Il y a un an disparaissait l'un des derniers grands visionnaires de La Réunion

Paul Vergès, un homme... tout simplement

  • Publié le 12 novembre 2017 à 10:37
  • Actualisé le 12 novembre 2017 à 13:32

Dans la nuit du vendredi 11 novembre au samedi 12 novembre 2016, il y a un an jour pour jour, Paul Vergès s'éteignait au CHU de Bellepierre. Il était âgé de 91 ans. Fondateur du parti communiste réunionnais, profondément attaché à son île, dont il était l'un des derniers grands visionnaires et son histoire se confond avec celle de La Réunion. Il était aussi un homme... tout simplement. C'est ce qu'a choisi d'écrire Brigitte Croisier, auteure de livres d'entretiens avec le fondateur du parti communiste réunionnais. Nous publions son texte ci-après

Il y a l'homme politique, celui des meetings qui fait corps avec la foule, celui des manifestations où les mots d'ordre font vibrer les drapeaux, celui des assemblées d'ici et d'ailleurs, celui des conférences de presse soulignant la persistance des problèmes. L'homme politique joue tous ces rôles sur la scène publique. Il est photographié, filmé dans ces diverses postures. Ces images sont reproduites et transmises dans l'actualité au jour le jour, et s'inscriront aussi dans les livres d'histoire et dans les mémoires.

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Et puis, il y a l'homme au quotidien, même si ce quotidien est habité par la passion politique. Or, tout être humain, avant de tracer son chemin, s'inscrit dans une lignée familiale et Paul Vergès s'est constamment référé à son entourage. S'il s'est forgé par lui-même sa propre destinée, il lui a donné son sens en y voyant la mise en œuvre des valeurs paternelles. En l'absence de la maman, Khang, victime du paludisme, alors que l'enfant Paul n'avait que trois ans, la tante de Raymond Vergès, dite "Tante Marie", a pleinement joué le rôle de substitut maternel.

Et puis, bien sûr, il y a le frère, Jacques, décédé en août 2013. A la fois proches et différents, jumeaux ou non jumeaux, ils ont nourri fidèlement leur fraternité de la prime enfance à la fin de leur vie.

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Également long chemin parcouru avec Laurence, une "Parisienne", rencontrée après-guerre, qui le suivit à La Réunion, partagea pleinement ses engagements et ne le quitta que 65 ans plus tard en décédant le 3 novembre 2012.  En fin de compte, Paul Vergès, prônant la révolution, pratiqua la continuité dans sa vie affective. Dans ses derniers mois d'existence, il éprouvait durement la solitude affective qui résulte des départs des êtres chers contemporains, empêchant de partager les souvenirs communs.

- Faire le lien -

Mais la lignée familiale est constituée des ascendants et aussi des descendants. L'homme Paul Vergès aimait pouvoir réunir autour de lui enfants, petits-enfants et… arrière petits-enfants, malgré leurs lieux de vie divers. Voyait-il dans ces nouvelles générations l'esquisse du monde à venir ? Sans doute, et avec quelques inquiétudes qu'il théorisait dans ses analyses politiques. Mais le grand-père se laissait aller à taquiner cette jeunesse, à faire éclater leurs rires et il y trouvait du plaisir.

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Quoi de mieux pour réunir la famille que de manger ensemble ? Rien, diront Réunionnaises et Réunionnais ! Paul Vergès a suivi la tradition et à la gourmandise il ajoutait sa participation active à la préparation des plats, bien pimentés, évidemment. Cuisine créole ou créolisée quand, par exemple, il mettait du boucané dans le gratin dauphinois : une manière d'assimiler sans être assimilé ? Comme quoi, les mots d'ordre politiques se retrouvent parfois dans l'assiette de manière très concrète.

Dernière petite touche à ce portrait, Paul Vergès aimait parler. Parler, c'était partager ce qu'il avait vu, ce qu'il avait lu, ce qu'il avait pensé et même rêvé pour son pays, La Réunion. Yeux ouverts, oreilles en alerte, il puisait aussi bien dans la presse, d'ici et de dehors, dans l'observation des comportements, dans le décryptage des propos des uns et des autres. Il restituait tout cela avec une pointe de piment, un grain de malice dans les yeux et un petit sourire en coin, manière de dire "à vous de poursuivre la réflexion !".

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Cela voulait dire aussi que la politique - ou "le" politique - n'était pas réservée à des fonctions, à des lieux, à des temps spécifiques, mais qu'elle se nourrissait du vécu au jour le jour et qu'elle irriguait une pensée constamment en éveil. L'homme au quotidien ne suspendait pas son costume politique au porte-manteau et l'homme public était fait de chair et de sang, comme tout être humain.

Brigitte Croisier

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2 Commentaires
Arafat
Arafat
6 ans

C ETAIT UN GRAND HOMME MAINTENANT C POLITIQUE AU JOUR LE JOUR C COM DANS LA COUR DE RECREATION DE L ECOLE.

Dido974
Dido974
6 ans

Changez la date ce c'est pas en 2017 mais 2016... (Merci pour cette remarque Dido974, c'est corrigé ! - Webmaster IPR)