Emploi, habitat, économie...

Annick Girardin annonce une zone franche et des contrats aidés

  • Publié le 30 novembre 2018 à 03:00
  • Actualisé le 30 novembre 2018 à 10:24

C'est une ministre visiblement fatiguée mais toujours aussi combative qui a pris le micro jeudi 29 novembre 2018 à la préfecture avec une heure de retard sur l'horaire pour sa seconde conférence de presse. Très attendue sur ses nouvelles annonces après le couac de la veille autour du sujet déjà éventé du Plan Pauvreté, la Ministre, une fois de plus, n'a pas fait de révélations fracassantes. Hormis l'annonce de 1 000 contrats aidés supplémentaires à signer d'ici la fin de l'année et de la création d''une zone franche d'activité sur toute l'île avec un taux d'imposition de 7% pour les entreprises, ses autres propositions, sur l'emploi et sur l'habitat, n'apportent rien qui n'ait déjà été testé à La Réunion et ailleurs.

Les pistes que propose la Ministre ne sont pas nouvelles : un salaire autour du SMIC avec zéro charges, ça s’est déjà vu, et  les zones franches avec dégrèvement de fiscalité et de charges sur les salaires, ça ne date pas d’hier. Et ça n’a pas forcément fait des merveilles, sinon on n’aurait pas les statistiques du chômage que l’on connait (28%).  

L'un des côtés pervers du système, c’est de tirer les salaires vers le bas car, de mémoire, le législateur n’a jamais pensé à limiter à un seuil raisonnable de niveau de diplôme ou de compétences le cadeau fait à l’employeur. Le risque est donc grand de voir des jeunes diplômés à Bac +5, Gilets Jaunes revendiqués, contraints d’accepter un salaire au SMIC parce que l’employeur ne voudrait tout de même pas se montrer ingrat en refusant le beau cadeau que lui fait l’Etat. Comment le lui reprocher, son job c'est de gérer au plus bas coût... Or le SMIC, à La Réunion où les prix sont prohibitifs, ça ne suffit pas. C'est aussi ce qui se dit sur les barrages, avec la revendication d'un SMIC DOM. Parce que dans les DOM la sur-rémunération du secteur public attise aussi le sentiment d'inégalité.

Une fiscalité à 7% pour attirer les investisseurs

En revanche, la proposition -nouvelle- d’abaisser la fiscalité des entreprises à 7%, soit deux fois moins qu’à l’île Maurice, pourtant réputée pour son savoir-faire dans le domaine, mérite d'être saluée. En toute logique, cela devrait inciter des investisseurs à venir poser leurs outils de travail sur l’île, déclarée zone franche d'activité dès le 1er janvier 2019, et à y créer des emplois. Il faudrait juste que le point évoqué plus haut ne condamne pas les dits-emplois à raser la moquette du SMIC jusqu’à la nuit des temps. Bon point aussi pour l'étirement jusqu'à 2025 de la défiscalisation industrielle.

1 000 contrats aidés de plus d'ici le 31 décembre

On ne va pas faire la fine bouche, c'est plutôt une bonne nouvelle que ces 1 000 emplois aidés (500 dans les entreprises et 500 dans le secteur associatif). D'autant que ces contrats aidés - il faut dire Parcours Emploi Compétences désormais - devront être signés, ainsi que les 900 excédentaires sur les 11 000 déjà maintenus, d’ici le 31 décembre. Grâce au passage d’Annick Girardin et de Muriel Pénicaud sur l’île, l’année va se terminer avec 1 900 personnes de plus sorties des statistiques du chômage, pas de doute, c'est Noël.

Des pistes sur l'habitat encore à définir

Quant aux autres annonces portant sur l'habitat, la ministre ne s'est pas trop mouillée. Au mieux a-t'elle évoqué le dispositif Action Coeur de Ville, déjà budgeté et en cours sur Saint Pierre, Saint André, Le Port et Saint Joseph,  les 13% insalubres du parc locatif qui devront être réhabilités, salué la décision du gouvernement déjà actée de maintenir l'APL Accession pour 350 familles à La Réunion et annoncé des dispositifs de défiscalisation qui devraient inciter des investisseurs à financer les logements étudiants qui font cruellement défaut. Hormis l'APEL Accession maintenue pour un an, rien qui n'existe aussi ailleurs -où la situation n'est pas aussi tendue et inégalitaire qu'à La Réunion. Et pas de chiffres ni de dates.

C'est mal parti...

Mais on retiendra surtout de son propos sa conclusion : "L'Etat accompagne une démarche locale". A plusieurs reprises, la Ministre a insisté sur la responsabilité des collectivités locales d'initier avec les Réunionnais les projets qui feront La Réunion de demain. Sauf qu'à l'heure où l'Etat baisse les dotations, supprime la taxe d'habitation pour 80% des contribuables pendant qu'au même moment les Gilets Jaunes réclament la fin de l'octroi de mer qui finance justement les communes, on est mal partis pour remplir le carnet de commandes...

D'autant que, pour définir les chantiers d'action, la Ministre renvoie face à face les élus locaux et les Réunionnais, et parmi eux une bonne proportion de Gilets Jaunes manifestants ou sympathisants. Or il n'a pas pu échapper à Annick Girardin que les Réunionnais n'estiment plus les élus capables de les aider à accéder à une vie meilleure.

Lire aussi => Second bilan du mouvement social sur les entreprises à La Réunion

Annick Girardin a insisté sur la nécessité de lever les barrages et de laisser la vie normale reprendre à La Réunion car les dégâts sont déjà castastrophiques pour de nombreuses entreprises. Les annonces de ce jeudi soir suffiront-elles à calmer tous les esprits ? Pas si sûr.

Pour beaucoup de Réunionnais, la question cruciale reste celle du coût de la vie devenu insupportable alors que la fiscalité s'alourdit sans cesse. Nul doute que les propositions d'Annick Girardin, ce vendredi soir, après ses rencontres avec les acteurs du secteur marchand, pèseront dans la balance.

ml/www.ipreunion.com

guest
0 Commentaires