Des victimes confinées avec leur bourreau

Violences intrafamiliales : la baisse des signalements inquiète les autorités

  • Publié le 3 avril 2020 à 05:50
  • Actualisé le 3 avril 2020 à 14:03

Alors que La Réunion entame son 17ème jour de confinement ce vendredi 3 avril 2020, les signalements auprès des forces de l'ordre ont largement diminué en comparaison à l'avant-confinement. Et contrairement à ce que l'on peut croire, ce n'est pas une bonne nouvelle. (Photo d'illustration rb/www.ipreunion.com)

"Lorsque l'on est confiné avec son bourreau, il est extrêmement compliqué de pouvoir appeler à l'aide" souligne Thérèse Baillif, présidente du Collectif pour l'élimination des violences intrafamiliales (Cevif). Plusieurs associations nationales avaient déjà alerté sur la question dès la mise en place du confinement.

"La promiscuité peut créer des tensions là où il n'y en avait pas auparavant, alors dans un contexte où des violences sont déjà présentes, cette situation est effectivement très préoccupante" continue la présidente du Cevif. Elle signale par ailleurs que les bénévoles de l'association, qui prennent généralement en charge une vingtaine d'appels par jour, n'en reçoivent quasiment plus. Thérèse Baillif ne cache pas son désarroi face à une situation inédite, qui enferme les victimes avec leur bourreau. "On est constamment sous le regard de son prédateur" s'inquiète-t-elle.

La gendarmerie confirme d'ailleurs que depuis deux semaines, le nombre d'appel et d'interventions pour des violences intrafamiliales sont en légère baisse : 117 interventions sur la semaine du 2 au 8 mars, 102 du 9 au 15 mars (-12,8%), et 99 du 16 au 22 mars 2020 (-2,9%). La police nationale révèle de son côté 38 plaintes pour violences conjugales du 17 au 24 mars 2020, contre 58 cas sur la même période en 2019 (soit une diminution de 34 %). Une situation qui inquiète grandement les autorités.

"Avec la consommation d'alcool qui risque d'augmenter, nous craignons aussi une augmentation de la violence" s'inquiète par ailleurs la gendarmerie. Pour répondre à ces inquiétudes, la préfecture a donc interdit la vente d'alcool entre 17 heures et 6 heures du matin. Si certaines associations craignent que le manque d'alcool puisse décupler les tensions, la préfecture assure voir cette initiative comme ayant l'effet inverse.

- Que faire si l'on est en danger ? –

Plusieurs actions se mettent donc en place pour continuer à venir en aide aux personnes victimes de violences intrafamiliales : les centres d'hébergement d'urgence sont bien évidemment toujours ouverts, avec un renforcement de 30 places supplémentaires pour compléter les 22 places existantes des Structures d'accueil d'urgences temporaire (SAUT). Les associations restent à l'écoute des victimes, les 7 lieux d'accueil, d'écoute et d'orientation, les 2 accueils de jour et le Planning familial sont disponibles pour toutes saisines relatives aux violences domestiques.

Le réseau VIF propose d’étendre exceptionnellement son champ d’intervention en offrant aux professionnels du Centre Hospitalier de l’Ouest (urgences, maternité, pédiatrie, en gynécologie obstétrique, etc.), de les aider dans la gestion des dossiers de violences intrafamiliales en effectuant la mise en lien avec les services externes concernés.

Les titres de séjour, sur décision du préfet, sont prolongés de 3 mois renforçant ainsi la protection des femmes étrangères victimes de violences conjugales. Le 39 19, Violences Femmes Info, poursuit l’écoute des femmes victimes de violences appelant via un fixe ou un portable.

Sous peu, le numéro 114 sera aussi accessible pour demander de l'aide en cas de violence, et ce par SMS. Cela facilitera le contact pour les personnes ne pouvant appeler à l'aide via un téléphone. Les pharmacies seront aussi mobilisées pour prendre en charge les victimes et contacter les autorités.

"Il est fondamental que tout le monde se sente concerné : la dénonciation ne peut pas venir que des victimes elles-mêmes" a rappelé Isabelle Rebattu, la sous-préfète en charge de la cohésion sociale.  "Tous autant que nous sommes nous devons être des lanceurs d'alerte" a-t-elle conclu lors d'une conférence retransmise en direct.

as / www.ipreunion.com / redac@ipreunion.com

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1 Commentaires
Titin
Titin
3 ans

Bonne idée le SMS au 114 mais il faudra combien de temps pour le mettre en Å"uvre ? Ne pourrait-on pas aller un cran plus loin et proposer un formulaire avec les infos essentielles pour aider la personne dans la détresse à donner les infos utiles et minimum sans réfléchir, et que ce formulaire parte directement au 114 par SMS sans laisser de trace visible sur le téléphone ?