[MÉTÉO FRANCE] D'un météorologue à l'autre, le bulletin peut changer

"90 % des prévisions météo à La Réunion sont bonnes"

  • Publié le 19 septembre 2017 à 03:00
  • Actualisé le 19 septembre 2017 à 06:56

Lorsque Météo France promet du beau temps, il peut arriver que le ciel soit moins clément que prévu. Pas facile parfois de programmer des sorties en plein air en se fiant aux bulletins météo. L'erreur peut venir des logiciels utilisés comme d'une mauvaise interprétation des données. L'expérience du météorologue au temps sensible de La Réunion entre aussi en compte. D'un spécialiste à un autre, le bulletin est donc susceptible de ne pas être exactement identique. L'île est quand même bien lotie, assure le spécialiste Jacques Écormier, responsable du service prévisions à Météo France : les prévisions seraient bonnes dans 90 % des cas.

 

Marmites, tabourets, dominos... tout est prêt pour la sortie plage du dimanche. On est samedi soir, donc on jette quand même un petit coup d'oeil à la météo du lendemain. Bonne nouvelle, le bulletin annonce un ciel clément, avec peut-être une légère couverture nuageuse, mais rien de bien méchant. Ouf ! Le lendemain arrive... et là c'est la douche froide. Averses, vent, houle : bref, pas vraiment un temps pour profiter du sable et de la douceur de l'ombre des filaos. Et là, face à la pluie battante à l'extérieur de la case, on s'en prend à Météo France et à leurs prommesses de beau temps erronnées. Sauf que, comme le rappelle Jacques Écormier, responsable du service prévisions, c'est l'incertitude qui règne dans son métier. "On utilise des modèles, donc des logiciels. Mais ces logiciels ne sont pas parfaits, il y a toujours de l'incertitude" souligne le spécialiste.

Mais déjà, comment ça marche une prévision météo ? Premièrement, on observe le temps. Ensuite, on mesure la température, la pression de l'air. Et tout ça, c'est par le biais de logiciels. Et enfin, c'est l'expérience du prévisionniste qui entre en compte. Pour une prévision de pluies sur Saint-Denis par exemple, le spécialiste va adapter les données fournies par logiciel en utilisant ses connaissances personnelles. On coupe la poire en deux, entre la technologie et l'humain. Alors forcément, la difficulté est redoublée : le logiciel peut se tromper et le prévisionniste peut mal interpréter les éléments d'information délivrés. Avec les années, cette incertitude diminue. Aujourd'hui, les prévisions du temps à La Réunion sont bonnes dans 90 % des cas, assure Jacques Ecormier. Une bonne chose au vu du "temps sensible" du département. Mais, "généralement, on retient le 10 % représentant des prévisions moins bonnes ou fausses".

- Un météorologue performant selon son expérience -

Alors, qu'est ce qui peut concrètement provoquer une mauvaise prévision ? Les passionnés qui gèrent la page Facebook Actus Météo 974 avancent plusieurs explications : "Une ou plusieurs données peuvent être tronquées, manquantes ou mauvaises. Les modèles utilisés, malgré des progrès réguliers, ne permettent actuellement pas de simuler parfaitement les conditions météo. À La Réunion, les reliefs doivent aussi être pris en compte, par exemple. Ensuite, tout est dans le facteur humain, le météorologue ne sera certainement pas aussi performant selon son expérience". Ce sont principalement les effets du relief de l'île que le prévisionniste devra prendre en compte pour adapter les données du modèle. "Pour faire simple, il ne suffit pas d'appuyer sur un bouton" concluent les autodidactes.

Autre prisme auquel on ne pense pas forcément : le diffuseur final de la prévision. Entre les choix de l'infographiste et les remarques du présentateur, les bulletins télévisés sont susceptibles de transmettre l'information de façon déformée. "On peut vous dire "aujourd'hui grand soleil", parce qu'il y a 60 % de chances qu'il y ait du soleil mais on peut aussi vous dire "20 % de chances d'une couverture nuageuse sans pluie et 20 % de chances de pluies. Vous n'interprétez pas l'information de la même façon et pourtant c'est exactement la même, elle est juste communiquée différemment" illustrent les passionnés d'Actus Météo 974.

- Des calculs en pleine mer -

Pour le cas des déclenchements de vigilance, il arrive ainsi que les fortes pluies ou les orages annoncés ne viennent... jamais. "Cette année, on a fait deux vigilances orages et les orages sont passés en pleine mer. Donc, pour le grand public, c'est une erreur de prévision" relate le responsable du service prévisions. En précisant que le choix des météorologues se porte de toute manière sur "la solution la plus mauvaise" car "il faut quand même se prémunir lorsqu'on a des phénomènes très dangereux". De là à ouvrir un débat sur les vigilances oubliées ou déclenchées à tort, il n'y a qu'un pas. Selon les gérants d'Actus Météo, "il y en a eu et il y en aura encore, l'incertitude est l'essence même de la prévision météo. Mais il faut en discuter à froid et pas en situation de crise".

En ce qui concerne les précipitations, "il se peut qu'il pleuve très fortement sur le Port, par exemple, et qu'il y ait un ciel plutôt clément à Saint-Leu" indique Jacques Écormier. Ici, la difficulté réside dans le fait que les éléments déclencheurs des fortes pluies sont "de petite dimension". Au contraire de la France métropolitaine, où des tempêtes peuvent concerner des surfaces s'étendant sur des milliers de kilomètres. Si les prévisions sur les fortes pluies ou les orages peuvent donc parfois être bancales, c'est moins le cas pour les phénomènes tels que les cyclones. Leur intensité et leur durée dans le temps permettent de diminuer l'incertitude et d'avoir une "prévision excellente". En outre, comme le précisent les gérants d'Actus Météo 974, "la prévision cyclonique fait l’objet d’études et de recherches dédiées à l’échelle mondiale".

Mais la tendance globale est à l'amélioration, selon Jacques Écormier. "Actuellement, on est sur un calcul des températures, des pluies, sur deux kilomètres. Pour le moment, on ne peut pas descendre davantage au niveau des calculs opérationnels" précise t-il en ajoutant que "des mesures radar" sur Saint-Rose, Saint-Philippe et le littoral de Saint-Leu seraient les bienvenues au niveau des précipitations.

Pour le moment, ces nouveaux outils ne sont cependant pas à l'ordre du jour.  L'évolution se passera d'abord plutôt à l'échelle de la houle. De nouveaux logiciels devraient arriver au début de l'année prochaine : ils permettont d'avoir une meilleure visibilité sur la houle à la côte. Actuellement, les prévisions sont faites en plein océan, d'où une marge d'erreur. C'est le prévisionniste qui, encore une fois en fonction de son expérience, adapte ces données à la côte. Qu'il s'agisse des vagues, de la pluie ou du vent, difficile donc de s'improviser météorologue du jour au lendemain.

mp/www.ipreunion.com

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