Top départ ce 15 septembre

Télémédecine : Sécurité sociale et mutuelles la prennent enfin en charge

  • Publié le 15 septembre 2018 à 12:59

À partir du 15 septembre, il ne sera presque plus besoin de se déplacer chez son toubib. Désormais, les médecins traitants, généralistes ou spécialistes, pourront donner des avis médicaux médicaux à distance par visioconférence et renouveler des traitements. L'assurance-maladie prendra en charge ces visio-consultations au même tarif que les consultations en face à face. Projet figurant dans une loi de 2009, la télémédecine devient donc réalité près de dix ans après la loi. Mais La Réunion figure parmi les territoires précurseurs, avec une première approche utilisée à Mafate dès 2004. Seul hic... encore peu de médecins sont équipés du matériel nécessaire.

L’argument pour développer la télémédecine, c’était le gain de temps pour tous et la difficulté d’accès aux soins pour les patients dans les territoires isolés. A La Réunion, entre les embouteillages, la route du Littoral fermée et les hameaux isolés dans les Hauts, la télémédecine s’imposerait presque d’office. La télémédecine aurait aussi pour mission aussi de réduire le délai moyen d’attente pour obtenir un rendez-vous, qui, à La Réunion, peut aller de deux mois pour un gynécologue, un dermatologue ou un cardiologue à cinq mois pour un ophtalmologue (Sources Ifop), et cela bien que le territoire soit plutôt bien loti en professionnels de santé. L’avantage certain, c’est de réduire le temps de trajet pour le patient... et les risques de contamination dans la salle d’attente.

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WhatsApp ou FaceTime

Pour bénéficier d'une téléconsultation, le patient devra disposer d’un smartphone et d’un logiciel type WhappsApp ou FaceTime. Ce peut être un ordinateur aussi, avec Skype. Tous les avis médicaux qui ne nécessitent pas de toucher le patient pourront être effectués ainsi. Mais le médecin, du moins celui qui est déjà équipé, ne pourra pas pour autant imposer à son patient, pour l’instant du moins, la téléconsultation.

Le consentement du patient est obligatoire, de même que le contact visuel. En effet, la télémédecine ne se limite pas à une consultation téléphonique. Patient et médecin doivent communiquer les yeux dans les yeux et le médecin doit pouvoir observer son patient, visualiser une zone douloureuse ou une plaie.

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Le médecin traitant au coeur du dispositif

"La télémédecine ne remet pas en cause le médecin référent,  bien au contraire, elle conforte son rôle, puis que dans les premières négociations avec les syndicats, la sécurité sociale avait posé comme principe que la téléconsultation ne devait concerner que les patients que leur médecin avait reçus en consultation au moins une fois dans l’année", précise le Dr Claude Bronner, président d'Union généraliste, un syndicat de médecins réputé pour sa non-dépendance aux lobbys et à l'industrie. Exception faite cependant pour les déserts médicaux où les patients n’ont plus de médecin traitant : ils pourront s'adresser en télémédecine à un médecin qu'ils ne connaissent pas.

Le Dr Bronner était de passage à La Réunion début septembre, pour présenter aux médecins libéraux un système de communication crypté, qui permet de communiquer des données de santé, sans stockage sur le Cloud. "Quand vous envoyez avec ce système Télémédica une prescription à un pharmacien pour un patient, ou des données de santé d'un patient à un médecin spécialiste, les données ne restent que quelques secondes sur le réseau", explique le Dr Philippe de Chazournes, généraliste et très impliqué dans l'association de formation continue pour médecins, A2FM.

C'est dans le cadre de la formation continue proposée par A2FM que le Dr Bronner est venu rencontrer une cinquantaine de médecins libéraux à Saint-Denis et à Saint-Leu. "Beaucoup sont encore réticents, reconnait le Dr Claude Bronner, mais on n'a pas le choix, le numérique, le dématérialisé va devenir la norme. Dans quelques années, plus personne ne comprendra pourquoi on a soumis des patients au risque de contagion dans une salle d'attente, tellement la télémédecine, dans ces cas-là, paraîtra un recours évident."

