L'enquête antiterroriste se poursuit

Attaque au hachoir à Paris: huit gardes à vue en cours, une vidéo à l'étude

  • Publié le 27 septembre 2020 à 14:29
  • Actualisé le 27 septembre 2020 à 15:37

Huit personnes en garde à vue et une éventuelle vidéo de revendication à l'étude: près de 48 heures après l'attaque au hachoir à Paris l'enquête antiterroriste se poursuivait dimanche autour du parcours du principal suspect qui a reconnu vouloir s'en prendre à Charlie Hebdo.

Les enquêteurs s'intéressent tout d'abord à l'identité de celui que le procureur national antiterroriste Jean-François Ricard a qualifié dès vendredi d'"auteur principal" de l'attaque qui a fait deux blessés graves devant les anciens locaux de Charlie Hebdo: cet homme se présente comme Hassan A., âgé de 18 ans, né à Mandi Bahauddin, au Pakistan.

Inconnu des services spécialisés sous cette identité, l'homme "parle un peu le français, mais bénéficie d'un traducteur en ourdou pour sa garde à vue", selon une source proche de l'enquête.

L'identité d'Hassan A. correspond à celle d'un jeune homme entré en France encore mineur, il y a trois ans. Pris en charge par l'aide sociale à l'enfance dans le Val-d'Oise jusqu'à sa majorité en août dernier, il n'aurait présenté "aucun signe de radicalisation", selon le conseil départemental.

Il avait fait l'objet d'un rappel à la loi en juin pour le port d'une arme blanche, un tournevis ou une feuille de boucher, selon les sources. De source proche de l'enquête, Hassan A. envisageait de se lancer dans une formation aux métiers du bâtiment.

Deux des domiciles présumés de ce principal suspect, présenté comme "itinérant", ont été perquisitionnés vendredi, un hôtel social situé à Cergy (Val-d'Oise) et un deux-pièces à Pantin (Seine-Saint-Denis) meublé de plusieurs lits superposés.

"C'est quelqu'un de très poli. Je le voyais souvent assis sur le palier avec son téléphone. Il m'aidait à porter mes courses", a raconté à l'AFP Josiane, une voisine.

- Il visait Charlie Hebdo -

Autre question centrale pour les enquêteurs: le mobile de cette attaque. En plein procès de l'attentat meurtrier de janvier 2015 contre l'hebdomadaire satirique, l'homme "assume son acte" qui visait Charlie Hebdo, expliquent des sources proches de l'enquête.

Le suspect pensait que l'hebdomadaire se trouvait toujours dans les locaux du XIe arrondissement, selon l'une de ses sources, d'après qui cette attaque intervient "dans le contexte de la republication des caricatures (du prophète Mahomet, ndlr) qu'il n'a pas supportée".

Les enquêteurs s'intéressent à une vidéo en cours d'authentification, un élément révélé samedi par Le Point. "On le voit en train de pleurer, de chanter, il assume son geste par anticipation en évoquant la republication des caricatures, c'est une sorte de manifeste, il annonce son passage à l'acte, mais ce n'est pas une allégeance à une organisation", selon la même source.

Dans le week-end, une vidéo de deux minutes circulait sur les réseaux sociaux, semblant correspondre. Dans celle-ci, un homme se présente comme "Zaheer Hassan Mehmood" et se déclare "ému" par "des caricatures du prophète Mohammed qui ont été faites".

"Aujourd'hui, vendredi 25 septembre, je vais les condamner", ajoute-t-il. Comme toujours dans ce type d'enquêtes, les services antiterroristes vérifient enfin l'entourage du principal suspect.

Dimanche matin, huit gardes à vue étaient encore en cours: l'homme se présentant comme Hassan A., cinq anciens colocataires de son appartement de Pantin, son petit frère et une connaissance.

De source judiciaire, une garde à vue a été levée samedi en fin de journée, celle d'un colocataire de Hassan A. lorsqu'il habitait à Cergy. Dès vendredi soir, un homme initialement considéré comme suspect et placé en garde à vue, "Youssef", un Algérien de 33 ans, avait été en relâché. L'homme, un "héros" selon son avocate, avait en réalité tenter d'arrêter l'attaquant au couteau, ce que l'enquête a corroboré.

Il s'agit de comprendre "l'environnement" du suspect, selon la source proche du dossier, "car "tout laisse à penser qu'il a agi seul", a expliqué l'une des sources proches de l'enquête.

- "Resserrer les mailles du filet" -

Dimanche, l'ex-secrétaire d'Etat à l'intérieur Laurent Nuñez, devenu patron de la "task force" antiterroriste de l'Elysée, a estimé dans un entretien à l'AFP que "nous améliorons la détection" en la matière mais "il faut resserrer encore les mailles du filet".

L'actuel ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a lui évoqué son devoir supposé de "rappeler la réalité aux Français" et estimé dimanche que ceux-ci et leurs dirigeants avaient "peut-être (...) collectivement" mis derrière eux la réalité du "terrorisme islamique", lors d'une visite de synagogue à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine) pour la fête juive de Yom Kippour.

Pour le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, s'exprimant samedi soir sur France 2, "il y a le terrorisme très structuré" que les services "surveillent de très près", "et puis il y a ce terrorisme-là".

Pour l'ancien avocat, "le terrorisme 'low cost', c'est votre voisin à qui vous dites bonjour tous les jours, qui ressemble à monsieur tout le monde et qui passe à l'acte sans qu'il y ait un certain nombre d'éléments extérieurs permettant de penser qu'il va passer à l'acte".

AFP

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