Il regroupe 18 000 salariés à La Réunion

Le BTP fait sa rentrée : les enjeux pour 2020 d'un secteur fragile

  • Publié le 20 janvier 2020 à 02:59
  • Actualisé le 20 janvier 2020 à 11:12

Ce lundi 20 janvier 2020 marque la rentrée du BTP. Un secteur d'activité fragilisé ces dernières années, syndicats patronal et salarié tirent la sonnette d'alarme : commande publique en berne, grands chantiers trop rares et logements qui peinent à sortir de terre sont autant de raisons de s'inquiéter pour l'avenir de la filière. Le Plan logement outre-mer sera l'un des temps forts de cette rentrée, mais après le bilan en demi-teinte du précédent, il en faudra sans doute plus pour que le secteur connaisse l'embellie tant attendue. (photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

C’est la reprise pour les professionnels du BTP (Bâtiment et Travaux Publics) après quatre semaines de vacances. Quels sont les grands enjeux pour cette année 2020 dans ce secteur qui emploie environ 18 000 personnes et maintient son chiffre d’affaire global à 1 milliard 200 millions d’euros depuis sept ans. La crainte ? Le recul. L’ambition : redynamiser le secteur pour revenir à des niveaux d'emplois d'avant crise.

Un bilan 2019 négatif

Anthony Lebon a succédé à Bernard Siriex à la tête de la Fédération réunionnaise du bâtiment et des travaux publics (FRBTP) en juin dernier. Le nouveau président du syndicat patronal est assez optimiste pour l’année à venir "l’objectif pour nous, c’est d’affermir les combats menés en 2019" même s’il admet que le bilan de 2019 est à nuancer "nous avons réussi à maintenir notre chiffre d’affaire global, la part de la commande publique a un peu augmenté notamment grâce au chantier de la Nouvelle route du littoral mais la part du bâtiment a nettement baissé passant de 71% à 56%, une année aussi marquée par la suppression de l’APL Accession, on a eu du mal à sortir du logement, c’est ce qui traduit l’échec du Plan logement outre-mer."

Malgré ce bilan négatif, le patron de la Frbtp est confiant pour les mois à venir "2019 était une année de transition, nous souhaitons conforter les actions menées. Le rétablissement de l’APL Accession , par exemple, c’est l’issue d’un combat âpre. Nous avons également réussi à redirigé les crédits non consommés de la ligne budgétaire unique (Lbu). Chaque année, entre 25 et 30 millions d’euros ne sont pas utilisés. Après discussion avec le ministère des Outre-mer, nous sommes arrivés à une petite victoire : 8 millions d’euros seront redirigés vers les radiers."

L'espoir : le Plan logement Outre-mer 2019 - 2022

La prochaine échéance pour Anthony Lebon, c’est le Plan logement outre-mer (PLOM). "Le Plan logement Outre-mer 2019-2022 vise à répondre aux besoins spécifiques des Outre-mer (libérer et aménager du foncier, construire des logements neufs, réhabiliter le parc existant, lutter contre l’habitat indigne ou encore engager la transition énergétique dans le secteur du bâtiment) grâce à 77 mesures concrètes à mettre en œuvre d’ici 2022." peut-on lire sur le site du ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales.

Mais à La Réunion, malgré la très forte demande en matière de logement - on recense en effet près de 28 000 demandes de logement social en attente - les objectifs pour y répondre sont loin d’être tenus. La Réunion a besoin de près de 8000 logements par an pour répondre à la demande et à la croissance démographique du territoire, selon les dernières données INSEE, 6760 logements ont été autorisés à la construction entre octobre 2018 et septembre 2019. Et concrètement, ce serait seulement 5000 logements qui seraient sorti de terre.

Par ailleurs, interpellée à l’Assemblée sur la question des crédits alloués au logement, Annick Girardin, la ministre des Outre-mer a affirmé qu’il y avait un réel problème de "sous-consommation" des budgets dans les territoires ultramarins. Si ce n’est pas une question financière, où est-ce que le bât blesse ?

Anthony Lebon planche sur le nouveau Plom, il assure que plusieurs éléments pourraient changer la donne "nous travaillons sur des déclinaisons de mesures plus concrètes, les budgets sont plus importants, - un milliard d’euros supplémentaire a été alloué aux Outre-mer  -, et les études de viabilisation et de faisabilité vont être intégrées au Plom, et actuellement, tous les acteurs de la filière travaillent d concert sur le projet, nous ne sommes plus sur une gestion unilatérale comme par le passé."

L'échec du précédent Plom fait craindre pour le suivant

Érick Fontaine, l’administrateur de la Confédération nationale du logement (Cnl) est beaucoup moins enthousiaste "si on mise l’avenir de la filière sur le Plom, il n’y a pas de quoi se réjouir" souffle-t-il. Car le défenseur des locataires pense que le problème n’est pas pris par le bon bout "il ne fait aucun doute qu’il faut construire de nouveaux logements mais avant, il faut régler le problème des logements vétustes, indécents qui entrainent des problèmes de santé et de sécurité. Ces bidonvilles modernes sont légion, on est dans une fuite en avant, dans une décennie, on se retrouvera dans une situation catastrophique."

Par ailleurs, Érick Fontaine se pose des questions sur tous les dossiers bloqués. "De nombreux dossiers sont validés mais ne sortent jamais de terre, j’aimerais bien que l’on m’explique pourquoi. Qu’est-ce qui coince ? Pendant ce temps là, ce sont des crédits qui sont bloqués, du foncier…  tout cela empêche la mise en oeuvre d’autres  projets qui, eux, sont viables. Il faut identifier les problèmes."

Mauvaise gestion ? Négligence ? Manque de contrôle ? Toujours est il que chaque année, des milliers de chantiers validés par les services de l’État ne voient jamais le jour. D’où le pessimisme affiché par Érick Fontaine "le premier Plom n’a rien donné, je ne vois pas pourquoi cela changerait avec celui-ci."

L’administrateur de la Cnl rappelle qu’une fois les grandes lignes de ce Plan logement outre-mer tracées, les premiers logements ne sortiront que dans cinq ans, pas de quoi rassurer le secteur du BTP sur une brève échéance…

fh / www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

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