Portrait d'une légende olympique

Athlétisme : Usain Bolt, légende et rockstar du sprint

  • Publié le 3 décembre 2016 à 05:39

Une légende de la piste avec l'aura d'une rockstar: le 6e titre d'athlète de l'année décerné vendredi par l'IAAF à Usain Bolt a consacré un champion hors norme qui a révolutionné le sprint, aussi bien par ses immenses exploits que par une "cool attitude" devenue son image de marque.

2017 sera la dernière année de son exceptionnelle carrière mais il n'est nul besoin d'attendre cette échéance pour mesurer la trace immense que "La Foudre" laissera dans l'histoire de sa discipline. Il y a d'abord les médailles. Avec neuf ors olympiques, dont trois cet été à Rio, et onze titres de champion du monde, le palmarès du Jamaïcain, plus jeune champion du monde juniors du 200 m en 2002, frôle la perfection.

Sur l'Olympe de l'athlétisme, le coureur de 30 ans a ainsi rejoint le Finlandais Paavo Nurmi, fondeur et crossman dans les années 1920, et l'Américain Carl Lewis, sprinteur et sauteur en longueur de génie à la fin du XXe siècle. "Je vis pour les moments où j'entre dans le stade", a réagi Bolt après cette sixième distinction, qui "signifie autant pour (lui) que la première fois". "J'adore la compétition, je rêve d'être dans le stade à affronter les meilleurs".

Seule ombre au tableau, la prévisible perte de l'une de ses médailles d'or olympique - celle du relais 4x100 m 2008 à Pékin - après le contrôle positif a posteriori de l'un de ses équipiers, Nesta Carter. "J'espère que j'ai mis la barre suffisamment haut pour que personne ne puisse le refaire. J'ai prouvé que je suis le plus grand de ce sport et, pour moi, c'est une mission accomplie", déclarait cet adepte des "punchlines" à Rio.

Mais au-delà de cette incroyable moisson, ce sont ses chronos supersoniques qui ont forgé sa réputation, faisant de chacune de ses apparitions un événement.

- Showman -

Qui pourra battre un jour les 9 sec 58/100e sur 100 m et les 19 sec 19/100e sur 200 m établis en 2009 aux championnats du monde de Berlin? Il y a fort à parier que ses records insensés tiendront un bon bout de temps et que sa place au panthéon du sport mondial dépassera largement le cadre de l'athlétisme.

Car Bolt est unique, à l'image de son gabarit (1,95 m, 94 kg), à mille lieux des physiques trapus habituels dans le sprint. Sa décontraction, son éternel sourire, son sens du spectacle le sont tout autant, dans une discipline longtemps marquée par les postures intimidantes de coureurs roulant des mécaniques avant le départ.

Il est même apparu à Rio comme le sauveur de l'athlétisme, gangrené par les affaires de dopage et de corruption. Face à Justin Gatlin, ressuscité et revenu soudainement au premier plan après une suspension, Bolt, ce géant au CV sans tâche, devait sauvegarder la crédibilité de son sport. En terrassant l'Américain, il s'est mué en superhéros, renforçant encore un peu plus sa légende.

Mais avec Bolt, le show ne se limite pas aux courses. Le Jamaïcain, avec sa bouille et sa joie de vivre, a cassé tous les codes en vigueur dans le milieu feutré de l'athlétisme, comme avec cette samba improvisée en fin de conférence de presse avec des danseuses brésiliennes avant le début des épreuves à Rio et son désormais légendaire signe de l'Eclair. Ou encore ce lancer de javelot en pleine nuit dans un stade olympique vide, quelques heures après sa 3e médaille d'or brésilienne.

- Un vide difficile à combler -

Son équipementier, Puma, l'a compris et exploite à fond le potentiel marketing d'un athlète dont les revenus sont estimés à 32 millions d'euros annuels par Forbes. Grand fan de football et de Manchester United, Bolt devrait ainsi s'entraîner durant plusieurs jours avec le Borussia Dortmund, habillé comme lui par la marque allemande.

Toujours habile pour capter l'attention et faire parler de lui, Bolt n'a d'ailleurs pas hésité récemment à se comparer aux deux stars du ballon rond Lionel Messi et Cristiano Ronaldo. "En combinant les talents des deux et en ajoutant ma vitesse et mon coeur, je serais le plus grand!", a-t-il affirmé dans son style inimitable au magazine argentin Viva.

Une idée pour la suite ? La fin est en tout cas proche et 2017 s'annonce comme une tournée d'adieux avant l'ultime grand rendez-vous de sa carrière, les Mondiaux, du 5 au 13 août à Londres. C'est dire si le vide qu'il laissera dans le monde de l'athlétisme sera difficile à combler. Surtout pour un sport cerné par les affaires et dont l'image est au plus bas.

Par Keyvan NARAGHI - © 2016 AFP

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