Le recours au spécialiste simplifié

Autre intérêt de la télémédecine, la mise en réseau pour une consultation à deux voix d’un médecin généraliste (ayant son patient dans son cabinet) avec un médecin spécialiste. Encore une fois, cela facilite le parcours de soin. Exit l’obligation de prendre deux rendez-vous, avec le risque que la consultation du spécialiste se fasse très en aval de celle du médecin traitant. Mais cette facilité de recours à l'expertise spécialiste n'interviendra qu'à partir de février. "Pour des honoraires de 15 euros", s'indigne poliment le Dr de Chazournes qui estime qu'avec cette tarification l'expertise spécialisée est totalement dévaluée. Si l'on compare avec celle d'un artisan venu pour des menus travaux ou celle du garagiste, on ne saurait dire mieux. 

Autre solution encore, la téléconsultation avec le médecin, avec le concours d’un professionnel de santé (infirmier, sage-femme, pharmacien) pour l’utilisation d’outils d’examen (stéthoscope, otoscope, dermatoscope, ECG, échographe...), ce qui nécessite l'investissement d'une cabine de télémédecine.

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Le paiement par feuille de soins électronique

Dès ce 15 septembre, les téléconsultations seront remboursées par l’assurance-maladie partout en France pour les quelques centaines de médecins déjà connectés.  Selon l’accord conclu entre les syndicaux médicaux et la Sécurité sociale, une téléconsultation à La Réunion (+20% par rapport à la métropole) par un généraliste pour un adulte sera facturée 29,60 € et 34,60 € pour un enfant, soit la même somme que pour une consultation classique. Un spécialiste demandera pour une consultation avec retour au médecin traitant 34,60 €, comme dans un cabinet classique.

En cas de consultation par un médecin généraliste hors secteur géographique avec retour au médecin traitant, la consultation coûtera 34,60 €, et 39,60 € pour un enfant. La téléconsultation chez son généraliste avec obtention de rendez-vous urgent de spécialiste dans les 48h sera facturée 34,60 €.

La cotation des actes s’applique de manière identique à la consultation traditionnelle. Avec tiers payant obligatoire pour les CMU, ACS, Accidents du travail, Maternité, Affections de longue durée ou urgences..

Lorsque le patient n’est pas pris en charge à 100% et que le paiement du ticket modérateur par la mutuelle est complexe pour le médecin, ou en cas de dépassement d’honoraires, le médecin doit alors disposer d'un système de paiement type Paypal ou par carte bancaire. Pas plus compliqué qu'un achat sur internet pour le patient.

Dès le 15 septembre, vous pourrez donc dire "Allô docteur...", sans avoir l'impression de le déranger. De toute façon, rien ne change sur le fond : il faudra toujours prendre rendez-vous...

ml/www.ipreunion.com

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2 Commentaires
Dr Alain DUPORT , depuis son mobile
Dr Alain DUPORT , depuis son mobile
5 ans

Ces nouvelles mesures appellent beaucoup de questions :
Quand mes patients vont-ils m’appeler? Pendant mes consultations? Impossible! Je suis surbooké!
Sur un nouveau créneau? Impossible! J’ai 62 ans, je veux travailler longtemps encore et travaille déjà plus que jeunes associées et ne créerait pas de temps supplémentaire!
Chez moi, pas possible! Pas de CPS ( on en a une seule et elle est au cabinet dans mon lecteur de carte ) ...
Donc, pipeau!
Et vous ne le savez pas, mais je suis un des référents de l’informatique medicale à la Réunion!
Encore un Machin imaginé par nos technocrates qui ont tué notre médecine libérale et qui continuent ...
Le pire, c’est qu’ils sont satisfaits!!!!

Bruno Bourgeon
Bruno Bourgeon
5 ans

Rien de mieux pourmultiplier les erreurs médicales et les errances des patients que la télé médecine mal appliquée. On abaissera encore plus le niveau de la médecine, déjà bien bas ces dernières années. Je ne connais non plus rien de mieux pour soulager l’angoisse du patient que le toucher, l’examen clinique, le dialogue singulier. Tout cela n’est guère rassurant.