Faute d'accord sur le protocole de livraison

Campagne sucrière : il va falloir attendre encore un peu

  • Publié le 29 juin 2020 à 07:10
  • Actualisé le 29 juin 2020 à 11:15

La campagne sucrière 2020 devait démarrer ce lundi 29 juin 2020, avec l'espoir de rattraper une année 2019 bien morose. Il n'en est finalement rien, industriels et agriculteurs n'étant pas d'accord sur le nouveau protocole de livraison après plusieurs jours de négociation. Les planteurs refusent de remplir entièrement les remorques de livraison, condition que les industriels souhaitent inclure dans le nouveau protocole. La proposition des planteurs de débuter la campagne avec le protocole 2019, le temps d'en définir un nouveau, a été rejetée. (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

Une réunion de la Commission Mixte d’Usine s’est tenue vendredi dernier pour définir la date officielle du début de la campagne sucrière, et surtout statuer sur le protocole de livraison au groupe coopératif Tereos modifié cette année, et très critiqué.

L’usinier demandait en effet aux agriculteurs de remplir entièrement les remorques de livraison des cannes à leur arrivée aux balances. Un remplissage que les planteurs estimaient trop risqué compte-tenu de la sinuosité des routes réunionnaises.

En cas d’infraction à ce protocole, les agriculteurs s’exposent à des pénalités, l’usine se réservant par ailleurs le droit d’acheter la canne ou de la refuser, après avoir contrôlé le chargement.

Après plusieurs jours de négociations, industriels et planteurs n'ont pas trouvé d'accord, repoussant à une date ultérieure le début de la campagne 2020. "En tant que président de la CPCS (Commission paritaire de canne et du sucre), j'ai demandé à ce qu'on démarre la campagne avec l'ancien protocole mais ça a été botté en touche par les industriels, qui ne veulent pas démarrer sans un nouveau protocole", relate Isidore Laravine, également membre de la CPER (Confédération générale des planteurs et éleveurs de La Réunion).

L'année dernière, la coupe avait démarré avec le protocole de la campagne précédente, avant qu'un nouveau soit signé au mois de septembre. Une proposition refusée par les industriels cette année. Il faudra donc attendre avant les premières coupes de 2020.

- Se relever de 2019 -

Une campagne 2020 que les professionnels de la filière espèrent meilleure que la précédente, dont les résultats étaient franchement décevants. Moins d’1,5 million de tonnes de cannes avait été livrée. “La campagne 2019 était très moyenne”, se remémore Isidore Laravine. “On revenait de 2018, où il y avait eu un cyclone. Généralement les années qui suivent un cyclone sont mauvaises. C’est ce qu’il s’est passé l’année dernière.”

La FDSEA (Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles) avait carrément qualifié la dernière campagne de “pire des 50 dernières années”.

Pour Frédéric Vienne, président du syndicat agricole et de la Chambre d’agriculture de La Réunion, le premier enjeu de la campagne 2020 est d’avoir des cannes reflétant le travail des planteurs tout au long de l’année. “Les agriculteurs ont travaillé sans relâche pendant l’inter-campagne pour avoir une production correcte. Ils espèrent une campagne sans trop de casse”, dit-il en référence aux démarrages compliqués et pannes techniques de certaines usines, ces dernières années.

“La campagne devrait bien se dérouler parce qu’il y a du volume, surtout dans le Nord-est. Dans le Sud, ça reste dur à définir parce que ce n’est pas homogène”, explique-t-il d’un timide optimisme. “Le tout n’est pas d'avoir du volume. L'important, c’est surtout d’avoir de la teneur en sucre qui permette de garantir un revenu. C’est la principale inquiétude.”

- La Convention canne dans toutes les têtes -

Alors que l’impact économique de la crise sanitaire menace déjà le futur de la filière, l'échéance prochaine de la Convention canne plane au-dessus des agriculteurs. “Il nous reste deux campagnes avant la prochaine Convention. Il y a un enjeu majeur par rapport à ça, puisque notre prix est garanti jusqu’en 2021”, indique Isidore Laravine.

“Ça fait 200 ans qu’il y a la canne à La Réunion. Je me rappelle quand (Paul) Vergès disait, il y a plusieurs années, que la canne était finie. En 2020 on est toujours là. Il y aura une nouvelle Convention en 2022. Mais dans quelles conditions ? Les planteurs freinent leurs investissements parce qu’on n’a pas de visibilité après 2021”, ajoute-t-il. “On a des inquiétudes par rapport à ça, mais la campagne elle-même devrait se dérouler correctement.”

Les premières appréciations se situent autour de 925.000 tonnes dans l’Est et 900.000 tonnes dans le Sud, soit plus 1,8 million de tonnes de cannes. En attendant de connaître la richesse saccharine, “difficile à estimer en début de campagne”, ces chiffres permettraient d’aborder les prochains mois un peu plus sereinement. D’autant que le froid, arrivé de bonheur cette année, devrait provoquer une montée en sucre dans les cannes.

Sans quoi, Dominique Clain, président de l'UPNA (Unis Pour Nos Agriculteurs), craint que ne monte "le découragement chez les planteurs", qui tirent déjà difficilement un revenu. Pour rappel, plus de 12.000 personnes dépendent de la canne à La Réunion.

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