Tribune libre de Marie Claude Barbin

Le viol d'un (e) enfant est un crime !

  • Publié le 29 septembre 2017 à 18:15
  • Actualisé le 29 septembre 2017 à 18:16

L'histoire de la petite Sarah relayée par Médiapart le 25 septembre, reprise par les médias nationaux, nous amène à un terrible constat. D'une part, la banalisation du viol : ce déni sociétal requalifié par la justice " d'atteinte sexuelle " non passible d'une cour d'Assises. D'autre part, le " consentement " supposé libre et éclairé d'une enfant. Les faits tels qu'ils sont rapportés : Sarah, 11 ans, a suivi un inconnu de 28 ans, avec qui elle a eu deux rapports sexuels. Autrement dit, Sarah (mineure) été violée par un adulte qui peut récidiver en toute impunité.

 

Son agresseur n’est pas poursuivi pour viol, mais pour " atteinte sexuelle ". Double peine pour Sarah. Atteinte, oui ! à l’intégration physique et psychique d’une petite fille qui n’a pas la maturité psycho affective et sexuelle, ni les outils émotionnels pour analyser ce qui lui arrive. Sarah a été abusé psychologiquement et physiquement avec toutes les conséquences dramatiques sur sa vie entière. On peut lire ici et là : " le suspect de 28 ans, en paraissait moins ; tandis que la victime fait quelques années de plus ! " Des stéréotypes machistes véhiculés par une société basée sur la culture du viol, la non protection des enfants.
Le viol tel qu’il est inscrit dans le Code Pénal (article 222-23), est un crime. Il est défini comme " tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise. "

Le prédateur sexuel n’a pas besoin d’avoir recours à la violence, dans la plupart des cas. Il traque sa proie en mettant en place une série de stratagèmes basés sur la séduction, la manipulation, afin d’exercer son emprise perverse et annihiler toute résistance chez la victime réduite à l’état d’objet sexuel au service de ses pulsions criminelles. Le prédateur ne s’arrête jamais à une seule proie, tant qu’il n’est pas mis hors d’état de nuire.

La justice estime qu’une enfant de 11 ans peut-être " consentante " parce qu’elle n’a pas crié, elle ne s’est pas débattue. L’on peut s’interroger sur la " méconnaissance " des mécanismes psycho traumatiques à l’œuvre chez les victimes de viol (enfants, adultes). Mécanismes longuement étudiés par les professionnels de l’aide aux victimes, dont la psychiatre Muriel Salmona, spécialiste du psycho-traumatisme, à savoir : la sidération, la dissociation.

Lors d’un viol, l’organisme est soumis à un stress intense, lié à la peur de mourir : c’est la sidération. Ce phénomène psychologique a toujours existé. La victime tétanisée, paralysée, est incapable de crier, se débattre, s’enfuir... Afin de se protéger, le cerveau disjoncte comme un circuit en survoltage, et se met en mode sauvegarde : une mort psychique gravée dans la mémoire traumatique à jamais.

S’ajoute à cela le phénomène de dissociation. L’anesthésie émotionnelle et corporelle génère un sentiment d’irréalité : " c’est comme dans un rêve ! ", un monde dépourvu de sens, où la victime se sent " absente " de la scène, en mode automatique.

La législation actuelle obsolète, fait froid dans le dos. La Cour de Cassation considère que la contrainte est retenue uniquement pour les enfants " en très bas âge ". À quand la présomption de " non consentement " ? La loi française fixe la maturité sexuelle à 15 ans.
Pourquoi ce serait aux enfants de se protéger des prédateurs ? Notre processus empathique semble en panne face à l’horreur : la transgression de ce tabou fondamental qu’est le viol.

Marie Claude Barbin

 

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