Triste anniversaire à La Réunion

Il y a cinq ans, l'accès à l'océan a été interdit

  • Publié le 26 juillet 2018 à 15:56
  • Actualisé le 26 juillet 2018 à 15:58

Ce sont plusieurs associations locales qui le rappellent : il y a cinq ans, l'accès à l'océan a été interdit à La Réunion. C'était le 26 juillet 2013. après cinq attaques de squales mortelles survenues en quatre années seulement, la préfecture a décidé d'interdire la baignade, le surf et le bodyboard hors du lagon et des zones surveillées. En tout ce ne sont pas moins de 1 826 jours d'interdiction de baignade que compte aujourd'hui l'île de La Réunion.

Voici le communiqué des associations concernées (lire ci-dessous) :

"1826 jours d’interdiction "provisoire" d’accès à l’océan

26 juillet 2018, pas de manifestation, pas de larmes, pas de colère, mais juste un constat amer. Nous fêtons les cinq années d’interdiction "provisoire", reconduite déjà huit fois depuis le 26 juillet 2013, et en vigueur jusqu’au 15 février 2019.

Lire aussi => Risque requin - Hors lagon et zones surveillées - Le préfet interdit la baignade, le surf et le bodyboard

En attendant la prochaine victime parmi les irréductibles passionnés, on ne compte plus les communiqués décomplexés des autorités rappelant "à la prudence", alors qu’elles sont censées interdire l’accès à l’océan. Une situation qui renforce le caractère ubuesque du seul territoire français, d’une île, privée d’accès à l’océan.

Cette interdiction est illégale puisqu’à force de se prolonger, elle revêt un caractère définitif, et bafoue les principes élémentaires de liberté et d’égalité si chers à la France. La crise requin n’est pas une question d’argent mais bien de courage politique. 10 millions d'euros déjà dépensés, 100 millions d'euros demain, cela n’y changera rien! L’argent n’a aucun pouvoir sur la nature des prédateurs, qui ne redoutent que la mort.

Le secrétaire d’État à l’Ecologie, Sébastien Lecornu, a osé récemment nous renvoyer à une approche " moderne " de la biodiversité, confirmant le principe d’une cohabitation pacifique, fantasmée par des bureaucrates et autres justiciers e-colos citadins. Pendant ce temps, le pourrissement de la situation profite aux identitaires en alimentant les rancœurs du passé, jusqu’à mettre en péril le cœur même de notre unité. L’engouement populaire et politique qui a rapidement conduit à " libérer la plage " tranche face aux railleries que suscite depuis 2011 le "rendre la mer".

+L'Etat est responsable+

Pourtant il n’y a rien de glorieux à clamer un petit espace de liberté retrouvée, juste devant un océan interdit en totalité. Oui, L’État est responsable. Il a laissé mettre sans aucun garde-fou en 2007 une Réserve en plein cœur d’une paisible zone balnéaire, développée sous sa houlette depuis les années 1980.

Jadis pêcheur, perçu en tant que menace dans ce périmètre, l’Homme est aujourd’hui redevenu une vulgaire proie pour des bouledogues de 300kg totalement désinhibés. Cette décision a conduit à des drames à répétition (lire ci-dessous), à la destruction de notre économie littorale et de toute une vie sociale autour d’un océan partagé avec sérénité.

Rappelons qu'en ce moment même, sur le littoral en France, en à peine deux mois d’été, 35 millions de touristes apportent une valeur ajoutée exceptionnelle estimée à 50 milliards d'euros, qui fait vivre des millions de Français pour toute une année. À la Réunion, alors qu’ici c’est l’été permanent et que nous connaissons un chômage record, nous n’avons droit à rien!

Sachez que les solutions simples existent, mais elles restent refusées encore aujourd’hui, car elles passent nécessairement par un retour à la pêche traditionnelle, comme chez nos voisins mauriciens ou seychellois, comme avant.

Non, cette crise n’est pas une fatalité! Elle est juste l’expression cruelle d’un mépris profond de la France envers ses territoires d’outre-mer. C’est un scandale d’État, un État qui au nom d’une hypocrite "exemplarité écologique" prend ses lointains citoyens pour des moins que rien, à peine bons pour finir en chair à requins. Elle est aussi l’expression paroxysmique d’un conflit de société, sous couvert d’angélisme autour d’une pseudo égalité homme-animal.

Ce symbole d’une prétendue harmonie retrouvée, ne constitue en réalité que l’expression d’un profond anti humanisme. Il amène des gens jusqu’à se réjouir de la mort de leurs semblables désormais, lorsque celle-ci résulte d’une confrontation à la nature. Qu’avons-nous fait pour mériter une telle punition ? Va-t-on vivre cette crise indéfiniment ? Avons-nous encore le droit en 2018 de refuser d’être des cobayes ou des martyrs ?

Association Océan Prévention Réunion (OPR), Association Elio Canestri, Association Protégeons Nos Enfants (PNE), Association Vérité et Responsabilités sur les attaques de Requins (VRR) Association Sécurisation Prevention Ocean Tansalé (SPOT), Association Planète Bleue Saint-Benoît (PBSB),Association Sports Industries Réunion (ASIR),Collectif Citoyen Handicap, Collectif des familles et proches des victimes de la crise requin, Collectif Humanisme Océan Indien (CHOI)."

 

Neuf attaque mortelles en six ans

- 15 juin 2011 : Au niveau du Cap Homard, tout près de la plage de Boucan-Canot, un bodyoarder de 31 ans, Eddy Aubert, a perdu la vie

- 19 septembre 2011 : L'ancien champion de bodyboard Mathieu Schiller a été happé par un requin près du rivage de la plage de Boucan Canot

- 23 juillet 2012 : Alexandre Rassiga, un surfeur de 21 ans, a été tué par un requin au large du spot de Trois Bassins

- 8 mai 2013 :  Stéphane Berhamel, un bodyboader de 35 ans a été attaqué par un requin au spot des Brisants (Saint-Gilles)

- 15 juillet 2013 : Une jeune fille d'une quinzaine d'année, Sarah Roperth, a été chargée et tuée par un requin ce lundi 15 juillet 2013 au niveau du cimetière marin en baie de Saint-Paul. En compagnie d'une autre jeune fille, Sarah Roperth se baignait à 5 mètres du bord lorsqu'elle a été attaquée.

- 14 février 2015 : Talon Bishop, une jeune baigneuse de 22 ans a été happée par un requin alors qu'elle était très près du rivage à Pont Mulla (Etang-Salé). Gravement mordue à une jambe, elle est décédée à l'hôpital

- 12 avril 2015 : Un adolescent de 13 ans, Élio Canestri, a été mortellement attaqué alors qu'il pratiquait son sport sur le spot des Aigrettes (Saint-Gilles) en compagnie de six autres jeunes surfeurs du pôle espoir

- 21 février 2017 : Alexandre Naussac, 26 ans, tué par un requin à l'embouchure de la rivière du Mât (Saint-André). Il a été attaqué alors qu'il était en pleine session de bodyboard en compagnie de plusieurs amis. 

- 29 avril 2017 : Le bodyboardeur, Adrien Dubosc, 30 ans, a été mortellement attaqué par un requin du côté de la Pointe au Sel, à Saint-Leu

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