Varroa : la grande menace

Dans 5 ans, il pourrait ne plus y avoir d'abeilles à La Réunion

  • Publié le 27 octobre 2017 à 08:54
  • Actualisé le 27 octobre 2017 à 08:55

Redoutable parasite, le varroa continue à se propager dans les ruchers réunionnais. Et les taux de mortalité chez les colonies commencent à se faire ressentir de façon croissante. Olivier Esnault, vétérinaire spécialiste de l'apiculture au GDS (Groupement de défense sanitaire) n'écarte pas la possibilité que, dans cinq ans, il n'y ait plus d'abeille à La Réunion. Un programme de prévention sanitaire, comprenant la prescription d'anti-parasitaires, a été mis en place. Mais plutôt qu'éliminer le varroa, les apiculteurs n'auront pas d'autre choix que d'apprendre à vivre avec."

Au cœur d’une exploitation à Bras-Panon, se déroule une opération un peu particulière. Munis de combinaisons blanches et grillagées au niveau du visage, ils sont plusieurs à s’affairer autour d’un rucher. Sucre, bocal, bouteille servant d’entonnoir… Et une assiette blanche où l’on découvre les parasites du varroa. Car derrière ce processus mystérieux, se cache une menace redoutable envers les abeilles. Découvert le 4 mai 2017, le varroa destructor a déjà commencé son travail de destruction. Et il est rapide. "Avec le varroa, on va de mauvaise nouvelle en mauvaise nouvelle. Il se diffuse à une vitesse folle, il est désormais présent dans le cirque de Salazie !" s’inquiète Olivier Esnault, vétérinaire épidémiologiste et spécialiste de l’apiculture au GDS (Groupement de défense sanitaire).

 

Et les taux de mortalité sont déjà constatés au sein des ruchers. S’ils sont encore bas – de l’ordre de 0 à 25 % – l’urgence est réelle : "On voit les niveaux de varroa monter. Ma plus grande crainte, c’est que dans 5 ans, il n’y ait plus d’abeilles !". Dans le cas où aucune action de lutte ne serait entreprise, une perte potentielle de 75 % des colonies est envisagée d’ici cinq ans.

- Varroa et miellée de letchis catastrophique -

Pascal Faustin, apiculteur à Sainte-Rose a découvert la contamination de ses ruches un peu par hasard. Suite à un contrôle des agents de la DAAF (Direction de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt), on lui apprend que ses abeilles sont infestées. Et c’est déjà trop tard pour lui : il en est aujourd’hui à une cinquantaine de ruches de perdues. " Pour moi, la perte de ces colonies n’est pas uniquement liée au varroa. On a également eu un gros problème climatique avec beaucoup de pluies de mai à août, ce qui est néfaste pour les abeilles " développe le professionnel. Face à une miellée de letchis "quasiment nulle", et donc un manque de nourriture, ses colonies étaient d’autant plus affaiblies et soumises au risque d’être contaminées.

 

Outre le varroa, c’est les conditions météo qui ont bouleversé le monde apicole cette année. Conséquence directe et catastrophique : la miellée de letchis. "On en est à zéro kilo de miel, aucune récole, c’est la première fois" s’alarme Camille Perrault, président de la Coopemiel de Bourbon. Faute à une absence de floraison, qui devrait également impacter le production des fruits. Et les consommateurs devront vraisemblablement mettre la main au porte-monnaie. Dans les semaines et mois à venir, il risque d’y avoir de moins en moins de miel sur les étals. Jusqu’à la prochaine miellée de baies roses.

 

Pour le moment et face au varroa, c’est la prévention qui prime. Un programme sanitaire d’élevage, permettant la prescription d’anti-parasitaires aux apiculteurs a été mis en place. Des produits bio au "conventionnel", Olivier Esnault assure qu’il y en a pour "tous les goûts". Sans que pour autant, il n’y ait de risque pour les abeilles et le miel, "quand c’est bien appliqué". Car, mauvaise nouvelle, "lorsqu’il y a trop de varroa dans une colonie, ça ne sert à rien de traiter". Autrement dit, l’apiculteur doit redoubler de vigilance pour éviter le drame. En plus du traitement, les sources alimentaires devront être diversifiées et les reines plus souvent renouvelés. L’urgence est d’autant plus importante qu’il suffit de trois ans pour que le varroa soit "au top de son niveau mortel", relate le spécialiste.

- "Il faudra apprendre à vivre avec" -

À La Réunion, 404 apiculteurs sont officiellement déclarés. Ce qui facilite l’information et la prévention. Là où la problématique se pose, c’est chez les particuliers et ceux qui ne sont pas déclarés. Car, en réalité, il y aurait environ 1 millier de détenteurs d’abeilles sur l’île. Et chaque colonie a son importance, lorsque c’est l’avenir de l’abeille péi qui est en jeu. L’abeille péi, elle est un peu à l’image de la population réunionnaise : métissée, elle possède un brassage génétique unique en son genre. Pour la préserver, l’ADA (Association pour le développement apicole) compte sur le bon comportement des professionnels et un respect des pratiques. Grâce à une aide conséquente d’urgence du Conseil Départemental, à hauteur de 300 000 euros, les apiculteurs ont pu se concentrer sur la nourriture et le traitement, les deux rayons d’actions de lutte. Une lutte qui se joue avec et non contre le varroa, car "il faudra apprendre à vivre avec".

 

Première étape : nourrir les abeilles pour compenser le manque de ressources et les renforcer avant la miellée afin de développer un maximum de butineuses. C’est ensuite le comptage et le suivi des ruches qui doit être accentué sur le long terme.

À certains endroits de Madagascar, des essaims ont complètement disparu. Ce qui fait craindre pour le futur de l’apiculture réunionnaise : "On ne peut se projeter ! Sur un territoire tel que La Réunion, qui est un confetti, il est possible que l’on n’ait plus d’abeilles dans 5 ans avec le varoa" relate Olivier Esnault. Et si l’abeille disparaît, c’est toute la production agricole du département qui pourrait être remise en cause.

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1 Commentaires
Maya
Maya
4 ans

Je vois bien que le varoa est de plus en plus actif, cela me terrifie à l'idée qu'il n'y ai plus d'abeilles car sans eux plus de vie cela me peine et que faisons nous pour elles !!