Visite d'Emmanuel Macron

(Enfin) des annonces, de l'agitation et de la colère

  • Publié le 25 octobre 2019 à 03:00
  • Actualisé le 25 octobre 2019 à 06:33

Deuxième journée de visite du président de la République Emmanuel Macron ce mercredi 24 octobre 2019 avec un détour par le quartier des Camélias avant de rencontrer à la préfecture les membres de l'Observatoire des prix, des marges et des revenus et du Conseil consultatif et citoyen. Il a ensuite remis l'insigne de grand officier de l'Ordre national du mérite à Thérèse Baillif, militante pour le droit des femmes, avant de se rendre à la mission locale de Saint-Paul pour y rencontrer des demandeurs d'emplois. Un programme dense, de l'agitation, mais au final seulement quelques annonces et beaucoup de colère. On retiendra le maintien de l'octroi de mer, la réflexion sur la création d'un panier alimentaire réunionnais, 700 millions d'euros en faveur de l'emploi et toujours de grands principes connus et archi connus. L'ensemble n'a convaincu ni l'intersyndicale qui a manifesté contre sa politique, ni les jeunes du Port et du Chaudron qui ont affronté les forces de l'ordre une bonne partie de la nuit (Photo rb/www.ipreunion.com)

• Emmanuel Macron confronté à la colère des Réunionnais

Initialement annoncé à la préfecture pour 10 heures, c’est dès 9 heures que le président de la République a entamé son déplacement d’abord par un détour par le quartier des Camélias qui a bénéficié des financements de l’Agence nationale de rénovation urbaine. Objectif de ce déplacement, aller à la rencontre des habitants de ce quartier prioritaire de la ville qui enregistre un taux de pauvreté et un taux de chômage important.

Changement de décor par rapport à la veille, du côté du monument aux morts, où Emmanuel Macron a claqué la bise et pris des selfies avec un public globalement convaincu. Cette fois, le président de la République a été confronté à la réalité du territoire et d’une population en souffrance, en colère et qui se pose de nombreuses questions sur l’emploi, le logement ou encore la vie chère. Les Réunionnais rencontré n’ont pas hésité à interpeler le chef de l’Etat, parfois vertement, critiquant son attitude, sa politique ou encore son déplacement. " Vous êtes là pour faire un one-man-show ", s’est exclamé un jeune. " Monsieur le Président, je vous regarde dans les yeux, je vous respecte, mais vous ne nous amenez pas grand-chose ", lui a lancé un autre habitant du quartier.

Même son de cloche dans la rue où défilaient près de 300 personnes à l’appel de l’intersyndicale. Un défilé émaillé de quelques tensions avec les forces de l’ordre qui avaient comme consigne d’interdire la descente du défilé vers la préfecture mais surtout d’un couac entre l’intersyndicale et les services de la présidence de la République. Un rendez-vous entre le chef de l’Etat et une délégation de gréviste ayant dans un premier temps été fixé avant d’être annulé. Le passage d'Emmanuel Macron à La Réunion est catastrophique" s'exclame Ivan Hoareau, porte-paroloe de l'intersyndicale. "La population a bien compris qu'Emmanuel Macron ne veut pas parler aux Réunionnais " ajoute-t-il.

Du côté du Port, une autre forme de manifestation avec des jeunes qui ont perturbé la circulation au niveau du rond point de Sacré Cœur une grande partie de la journée. La tension y est montée crescendo tout au long de l’après-midi pour atteindre son paroxysme en fin de journée avec des feux de poubelles et un incendie dans une concession automobile. Même ambiance au Chaudron où des feux de poubelles ont été signalés. Des manifestants ont même caillass" un fast-food alors que des clients et le personnel se trouvaient à l'intérieur.

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• Vie chère : de l’espoir au scepticisme

Le président de la République s’est ensuite rendu à la préfecture pour rencontrer les représentants de l’Observatoire des prix, des marges et des revenus ainsi que du Conseil consultatif et citoyen. C’était un rendez-vous très attendu par La Réunion et les Réunionnais au sujet de la vie chère, du prix des billets d’avion ou encore de la question de la concurrence avec en filigrane le rachat de Vindemia par le groupe Hayot.

Au bout d’une heure trente de séance de questions-réponses, le président de la République n’a jamais semblé d’apporter de réponses claires aux interrogations des personnes présentes, sur la vie chère, la continuité territoriale, la formation la défiscalisation, la construction de logements, l’emploi ou encore  la mobilité.

Pour les annonces, on notera la création d’une plateforme d’alerte afin que les citoyens puissent dénoncer des anomalies sur les prix ou la concurrence, le maintien de l’octroi de mer, le lancement d’une réflexion sur la création d’un panier alimentaire réunionnais avec des produits locaux, accessible aux populations les plus défavorisés qui pourraient bénéficier d’un chèque alimentaire.

Concernant le prix des billets d’avion : " on paye le dysfonctionnement du marché aérien ", a-t-il déclaré, soulignant qu’il fallait développer l’offre de marché aérien, et donc la concurrence, pour faire baisser les prix. Il a néanmoins exprimé une volonté d’encadrer les prix pour empêcher les abus, la nécessité de revoir la subvention d’équilibre, et de réfléchir à une aide en faveur de certains publics tout en excluant la mise en place d’un " chèque avion " qui seraient en quelque sorte " donner de l’argent aux grandes compagnies ". Didier Robert et son dispositif de continuité territoriale apprécieront...

