Le 8 mars, ce jour où les femmes ont des droits (actualisé)

Mesdames, quelle chance, c'est votre journée !

  • Publié le 8 mars 2019 à 20:34

La journée internationale des droits des femmes, on le sait, c'est énormément de joie dans vos coeurs mesdames. Enfin, tous vos problèmes s'envolent. L'inégalité salariale n'existe plus, les propos sexistes, le harcèlement de rue, le harcèlement au travail, le sexisme commercial, les agressions sexuelles, viols, violences conjugales, tout cela disparaît le temps d'une journée où enfin, toutes les femmes du monde voient la vie en rose. C'est bien beau tout ça mais c'est faux. Finalement, le 8 mars, c'est cette date qui rappelle à toutes les femmes qu'elles ne sont pas l'égale de l'homme. Alors que tout ce qu'elles demandent, c'est d'être un Homme comme les autres... (photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

La routine

Le 8 mars, le monde entier célèbre la journée internationale des droits des femmes. C’est votre journée mesdames et elle peut être longue, très longue…

Le matin, vous quittez votre domicile et vous voyez toutes ces chouettes promotions pour des appareils électroménagers et de la lingerie, c’est votre journée après tout et elle commence magnifiquement bien…

Arrivée au travail, votre collègue vous offre une rose pour "votre fête", juste une rose alors qu’il gagne en moyenne 24% de plus que vous à travail égal, il aurait au moins pu prendre un bouquet…

Votre patron vous fait une blague grivoise avec sa classe habituelle " hé Ginette, t’aurais pu mettre une jupe un peu plus courte vu que c’est ta fête " suivi d’un rire bien gras, vous encaissez,  une femme sur cinq est victime de harcèlement sexuel au travail.

Fin de journée, sur le chemin pour rentrer chez vous, un gentil monsieur vous traite de "salope" en vous suivant après que vous ayez refusé de lui donner votre numéro de téléphone. Du harcèlement de rue classique, 81% des femmes l'ont déjà vécu. 

Arrivée à la maison, vous vous occupez des devoirs, du bain des enfants, tout en faisant à manger, un brin de ménage, une lessive, la vaisselle du matin… C’est épuisant et ça a un nom : la charge mentale.

Et pour finir en beauté, monsieur rentre, met les pieds sous la table et d'un coup, bam, vous recevez une bonne gifle, son steak est trop cuit, apparemment, ça ne lui a pas plu. En moyenne, 219 000 femmes seraient victimes de violences physique et/ou sexuelles commises par leur mari, concubin, pacsé, petit-ami, ancien ou actuel chaque année. 

Une accumulation de clichés ? Non, pour certaines femmes, c’est juste la routine. 


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Triste réalité

La plupart du temps, tout ne se passe pas sur une journée mais sur une semaine, un mois, une année, une vie… Et c’est une réalité. Le harcèlement de rue, 8 femmes sur 10 l’ont déjà vécu. Ça peut aller du sifflement, à l’insulte, en passant par du pelotage, des regards insistants etc... Ça arrive dans la rue, les transport en commun et trop souvent, personne ne réagit. Une mesure est entrée en vigueur en septembre dernier, bien sûr, mesdames, vous croisez régulièrement des policiers en train de dresser la fameuse amende de 90 euros aux harceleurs et autres gros lourds…

La vie au bureau

Une femme sur cinq est confrontée à une situation de harcèlement sexuel au travail au cours de sa carrière professionnelle. Près de 30% d’entre elles n’en parlent à personne. De la blague salace, aux textos, appels étranges à la main sur l’épaule, la cuisse, des actes répétés et traumatisants, c’est ça le harcèlement. Ces mots, ces gestes déplacés continuent parfois quand la victime rentre chez elle. Cela semble surréaliste, pourtant, ce sont des faits. L’environnement professionnel n’est pas un endroit sain pour une femme sur cinq.

Être une femme, c’est aussi avoir conscience qu’il y a un plafond de verre. Seulement 8% des entreprises dans le monde sont dirigées par des femmes. L’inégalité salariale est de 24% en moyenne à compétences égales. Plusieurs études démontrent que les femmes travaillent plus et sont moins payées. L'année dernière, à partir du 6 novembre à 15 h 35, les Françaises ont travaillé " gratuitement ". Merci patron !

