Grève contre la réforme des retraites

Grosse mobilisation et occasion manquée pour la convergence des luttes

  • Publié le 6 décembre 2019 à 05:48
  • Actualisé le 6 décembre 2019 à 06:56

Importante mobilisation ce jeudi 5 décembre 2019 contre la réforme des retraites actuellement en cours d'élaboration par le gouvernement. Ils étaient près de 3000 selon la préfecture (5000 selon les syndicats) dans la rue pour dire "non" à cette réforme. Une mobilisation rarement vue ces dernières années, qui aura réussi à unir syndicats et gilets jaunes autour d'intérêts communs. Mais pas suffisamment longtemps pour que les deux parties puissent réellement parler d'une même voix et agir ensemble... Une véritable occasion manquée pour la convergence des luttes.

Les Réunionnais se mobilisent fortement contre la réforme des retraites

Comme prévu, les Réunionnais ont répondu à l’appel à la grève de l’intersyndicale afin de dire "non" à la réforme des retraites.  Dans le nord, ils étaient 3 000 selon la préfecture (5000 selon les syndicats). Dans le sud, ils étaient 800 dans la rue selon la préfecture (1 000 selon les syndicats). Selon le Rectorat, 51% du corps enseignant de l’Académie s’étaient déclarés grévistes.

Si on est loin du mouvement COSPAR qui avait réussi à rassembler plus de 20 000 personnes dans la rue en 2009, rarement La Réunion aura connu une telle mobilisation ces dernières années. C’est donc un pari réussi pour les syndicats qui avaient lancé cet appel. Une réussite partagée avec les gilets jaunes qui avaient eux aussi rejoint le mouvement même s’il est difficile d’évaluer leur représentativité parmi les grévistes.

Une chose est certaine, à l’image du mouvement national, La Réunion aura pleinement pris part à ce mouvement de colère contre la réforme des retraites.

Quand syndicats et gilets jaunes se retrouvent vraiment

Ce n'est pas la première fois que syndicat et gilets jaunes unissent leur voix et défilent dans le même cortège, la dernière fois, c'était pour la traditionnelle maifestation du 1er mai. Mais les mouvements n'avaient jamais été aussi proches et soudés... du moins au départ. Cette harmonie n’avait pas pu être observée il y a un an, au début du mouvement des gilets jaunes, malgré la volonté des syndicats de se joindre à la lutte. En effet, en 2018, les gilets jaunes s’étaient opposés à toute récupération, tant des politiques que des syndicats. Ces derniers avaient donc été priés de ne pas venir sur les barrages.

Un an après, les deux parties ont donc réussi à se retrouver ensemble dans la rue, confirmant ainsi que le mouvement des gilets jaunes a su évoluer et s’ouvrir, comme c’est aussi le cas dans la sphère politique.

Il faut dire que la thématique avait de quoi rassembler, la réforme des retraites actuellement en cours d’élaboration est un sujet explosif avec deux mesures emblématiques que sont le possible recul de l’âge légal de départ à la retraite et la remise en cause des régimes spéciaux, notamment celui des fonctionnaires, corps de métier qui représente un tiers des emplois à La Réunion.

On pourrait donc penser que ce premier rassemblement unitaire pourrait en amener d’autres. Syndicats et gilets jaunes se retrouvent sur de nombreux sujets tels que la réforme du chômage, la cherté de la vie ou encore le pouvoir d’achat des Réunionnais, thématiques sur lesquelles ils pourraient trouver une véritable convergence de luttes.

L’union de façade vole en éclats

Si toutes les conditions semblaient réunies pour un mouvement unitaire, les tensions ont rapidement fait surface entre gilets jaunes et syndicats.

D’un côté les syndicats, par la voix d’Ivan Hoarau, secrétaire général de la CGTR, ont dégainé pour reprocher aux gilets jaunes d’avoir organisé des opérations escargot. Ce qui, selon le représentant syndical, aurait, de fait, était contre-productif et démobilisé certains grévistes qui voulaient se rendre sur le chef-lieu pour manifester.

Ce à quoi ont rétorqué les gilets jaunes en indiquant que les opérations escargot avaient été communiquées dès la veille, ce mercredi 4 décembre. Alors qu’ils avaient annoncé qu’ils ne bloqueraient qu’une voie de circulation, les opérations escargot de ce jeudi ont en réalité bloqué les deux voies, provoquant d’importants ralentissements sur les routes. S’ajoute à cela le barrage filtrant érigé tôt ce jeudi matin du côté de Saint-André et qui a très certainement permis aux gilets jaunes de se rappeler aux bons souvenirs des Réunionnais.

Conséquence, l’union de façade a rapidement volé en éclats. Les syndicats ont refusé de donner la parole aux gilets jaunes qui n’ont pas manqué de faire part de leur mécontentement. L’unité affichée s’est rapidement transformée en face à face tendu entre les syndicats et les gilets jaunes, reléguant au second plan la question de la réforme des retraites. Une division qui revêt tout un symbole alors que les manifestants se trouvaient devant la préfecture, centre de décision de l’Etat à La Réunion.

Vers une nouvelle mobilisation populaire ?

Dès l’annonce de cette grève, le spectre des gilets jaunes a rapidement resurgit. Pour preuve, les stations services de l’île ont été prises d’assaut, alors que rien ne laissait présager une pénurie. La population réunionnaise semble en effet craindre une reprise d’un mouvement populaire d’ampleur, un an après celui qui avait paralysé l’île pendant près de 15 jours.

Dès la fin de cette première journée de grève, les membres des gilets jaunes ont appelé à reconduire la mobilisation ce vendredi 6 décembre. Les syndicats quant à eux attendent de connaître l’issue des discussions entre les syndicats nationaux et le gouvernement, ce vendredi, pour réfléchir à la suite à donner à ce mouvement même s'ils ont annoncé être favorables à une reconduction de la grève sans avoir déterminé les actions à venir.

www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

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3 Commentaires
Éric
Éric
4 ans

Ce n'est pas un combat GJ /syndicats c'est une histoire d'égo de la par de Mr yvan Hoareau, les syndicats de la réunion sont en perte de reconnaissance et ils veulent que les GJ (le peuple) leur redonne de la crédibilité mais sans rien lâcher au retour

Le Sudiste
Le Sudiste
4 ans

Et oui difficile de faire converger les luttes quand les principaux grévistes sont des fonctionnaires (donc incluant des personnes bénéficiant de la surrémunération et d'autres issus de métropole) et que les gilets jaunes réunionnais, sont plutÃ't du type "la Réunion aux Réunionnais" pour reprendre la sémantique d'un parti national.

titan, depuis son mobile
titan, depuis son mobile
4 ans

On aurait déjà gagné si les GJ parlaient d'une seule voix avec force de proposition.Malheureusement on voit des actions contre les travailleurs pour Macron et D.Robert.