Licencié après deux accidents de travail

Un ancien facteur se bat contre la Poste

  • Publié le 7 avril 2018 à 12:48
  • Actualisé le 7 avril 2018 à 16:59

Un ancien facteur de la Poste de Saint-Louis, Frantz Dambreville, se bat contre l'institution pour retrouver "une vie normale". Après avoir été victime de deux accidents de travail à la poste de Saint-Louis et de l'Etang Salé, il a enchaîné les hospitalisations et les arrêts maladies. Reconnu travailleur handicapé, l'entreprise devait lui proposer un poste aménagé mais le salarié a été licencié. La direction de la Poste de Saint-Louis étant directement en cause, l'ancien facteur a entamé une procédure contre son ancienne entreprise. La Poste dit que la réglementation a été respectée à la lettre et que son ancien salarié a refusé "plusieurs propositions"

- Retour sur les faits -

29 décembre 2005 : alors qu’il effectue sa tournée habituelle sur Saint-Louis, Frantz Dambreville, facteur à la Rivière Saint-Louis, est victime d’un accident de la circulation. Il souffre de diverses fractures nécessitant un an d’hospitalisation. Son état de santé l’obligera à  rester 4 ans en arrêt maladie.  Suite à cela, il est contraint de se déplacer avec une canne. La médecine du travail, le médecin conseil de la sécurité sociale, le médecin traitant font la même conclusion : il lui faut un poste aménagé.

Or, la Poste ne lui propose pas d'emploi aménagé, mais un poste de distribution à vélo contraire à l’avis médical. "La pression, le besoin de travailler, l’absence d’alternative", conduisent Frantz Dambreville à accepter. Il se rappelle des douleurs et difficultés que ce travail lui ont causé.

Souffrant toujours de la jambe, il enchaîne les arrêts maladie.  Les médecins lui conseillent  d’opter pour une opération qui consiste à un blocage définitif de la cheville, l’arthrodèse. L'intervention a lieu le 4 février 2013. Après l’opération, sept mois d’hospitalisation à domicile et des séances de rééducation sont nécessaires. Frantz Dambreville se retrouve avec une invalidité à 35% lui donnant droit à une pension trimestrielle .

Le 15 février 2014, Frantz Dambreville est reconnu travailleur handicapé par la maison départementale des personnes handicapées (MDPH).  Il reprend le travail, à un poste de …manutentionnaire. Sa hierarchie ne lui laisse pas le choix. Frantz Dambreville se souvient : "ce jour là j’ai appelé ma femme, je pleurais". Il lui fait part de son stress et de la peur de perdre son travail. Le lendemain, il se retrouve seul sur ce poste où il est obligé de déplacer des cartons lourds et volumineux alors qu’il se déplace avec une canne.

Il tiendra à ce poste deux jours.

Le jour suivant, en sortant du réfectoire de la poste de Saint-Louis, la canne de Frantz Dambreville glisse dans une flaque d’eau. "Le distributeur d’eau du réfectoire étant défectueux, un seau fait office d’évacuation. Ce seau était plein" relate-t-il. Conséquences de ce second accident de travail : le salarié souffre d'un tassement de la colonne vertébrale. La médecine du travail lui assure "qu’un poste aménagé sera trouvé". En attendant, dit-il, il est contraint de rester un an en arrêt maladie.  Aucun poste aménagé n’ayant été dégagé, la médecine du travail prolonge son arrêt maladie.

- Le facteur devant la justice -

Entre temps, l’ancien facteur  rencontre un avocat qui lui conseille de porter son affaire devant le tribunal des affaires de la sécurité sociale (Tass). Un poste lui est proposé à l’Etang-Salé. Il s’agit d’un poste en cabine.

Le facteur explique "un poste en cabine, ça veut dire rester assis toute la journée et ne rien faire. Je dis bien sans rien faire. La fiche de poste ne correspond pas à la réalité". Il se rappelle de cet épisode comme d’une "mise au placard". Il plonge dans un état dépressif.

Compte tenu de son état psychologique, Frantz Dambreville a besoin d’un suivi psychiatrique. La caisse de sécurité sociale qui a refusé de se prononcer en faveur d’une rechute en ces termes : "l’état de santé de M. Dambreville de correspond pas à son état physique". Il ne peut plus bénéficier d’arrêt maladie.

Le 20 avril 2017. La médecine du travail déclare que l'ancien facteur est "inapte à tout poste dans l’entreprise et inapte au travail". Frantz Dambreville demande l'avis d’un expert du conseil des prud’hommes. Selon Frantz Dambreville cet expert le déclare "inapte au poste (en cabine) de l’Etang-Salé mais pas inapte à travailler dans l’entreprise".

Le 19 décembre 2017, le couperet tombe. Frantz Dambreville reçoit une convocation pour "un entretien préalable au licenciement pour inaptitude définitive à travailler dans l’entreprise".

Le 8 février 2018, il est reçu par une commission paritaire à Saint-Denis (composée de deux syndicalistes et de deux membres de la direction de la Poste plus le directeur de Saint-Louis). Cette entretien aboutit au licenciement de l'ancien facteur. Il réclame de pouvoir consulter son dossier. Il obtient satisfaction.

Par la suite, l'ancien facteur porte plainte contre le diredteur de la Poste de Saint-Louis pour licenciement abusif. L'affaire est toujours en cours.

- La réponse de la Poste -

Interrogée par Imaz Press Réunion, la Poste affirme "avoir suivi les procédures réglementaires avant de décider du licenciement de M. Dambreville".  Pour la Poste, l'ancien facteur a bénéficié d’un "accompagnement par la commission du retour et de maintien dans l’emploi". Elle assure "avoir fait plusieurs propositions à M. Dambreville en tenant compte son statut de travailleur handicapé à savoir des postes de 12 heures de travail hebdomadaire à moins de 30 km de chez lui".

Concernant les propositions d'emploi, la Poste assure que "plusieurs propositions ont été faites et celles-ci ont été refusées par M. Dambreville". Et de soutenir que "la médecine du travail a conclu que l’état de santé de M. Dambreville ne lui permettait pas d’être reclassé dans l’entreprise", elle assure que c’est aussi l’avis de l’expert désigné par les prud’hommes, "l’expert désigné n’a pas remis en cause l’avis de la médecine du travail".

À propos de la plainte déposée par M. Dambreville contre la direction de la Poste, cette dernière n’a pas souhaité s’exprimer "sur une procédure en cours".

En attendant la conclusion de son affaire, M. Dambreville, toujours handicapé d'une jambe, dit avoir du mal  à joindre les deux bouts. Il attend "que la justice fasse son travail".

www.ipreunion.com

 

 

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