Allons faire les courses

Pour certaines femmes, faire le tour des grandes surfaces est une torture. Il ne faut pas être sensible au sexisme commercial. Avant même d’entrer dans le magasin, un panneau en quatre par trois avec une femme à moitié nue pour une publicité de parfum, ça donne le ton. 

Dans les rayons, les aspirateurs, robots et autres appareils électroménagers avec des slogans comme " plus léger, plus puissant, ce qu’il vous faut pour une maison propre " illustré par une gentille dame qui sourit en tenant entre ses mains le dernier mixeur à la mode. Alors mesdames vous vous demandez " pourquoi mais pourquoi ils font ça ? ".

Vous continuez vos courses, passez devant le rayon lingerie où les publicitaires vous conseillent quoi prendre pour faire plaisir à votre mari. Bref, les grandes surfaces, c’est la purge.

Et il y a un rayon qui est particulièrement agaçant : celui des produits d’hygiène. Brosses à dent, rasoir, mousse à raser, dentifrice et autres accessoires adressées aux femmes sont plus chers. Un écart de prix lié seulement au marketing, deux produits similaires, l’un pour les femmes, l’autre pour les hommes, et bien parce que vous être une femme, ça va vous coûter plus cher. C’est la taxe rose. Être une femme à un coût. Vous êtes moins payées et le quotidien vous coûte plus cher mesdames, de quoi continuer à voir la vie en rose, non ?

La double peine

Chaque mois, elles reviennent et vous rendent la vie difficile : les règles, c’est jamais la joie mais savez-vous combien ça vous coûte mesdames ? La bagatelle de 23.500 euros sur une vie ! Entre les tampons, serviettes, anti-douleur, sous-vêtements neufs etc… Quand vous entendez certains sexistes dire " elle est de mauvaise humeur, elle doit avoir ses règles " en riant comme des baleines, il y a de quoi vous faire vriller…

Et ça continue encore et encore... 

Mesdames, pas de faux espoirs, les clichés ont la dent dure. L’académie française a accepté, il y a trois jours, la féminisation des titres, des noms et des métiers. Les Sages ont attendu 2019, il semblerait qu'ils n'aient remarqué l'existence de la communauté féminine que cette année.

L’industrie du jouet continue à vendre de la dinette pour les filles et des petites voitures pour les garçons. Les choses changent mais trop lentement…

L’affaire Weinstein a ouvert les yeux du grand public sur les coulisses du cinéma mais au final, qui se rappelle des noms des victimes ? À l’époque, certaines avaient été montrées du doigt, taxées d’opportunistes et accusées de chercher la célébrité. Finalement, les victimes sont les grandes oubliées de ce dossier qui porte d’ailleurs le nom de leur agresseur.

Les mouvements #MeToo et #BalanceTonPorc ont permis de libérer la parole, de nombreuses femmes ont compris qu’elles n’étaient pas les seules. Mais le rapport de force ne s’est pas pour autant inversé. Les féministes sont toujours cataloguées d’ "hystériques. " Le fait que des femmes osent parler créée un réel malaise dans notre société patriarcale. Certains hommes se sentent émasculés, les pauvres! Si seulement bobonne pouvait rester à sa place, à la cuisine.

Et parfois, on recule 

Sur certains sujets, on a même fait deux pas en arrière. L’avortement par exemple, plus de 40 ans après la mise en place de la loi Veil qui légalise l’avortement en France, ce qui était une réelle avancée à l’époque est devenu totalement problématique pour une frange assez extrémiste de la population. La marche du mouvement pro-vie avait rassemblé entre 16.000 et 50.000 personnes à Paris en janvier dernier. Des gens fort sympathiques avec de jolies pancartes où on pouvait lire "avorter est un crime." 

Un chiffre qui ne baisse toujours pas…

En France depuis le début de l’année, 27 femmes ont été tuées par leur mari, conjoint, compagnon. Une femme tous les 2-3 jours. Une situation qui ne change pas. Tout comme la manière dont certains perçoivent les victimes, la phrase " elle aurait dû partir " est encore prononcée, certains médias continuent d’utiliser le terme " crime passionnel " pour parler de féminicide.

Le regard de la société sur les femmes est toujours aussi critique. Difficile de changer les mentalités, les problèmes de fond sont toujours là. Alors c’est bien beau d’instaurer une journée des droits des femmes mais finalement, ça change quoi ?

fh/www.ipreunion.com

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