Reporters malmenés, manifestants éborgnés, policiers appelés à se suicider

Journalistes bannis des manifestations, un nouveau palier franchi

  • Publié le 24 avril 2019 à 02:59
  • Actualisé le 24 avril 2019 à 11:51

Des journalistes insultés, molestés et interpellés par les forces de l'ordre. Depuis le début du mouvement contestataire, les mobilisations des Gilets jaunes sont émaillées par des incidents qui touchent la presse. Même si, admettons le, les médias ne sont pas toujours irréprochables. La preuve, ce samedi 20 avril, Gaspard Glanz, un journaliste, fait un doigt d'honneur en direction des forces de l'ordre après avoir reçu une grenade à ses pieds. En réponse, il est placé en garde à vue 48 heures et a interdiction de couvrir les manifestations des Gilets jaunes donc de travailler. Tout ça pour un doigt d'honneur... Ce genre de dérives qui alimente une haine " anti-flics " et amène à des épisodes où des Gilets jaunes appellent les forces de l'ordre à se suicider. Ces mêmes forces de l'ordre dépassées, remontées éborgnent des manifestants. C'est l'escalade, quand cela-va-t'il s'arrêter ?

Quand des journalistes ont interdiction de faire leur métier

Museler la presse, l’empêcher de faire son travail, d’être un contre-pouvoir, c’est déjà un pas vers un État de non-droit. En cinq mois, les attaques à l’encontre de journalistes se sont multipliées. Bousculés, insultés, matraqués, frappés parfois interpellés et placés en garde à vue, leur seul tort : avoir voulu faire leur travail.

Le cas le plus récent, c’est celui de Gaspard Glanz, un doigt d’honneur et le journaliste est foutu au cachot. Pour 24 heures au départ puis un magistrat a considéré que vue l’infraction, on pouvait bien ajouter 24 heures supplémentaires. Il est accusé d’outrage envers une personne dépositaire de l’autorité. Et oui, on se le dit, faire un doigt d’honneur aux forces de l’ordre, ce n’est pas très malin mais remis dans le contexte - une grenade aurait explosé à ses pieds - ce doigt d’honneur réalisé après une belle frayeur justifie-t’il 48 heures de garde à vue ?

Ou est-ce le passif du journaliste qui dérange ? Gaspard Glanz ne fait pas l’unanimité, certes, il n’a pas la carte de presse mais cela ne l’empêche pas d’enquêter. L’un de ses sujets de prédilection, c’est la police. Gaspard Glanz est celui qui a révélé les images des policiers grimés en journalistes lors d’une manifestation, il a aussi activement participé à la révélation de l’affaire Benalla. Bref, Gaspad Glanz dérange. Et Gaspard Glanz a été placé en garde à vue pour un doigt d’honneur. Pas de raccourci mais des questions…

Si des zones d’ombre demeurent dans le cas de Gaspard Glanz, pour d’autres journalistes, la situation est très claire. Empêchés de couvrir les manifestations après que leur matériel ait été confisqué, gravement blessés après des tirs de lanceur de balle de défense alors qu’ils étaient parfaitement identifiables en tant que journaliste, matraqués, insultés, intimidés… La liste est longue, certains ont fini au poste, placés en garde à vue après une interpellation musclée, d‘autres non. Certains ont déposé plainte, d’autres non. Cinq mois éprouvants qui remettent en question la liberté d’informer et l’État de droit.

La presse, loin d'être irréprochable

Mais ne soyons pas manichéens, des dérapages, des bavures, les médias ont en aussi commis. Le plus récent, celui de Cnews qui a illustré le week-end présidentiel d’Emmanuel Macron au Touquet avec des images de l’an dernier. Une manipulation pour montrer la popularité du président ? Mais, est-ce vraiment pertinent ? Au Touquet, Jupiter est dans son fief, prise de risque zéro. Donc quelle est la finalité de cette manipulation grossière ? Un manque d’éthique, de déontologie, qui font mal à la profession quand la défiance envers les médias ne cesse de monter ces derniers mois.

Autre fait marquant, une pancarte " Macron dégage " tronquée sur un sujet de France 3. Quel est le message ? Les manifestants n’ont pas le droit de dire ce qu’ils pensent ? Ou alors le président est intouchable, impossible de le critiquer. Une auto-censure qui là encore fait du tort à la profession et donne l’impression au téléspectateur, au lecteur, à l’auditeur, à l’internaute d’être pris pour un bourricot.

Puis il y a aussi le traitement de l’information, combien d’éborgnés a-t’il fallu pour qu’enfin, le sujet soit abordé par les médias traditionnels ? Pourquoi certaines chaînes se sont entêtées durant plusieurs mois à ne montrer le mouvement des Gilets jaunes qu’à travers des images d’échauffourées, de violences urbaines, d’affrontements entre forces de l’ordre et manifestants mais rien quand tout se passait bien ? Oui, prenons notre part, certains médias ont commis des erreurs.

En représailles, des journalistes pris pour cible par des manifestants 

Ces erreurs ont entaché la profession. La population a de moins en moins confiance en la presse. Qui pourtant, essaie, tant bien que mal, d’effectuer ses missions, en premier lieu d’informer.

En plus d’être la cible des forces de l’ordre, les médias sont aussi devenus la cible de certains Gilets jaunes. Taxés d’être à la botte du pouvoir, de modifier les messages des contestataires, de mentir, de cacher des informations voire même de collusion avec le pouvoir… Les médias sont devenus la cause de tous les maux. Mais est-ce bien réaliste ? Certains médias ont failli mais jeter l’opprobre sur toute une profession, qui plus est sur cette liberté d’informer qu’exercent les journalistes à chaque fois qu’ils couvrent un sujet, c’est, comme nous l’écrivions plus haut, renier l’État de droit et le droit à l’information.

Tout comme bafouer le droit des citoyens français à manifester. Tout comme cette justice à deux vitesses, des manifestants qui passent en comparution immédiate quand des membres des forces de l’ordre auteurs ne sont pas inquiétés. Oui, il y a eu des enquêtes ouvertes mais vu le nombre d’éborgnés, combien de gendarmes, policiers croupissent en prison ?

La faute à qui ? 

La mobilisation des Gilets jaunes est inédite et casse les codes. Elle remet en cause tout un système. Mais ce ne sont pas les médias qui ont pouvoir d’arrêter cette crise. Ce ne sont pas les médias qui ont le pouvoir de décision. La liberté de la presse doit perdurer. N’empêchons pas les journalistes de faire leur travail. '

On nous vend une image d’Épinal de cette France où les droits de l’Homme, les droits fondamentaux sont respectés. Mais à partir du moment où des journalistes n’ont plus le droit de faire leur travail, que des manifestants sont éborgnés, des policiers sont appelés à se suicider, c’est l’escalade, et aujourd’hui, on peut dire une chose : on ne se reconnaît pas dans cette France.
 

fh/www.ipreunion.com

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1 Commentaires
Bravo
Bravo
4 ans

Tout est dit, votre approche redonne ses lettres de noblesse au vrai journalisme. Beaucoup de plumitifs loc