’un ou l’autre de ces marchés dépend des caractéristiques sociodémographiques des ménages. Ainsi, les étrangers font partie des plus mal logés. Les loyers reflètent la mauvaise qualité des logements et mettent en évidence le clivage entre deux marchés: des logements présentant peu de défauts où les loyers sont plus élevés et, à l’opposé, des logements de moindre qualité aux loyers très bas.

À Mayotte, plus de la moitié des ménages se déclarent propriétaires de leur résidence principale (56 %), un quart sont locataires (26 %) et les autres sont logés gratuitement (18 %). Confort limité et précarité caractérisent souvent les logements: 37 % des 53 200 résidences principales sont des maisons individuelles en tôle et 63 % sont construites en dur (maisons individuelles, immeubles collectifs). En matière de revêtements de sol, seuls 40 % des logements ont du carrelage. Dans la moitié des logements, le sol est simplement recouvert de béton (26 %) ou de revêtement plastique (25 %). Dans 8 % des logements, essentiellement des maisons en tôle (à 90 %), il est constitué de terre battue.

Trois logements sur dix n’ont pas d’eau courante

En 2013, 28 % des ménages mahorais (14 900 ménages) ne disposent pas d’eau courante dans leur logement (figure 1). La situation s’est nettement améliorée depuis 2002 (75 %), mais le retard par rapport aux autres DOM est loin d’être comblé. La situation de Mayotte est comparable à celle de La Réunion d’il y a 30 ans ou de la Guyane d’il y a 20 ans. L’accès à l’eau dans le logement est fortement inégalitaire selon le type d’habitat : 92 % des ménages résidant dans un logement en dur ont accès à l’eau, contre seulement 38 % de ceux habitant dans des maisons en tôle.

La moitié des ménages qui n’ont pas l’eau courante dans leur logement ou dans leur cour s’approvisionnent chez un proche (parent ou tiers). L’autre moitié a recours à une borne publique, un puits, une citerne ou même un ruisseau ou à une rivière. Un ménage mahorais sur vingt utilise ainsi une borne fontaine monétique, un sur huit s’il habite dans une maison en tôle. Ces bornes ont été mises en place au début des années 2000 pour fournir de l’eau de qualité et limiter les risques de maladies hydriques.

Par ailleurs, lorsqu’ils s’approvisionnent chez un proche, la moitié des ménages doivent transporter l’eau recueillie sur plus de 20 mètres. Quant à ceux qui doivent se rendre dans d’autres installations (bornes publiques, puits, citernes), 9 sur 10 doivent parcourir plus de 20 mètres.

Un accès à l’électricité quasiment généralisé

L’accès à l’électricité est en revanche plus satisfaisant: 6 % des logements mahorais ne disposent pas de l’électricité (3400 ménages). Comme pour l’accès à l’eau, ce sont les habitants des maisons en tôle qui sont les plus
défavorisés: 15 % d’entre eux, contre 1 % des ménages résidant dans un logement en dur. Si la part de ménages n’ayant pas l’électricité dans leur logement a été divisée par quatre depuis 2002, elle semble néanmoins atteindre un palier, en lien avec la persistance d’une forte proportion de maisons en tôle. Dès 2007, la part de logements n’ayant pas l’électricité était en effet tombée à 8 %.

À Mayotte, avoir l’électricité dans son logement ne signifie pas pour autant avoir son propre compteur électrique. Seuls 58 % des ménages déclarent en disposer, tandis que 17 % déclarent être raccordés au compteur d’un autre logement. Ces derniers habitent principalement dans des maisons en tôle. Quant aux autres ménages (19 %), ils ne savent pas à quel compteur leur logement est raccordé.

Au moins un élément de confort absent dans les trois quarts des logements

L’état général des résidences principales à Mayotte est mauvais au regard des critères nationaux de décence d’un logement. Un logement doit disposer de l’eau, d’une baignoire ou d’une douche et de toilettes à l’intérieur du logement pour avoir le confort sanitaire de base. À Mayotte, les deux tiers des logements sont dépourvus de ce confort sanitaire de base, dont quatre logements en dur sur dix et la quasi-totalité des maisons en tôle.

En prenant en compte également l’absence de cuisine et l’absence d’électricité ou une installation électrique dégradée, ce sont près des trois quarts des logements pour lesquels manque au moins un élément de confort, contre 12 % à La Réunion et 5 % en métropole.

Le confort des logements est ainsi particulièrement bas à Mayotte: 59 % n’ont pas de toilettes à l’intérieur, 52 % n’ont ni baignoire ni douche, 58 % ont une installation électrique dégradée ou pas d’électricité, 29 % n’ont pas de cuisine (figure 2). La quasi-totalité des maisons en tôle ont plus d’un défaut alors que 43 % des logements en dur n’ont aucun des 5 défauts de base.