Pour le reste, Emmanuel Macron s’est contenté d’évoquer quelques grands principes connus et archi connus : pour faire baisser les prix, il faut de la concurrence, a-t-il martelé. Pour le comment ? On repassera. Concernant le prix des carburants, " le système marche. Il ne faut pas le casser ", a-t-il répondu. Sur la question des déplacements, il s’est dit en favorable aux projets de développement d’une mobilité collective propre sans pour autant évoquer les projets réunionnais.

A l’issue de la réunion, l’espoir a laissé place au scepticisme. " Il n’y pas d’annonces vraiment concrètes. Le président nous a dit qu’il faut du temps ", s’est exprimé un membre de l’observatoire visiblement déçu. " Les gens ont besoin de manger maintenant, tous les jours, pas dans 6 mois ", a soufflé un autre participant.

• Emploi : enfin des annonces !

C’est finalement sur la séquence consacrée à l’emploi que le président de la République a été le plus prolixe en termes d’annonces. A l’issue de sa rencontre avec des demandeurs d’emploi et des porteurs de projets à la mission locale de Saint-Paul, Emmanuel Macron a annoncé le lancement d’un plan " pétrel " pour l’emploi d’un montant de 700 millions d’euros pour trois ans et qui comprend 20 actions.

Parmi les mesures phares annoncées, il a confirmé l’annonce faite à l’aéroport d’une exonération de charges patronales pour les salariés en dessous de 2 SMIC dans plusieurs secteurs : l’industrie, l’agro alimentaire, le tourisme, les métiers de plaisance et de la pêche, ainsi que la presse. Il a par ailleurs annoncé la stabilisation du niveau des emplois PEC (Parcours Emploi Compétence) à 12 000 par an de 2019 à 2022.

Sur le volet formation, il a annoncé le déblocage de 253 millions d’euros pour la formation qualifiante de 66 000 demandeurs d’emploi sur 4 ans. Il a par ailleurs annoncé la création de 200 emplois de coopération et de développement dans les pays de la zone afin de permettre à des Réunionnais de bénéficier d’une expérience de mobilité.

L’autre mesure emblématique est l’extension des emplois francs à tout le territoire réunionnais. Le dispositif dénommé " Emploi Réunion " permettra à une entreprise d’embaucher une personne éloignée de l’emploi (quartier prioritaire de la ville, RSMAR, bénéficiaire de la garantie jeune…). Ce dispositif prévoit une exonération des charges jusqu’à 2 SMIC ainsi qu’une prime pour l’employeur, à hauteur de 15 000 euros pour un CDI, et 7 500 euros pour un CDD.

Enfin, Emmanuel Macron a confirmé la recentralisation par l’Etat du RSA (jusqu’à maintenant payé par le Département), à compter de 2020, ce qui devrait permettre au Conseil départemental de mener " une politique de transformation " avec notamment la possibilité de cumuler le RSA avec des activités saisonnières ou à temps partiel " sur un montant et une durée qui seront définis ", a-t-il précisé.

Lire aussi : Emmanuel Macron annoncent 12 000 PEC par an, 700 millions d'euros investis dans l'emploi d'ici 2022

Dans un entretien donné aux journaux télévisés locaux, Emmanuel Macron s’est par ailleurs engagé à permettre l’acheminement des letchis de La Réunion vers la Métropole en référence aux nouvelles règlementations annoncées en matière d’envoi de colis vers l’Europe. Il a également évoqué la question de la crise requin, partageant son souhait que des solutions soient trouvées d’ici 2022 afin que le risque soit levé et ainsi reconquérir cet espace, sans pour autant annoncer de mesure précise.

La visite d’Emmanuel Macron se terminera ce vendredi par une séquence agricole et un pique nique à Grand Anse. La question de l’agriculture réunionnaise a été au cœur des évocations du chef de l’Etat tout au long de sa visite.

Nous pouvons donc nous attendre à des "annonce fortes" selon une expression que semble aimer le Chef de l'Etat...

www.ipreunion.com

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2 Commentaires
Tristan
Tristan
4 ans

Des cadeaux aux patrons des cadeaux aux patrons des cadeaux aux patrons. Des emplois subventionnés en immense partie, 7000 pour cdd 6 mois ? Qui va embaucher en cdd de plus de 5 mois ? 15000 pour cdi ? Qui est le fou qui va embaucher en cdi avec ça ? 12000 emplois aides ? Il répare ce qu'il a detruit y a 2 ans ? Que de temps perdu ! C'était du vent ! Rien sur les prix, à part sa plate-forme, la haute autorité a la concurrence ? Ils font quoi ces gens là depuis tant d'années sur les monopoles reunionnais ? Ils vont se bouger en novembre ? Ils découvrent la situation ?

Papillon diurne
Papillon diurne
4 ans

La France, ce qui l'intéresse c'est uniquement notre position géopolitique et stratégique dans cette partie du globe, surtout depuis l'accession à l'indépendance de la Grande Île.Si elle voulait nous transformer en petit Monaco ou Saint-Martin, ou bien comme Marne-la-Coquette, cela ferait longtemps qu'on l'aurait su.