Professeurs pédophiles présumés en outre-mer

Ségolène Royal dit avoir "mis fin à la loi du silence"

  • Publié le 11 février 2020 à 10:05
  • Actualisé le 11 février 2020 à 12:31

L'ex-ministre a été entendue à huis clos ce lundi 10 février 2020 en fin de journée par le bureau de la délégation aux ​Outre-mer de l'Assemblée nationale. Après son audition Ségolène Royal a affirmé à la presse avoir "mis fin à la loi du silence" quand elle était ministre déléguée à l'Enseignement scolaire, de 1997 à 2000. La délégation a décidé de demander la création d'une commission d'enquête parlementaire sur cette affaire. (Photo d'illustration AFP)

Ségolène Royal, qui venait d'être auditionnée à huis-clos par le bureau de la délégation aux Outre-mer de l'Assemblée nationale, avait déclenché la polémique en déclarant le 3 janvier, sur BFMTV-RMC, que la pédophilie "était un tabou, avant" et qu'on "mutait discrètement les (professeurs) pédophiles, si possible dans les outre-mer comme ça c'était loin on n'en entendait plus parler".

"La consternation suscitée par ces propos a touché l’ensemble de la classe politique ultramarine", a souligné dans un communiqué le président de la délégation aux Outre-mer de l’Assemblée Olivier Serva (LREM, Guadeloupe), qui l’a invitée à s’exprimer devant le bureau de la délégation.

Ségolène Royal a précisé à la presse à la sortie de son audition, que lorsqu’elle avait été nommée ministre déléguée, elle avait " eu vent de cette rumeur de mutations, pas seulement dans les Outre-mer, mais aussi dans les villages ruraux isolés ou même dans l’administration. Pas vu pas pris vous voyez, la loi du silence régnait et j’ai mis fin à cette loi du silence ".

300 signalements effectués

Elle a expliqué qu'après avoir mis en place la circulaire du 26 août 1997 "qui disait très clairement aux adultes dans le milieu scolaire qu'ils avaient l'obligation de saisir le procureur de la République dès lors qu'ils avaient la révélation par un enfant ou par la famille de cet enfant d'abus sexuels sur lui et que les enseignants étaient immédiatement suspendus", "il y a eu 300 cas qui ont été déclenchés".

Cette circulaire a, selon elle, "permis de clarifier les procédures et donc de mettre fin à la rumeur en passant aux actes et aux faits et donc aussi aux condamnations et aux révélations".

Interrogé début février, le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer a affirmé qu'il n'y avait "aucun élément probant" permettant de corroborer les propos de l'ex-ministre socialiste.

Plusieurs députés, dont celui de Guyane Gabriel Serville (GDR) et Olivier Serva, ont demandé la mise en place d'une commission d'enquête parlementaire. Le député LFI Jean-Hugues Ratenon (La Réunion) a déploré une audition à huis clos en format restreint, devant le bureau de la délégation, et non la délégation entière.

"Pas de réponse claire"

Ce mardi 11 février, la députée LFI Danièle Obono, membre du Bureau de la délégation, estime "ne pas avoir eu de réponse claire par rapport à ce qui a été affirmé. Ségolène Royal a évoqué l'existence de la circulaire, d'accord, mais concernant ce qui a pu se passer avant, nous n'en savons pas plus. Sur les 300 signalements qui ont été faits, combien concernent les Outre-mer ?"

Elle ajoute que "ce que cette audition a permis, c'est surtout confirmer la nécessité d'une commission d'enquête parlementaire." Ce que le Bureau de la délégation a en effet demandé par la suite.

Du côté du collectif réunionnais Nout Zenfant, on se sent déçu également. "Ségolène Royal a aussi parlé des petites communes rurales en plus des Outre-mer, ce qui soulève encore plus de questions" note Alexandrine Araye, représentante du collectif. "Cette audition a duré 40 mn... seulement 40 mn pour des faits aussi graves. Ségolène Royal parle de "loi du silence" qu'elle a brisée, c'est plutôt nous qui la subissons cette loi du silence."

Le choix de faire une enquête parlementaire ne la convainc pas pour autant. "On a donné un thème : pédo-criminalité en Outre-mer... On sent que les députés vont sortir un pavé sans suite derrière. Et nous n'avons aucun détail sur cette enquête, combien de temps va-t-elle durer ? Les réusltats seront-ils rendus publics ? Y aura-t-il débat à l'Assemblée nationale par la suite ?"

Alexandrine Araye estime que le peuple a été laissé de côté : "cette histoire se règle entre élus, entre parlementaires. Il aurait fallu lancer une enquête judiciaire, et non parlementaire." Le collectif prévoit éventuellement d'autres rassemblements à venir. Il sera également reçu à la préfecture ce mercredi 12 février 2020 dans la matinée.

www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com avec AFP

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