A La Réunion les syndicats parlent d'une loi "loin de la réalité du terrain"

Le portable à l'école et au collège c'est fini pour les élèves

  • Publié le 8 juin 2018 à 02:59
  • Actualisé le 8 juin 2018 à 12:14

Ce jeudi 7 juin 2018, l'Assemblée Nationale a voté la proposition de loi du groupe La République en marche qui interdit les téléphones portables dans les écoles et collèges. Cette loi contient aussi un amendement étendant l'interdiction aux enseignants et plus largement à tout le personnel de l'éducation. A La Réunion cette loi est jugée "éloignée de la réalité du terrain" et l'amendement est qualifié "d'aberration" par les syndicats de l'éducation. Ils s'interrogent sur les difficultés à mettre en oeuvre une telle interdiction.

Le texte, adopté à main levée en première lecture, a obtenu les voix des élus de la majorité LREM et MoDem, ainsi que de l'UDI-Agir. Tous les autres groupes ont dénoncé une proposition "inutile" voire une "tartufferie" (LR), qui revient à une "simple opération de communication", plusieurs d'entre eux optant néanmoins pour l'abstention à l'instar des socialistes et Insoumis.

La loi entend interdire l'usage de tout objet connecté dans les écoles maternelles, élémentaires et les collèges, "sauf pour des usages pédagogiques", à l'exception des lieux où "le règlement intérieur l'autorise expressément".

Le code de l'éducation interdit déjà, depuis la loi du 12 juillet 2010, les portables "durant toute activité d'enseignement et dans les lieux prévus par le règlement intérieur". Mais en réponse aux critiques de l'opposition sur le caractère "superfétatoire" du texte, le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer a défendu le besoin "d'une base juridique beaucoup plus solide", assurant que ce n'est "pas une loi pour les apparences".

Les élus du groupe majoritaire, qui avaient envisagé d'étendre l'interdiction du portable aux personnels et enseignants, ont fait machine arrière. Le ministre a jugé que ce ne serait "pas opportun", notamment pour éviter des "effets pervers" en termes de sécurité.

Interrogés au moment où le projet de loi était débattu à l'Assemblée, les syndicats éducation FO et CGTR Educ'Action ont dénoncé ce qu'ils ont qualifié de "quasiment identique à ce qui existe déjà".

- Une loi "rien de nouveau" -

FO Education considère "inutile de faire voter une loi effective". "C'est-à-dire que l'ancienne loi ne l'était pas ?" interroge le syndicat.
En effet, le code de l'éducation interdit déjà, depuis la loi du 12 juillet 2010, les portables "durant toute activité d'enseignement et dans les lieux prévus par le règlement intérieur". Mais en réponse aux critiques de l'opposition sur le caractère "superfétatoire" du texte, le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer a défendu le besoin "d'une base juridique beaucoup plus solide", assurant que ce n'est "pas une loi pour les apparences".

Pour Jean Lou Valon, principal du collège de la Pointe des Châteaux à Saint-Leu "le réglement intérieur du collège tient déjà en compte le code de l'éducation". Il explique "quand je suis arrivé en 2012, il a fallu gérer 400 téléphones portables avec tous les risques qui y sont liés : vols, élèves qui regardent des sites interdits ou qui filment leurs camarades". Le principal de collège a dû trouver un compromis en concertation avec le comité des parents car "c'était ingérable".  Les portables devaient être "invisibles et silencieux". Si un adulte entendait ou voyait un téléphone, "il était immédiatement confisqué et les parents de l'élève était convoqué pour être sensibilisés". détaille Jean Lou Valon.

Un amendement LREM, similaire à un amendement UDI-Agir, a été adopté pour faire inscrire dans la loi la possibilité pour le personnel enseignant de confisquer les portables. D'après les propos du principal du collège de la Point des Châteaux, "c'est ce que font déjà certains chefs d'établissement". Mais le ministre a jugé important de donner une base juridique "robuste pour la confiscation", LR jugeant à nouveau la mesure "inutile", puisque déjà possible.

-L'abandon de l'amendement rassure -

Le projet de loi prévoyait un amendement pour étendre l'interdiction des portables à tout le personnel des établissements.

"C’est comme si on mettait les enseignants et le personnel de l’éducation sur le même plan que les élèves" s’exclame Patrick Corré de la CGTR Educ'action. Pour lui, les professeurs "montrent déjà l’exemple". Marie-Laure Adam de la Fédération de l'enseignement  trouvait "incroyable que l'on puisse interdire le portable au personnel, car il peut sauver des vies".

Les élus du groupe majoritaire, qui avaient envisagé d'étendre l'interdiction du portable aux personnels et enseignants, ont fait machine arrière. Le ministre a jugé que ce ne serait "pas opportun", notamment pour éviter des "effets pervers" en termes de sécurité.

"Nous sommes un peu rassurés que notre ministre ait refusé l'amendement interdisant le portable aux adultes" déclare le syndicat FO Education. Le ministre a mentionné la nécessité de devoir faire une distinction entre les règles qui s'appliquent aux élèves et celles qui s'appliquent aux adultes.

-Une loi difficile à appliquer -

Le principal du collège de la Pointe des Châteaux revient sur son expérience "la gestion des portables prenait trop d'ampleur". C'est la raison pour laquelle l'établissement avait opté pour la mesure "portable invisible et inaudible". Mais ce compromis n'a pas résolu le porblème pour autant. "Je me retrouve quand même à gérer 50 téléphones portables confisqués, ils sont enfermés dans un coffre dans une armoire à clé", Jean-Lou Valon. Le chef d'établissement qui se dit "totalement contre les portables" déplore "qu'il n'ya pas de solutions apportées pour la gestion des portables". Il s'interroge "les élèves auront-ils des casiers ? Qui donnera ces casiers ? Qui les payera ? Est-ce que ce sera comme aux USA où les élèves ont un casier individuel avec une clé ?". Pour le chef d'établissement, "il y a toute une organisation à mettre en place".

Pour Marie-Laure Adam, "tout cela n'apporte rien de plus, c'est beaucoup de travail pour pas grand chose, le ministre devrait s'intéresser à d'autres questions plus urgentes". Pour Patrick Corré de la CGTR Educ'action " les chefs d'établissement vont encore devoir se transformer en policier".

Qu'il s'agisses des syndicats ou des chefs d'établissement, tous, parlent d'une loi "difficile à appliquer et éloignée de la réalité du terrain".

www.ipreunion.com avec l'AFP

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1 Commentaires
GERARD97460
GERARD97460
5 ans

C'est une sage décision qui aurait du être prise depuis longtemps déjà, on a pas besoin de téléphone à l'école pour s'instruire.. Je pense qu'il y a un peu trop de liberté à l'école aujourd'hui, il faut retourner comme au bon vieux temps, interdire les téléphones dans la cour de l'école sous peine d'être saisi et ainsi être remis aux parents..