Pour autant, les Mahorais ont une opinion de leur logement moins tranchée que les Réunionnais sur des critères plus subjectifs. Moins de 10 % d’entre eux considèrent que leur façade principale est très dégradée, que leur logement est mal exposé ou que leur maison ou immeuble est dans un mauvais état général. Ils déclarent aussi moins souvent des signes d’humidité sur les murs (25 % hors maisons en tôle contre 40 % à La Réunion).

Deux logements sur trois sont surpeuplés

Autre point faible de l’habitat à Mayotte, 63 % des logements sont surpeuplés (10 % en métropole). Là encore, ce sont principalement les maisons en tôle qui sont concernées (9 sur 10), mais aussi la moitié des logements en dur. Les logements surpeuplés ont le plus de défauts: 88 % des logements surpeuplés ont au moins un défaut et 46 % en ont 4 ou 5. À Mayotte, 35 % des logements sont en surpeuplement accentué : ils devraient disposer d’au moins 2 pièces supplémentaires.

Ce sont ceux qui présentent le plus de défauts: 97 % d’entre eux ont au moins un défaut et 54 % en ont 4 ou 5. La plupart des occupants de ces logements sont nés à l’étranger et ont de grandes difficultés pour avoir un emploi. Ils occupent le plus souvent des maisons en tôle de petite taille dans lesquelles ils vivent nombreux. Il s’agit essentiellement de couples avec enfants et de familles monoparentales.

Les loyers reflètent la qualité des logements

À Mayotte, la moitié des ménages paient moins de 140 euros de loyer mensuel. En moyenne, un loyer coûte 320 euros. Il existe en effet deux marchés du logement bien distincts. Le premier rassemble des logements proches des normes nationales, c’est-à-dire présentant au maximum un défaut (43 % des logements en location).

Les loyers mensuels demandés sont plus élevés: 660 euros pour les logements sans défaut et 420 euros pour ceux avec un défaut. Sur le deuxième marché, les logements ayant au moins deux défauts, les loyers mensuels sont nettement inférieurs: 90 euros en moyenne et 60 euros pour un logement qui cumule les 5 défauts. Les maisons en tôle, qui très souvent cumulent les défauts, ont un loyer moyen de 60 euros contre 410 euros pour les loge-
ments en dur. Autre spécificité mahoraise, seulement un tiers des locataires disposent d’un engagement écrit ou d’un bail de location (4700 ménages). Ils paient les loyers parmi les plus élevés (près de 700 euros par mois), mais pour des logements de meilleure qualité: 87 % de ces logements n’ont aucun défaut, contre 8 % des logements qui ne disposent pas d’engagement écrit.

Les étrangers sont les plus mal logés

L’accès à l’un ou l’autre de ces deux marchés du logement à Mayotte dépend fortement des caractéristiques socio-démographiques des ménages. Le lieu de naissance conditionne ainsi la qualité des logements occupés. Les ménages dont la personne de référence est née en France hors Mayotte occupent dans neuf cas sur dix des logements sans aucun défaut. Ce n’est le cas que d’un tiers des ménages dont la personne de référence est née à Mayotte et seulement 10 % dans le cas où elle est née à l’étranger.

Plus précisément, les couples dont au moins un membre est né en France hors Mayotte disposent ainsi des conditions de logements les plus favorables: 88 % n’ont aucun des 5 défauts dans leur logement. En revanche, les couples dont les deux membres sont nés à l’étranger ont les pires conditions de logement : seulement 9 % vivent dans des logements n’ayant aucun des 5 défauts. Les couples dont les deux conjoints sont nés à Mayotte sont dans une situation intermédiaire : la moitié habitent des logements sans aucun des 5 défauts.

Dans les traditions locales, la femme est le plus souvent propriétaire du logement où réside le couple. Il convient alors de distinguer pour les couples mixtes Mahorais-Comoriens si c’est la femme ou l’homme qui est Mahorais. Si la femme est née aux Comores et l’homme à Mayotte, les conditions de logement sont plus proches de celles des couples nés à l’étranger et donc défavorables. En revanche, si la femme est née à Mayotte, les logements ont moins de défauts en moyenne : un tiers d’entre eux n’ont aucun des 5 défauts.

La qualité du logement occupé est également très variable selon la composition familiale. Les familles monoparentales et, à un degré moindre les personnes seules, sont les plus défavorisées: 71 % habitent des logements ayant au moins 2 défauts (contre 61 % en moyenne). Assez logiquement, les ménages dont au moins une personne dispose d’un emploi sont mieux logés.

guest
1 Commentaires
Huron
Huron
7 ans

Appliquer les analyses de l'INSEE à un territoire submergé par les habitants des îles voisines, n'est pas très pertinent.