La pire année depuis 50 ans

Campagne sucrière : c'est fini les 15 et 18 décembre.... ou pas

  • Publié le 13 décembre 2018 à 15:36
  • Actualisé le 13 décembre 2018 à 15:46

Les derniers cachalots devraient se présenter aux usines de Bois Rouge le 15 décembre et le 18 décembre pour le Gol. Ainsi en ont décidé les commissions mixtes, alors que les planteurs peinaient, ces derniers jours, à livrer plus de 5000 tonnes de cannes par jour, quand Tereos en espérait 8000. Du côté des planteurs et de la Chambre d'Agriculture, on espère une renégociation de la date butoir d'au moins deux ou trois jours pour limiter les pertes. Du côté de Tereos, les chiffres font force de loi.

L'année catastrophe : 2018 ! "On n'avait pas vu ça depuis les années 50". S'il y a au moins un sujet qui fait l'unanimité entre les planteurs, la Chambre d'Agriculture et l'industriel, c'est bien celui-là. Cyclones, pannes à répétition à l'usine, mouvements sociaux : les planteurs ont l'impression de couper la canne pour se faire battre.

La campagne, à ce jour, a permis de traiter 1 353 000 tonnes de canne. En 2017, pourtant pas l'année faste non plus, le décompte était de 1 860 000 tonnes.

Le 15 à Bois Rouge, le 18 au Gol, le rideau tombera sur une campagne cata. En principe. Les planteurs aimeraient bien une petite rallonge. Pour la FDSEA, une quinzaine de jours serait nécessaire. A la Chambre d'Agriculture, on tempère davantage : "Déjà trois jours, ce serait bien, ça limiterait les pertes", souligne Jean-Bernard Gonthier. Mais Téréos acceptera-t-il ce délai supplémentaire ?

L'heure des décomptes

L'industriel, lui, attend des réponses : combien reste-t-il réellement de cannes dans les champs, combien les planteurs peuvent-ils fournir chaque jour, pourront-ils finir leur coupe alors que les conditions climatiques se dégradent...  Des questions auxquelles les planteurs vont essayer de répondre d'ici la fin de la semaine. Sans certitude de voir leur demande acceptée.

"Le pouvoir est d'un seul côté, celui de l'industriel, s'insurge Frédéric Vienne, Président de la FDSEA. A La Réunion, il n'y a pas de filière canne. Il y a les planteurs d'un côté, l'industriel de l'autre, en situation de monopole. Si on continue comme ça, à ce rythme, la canne va disparaître à La Réunion."

Des alternatives à bâtir

La solution ? "Il nous faut des alternatives à Téréos, explique Frédéric Vienne. Aux Antilles, les planteurs ont les distilleries pour écouler leurs cannes, il y a aussi la canne énergie. Ici, nous n'avons aucune alternative. La convention canne a été négociée jusqu'en 2021 mais il ne faut pas qu'on se retrouve alors face à Téréos une nouvelle fois en situation de monopole. On est en train d'ouvrir des portes avec la Chambre d'Agriculture pour trouver des débouchés".

Clairement les ambitions sont exprimées alors que les élections à la Chambre d'Agriculture se profilent : "Il nous faut une Chambre d'Agriculture forte, qui monte des projets en alternative à Téréos, scande Frédérie Vienne. La canne, c'est un chantier large de propositions or on n'utilise que 30% du potentiel. Il y a d'autres débouchés comme la canne énergie, mais aussi l'alternative au plastique avec des contenants alimentaires comme des bouteilles réalisées à partir de la bagasse ou encore la transformation du sucre en produit compatible pour les diabétiques".

Et de dénoncer "le manque d'ambition visionnaire de l'équipe actuelle qui se contente de gérer le quotidien". Pour Frédéric Vienne, il y a "un modèle à repenser et à reconstruire".

Bon prince viendra... ou pas

A la Chambre d'Agriculture, on est moins incisif, sauf envers Téréos : "Clairement, l'industriel a manqué de solidarité avec les planteurs en n'acceptant pas d'ouvrir trois ou quatre jours de plus. On risque d'avoir 15 000 tonnes qui restent sur pied, ce qui va impacter négativement la qualité de la canne pour l'année prochaine, qui sera moins riche. Déjà que le découragement est grand, ça ne va pas aider ", reconnait Jean-Bernard Gonthier.

A 65 euros la tonne, ça fait des sous perdus, en effet. "En indemnisation, on aura 20 euros la tonne, c'est loin du compte, ça ne compense pas la perte", déplore Frédéric Vienne.

Qui plus est, selon le président de la FDSEA, certains agriculteurs attendent encore les subventions de l'Etat accordées au titre des MAE (Mesures Agro Environnementales) : "L'Etat a trois ans de retard sur le versement de ces aides. Vu l'année catastrophique que nous avons subie, l'Etat pourrait faire un effort pour payer plus vite, d'ici la fin de l'année, d'autant que c'est de l'argent qui est dû", conclut Frédérie Vienne.

Mais en matière de délais, à ce jour, la grande question des planteurs, c'est de savoir si Téréos va se montrer bon prince et accorder quelques jours de coupe de plus...

ml/www.ipreunion.com

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