Courrier des lecteurs de Jean-Claude Comorassamy

La psychiatrie réunionnaise, établissement pivot, qui manque de moyens

  • Publié le 2 octobre 2018 à 10:00

L'histoire de la psychiatrie Réunionnaise semble prendre son vrai point d'ancrage vers 1767 lors de la construction de " L'hôpital du Roy " suite à la rétrocession des Îles au Roi par la compagnie des Indes. Désormais sous l'administration de la Marine, cet hôpital fût dénommé " hôpital de la Marine " le 1er juin 1872. C'est ainsi que l'imposante bâtisse centrale de l'ancien site, administrée par la Marine, soignait dit-on, les marins, les soldats blessés mais aussi les esclaves invalides et des aliénés (d'où le nom d' "asile de fous " ou d'hôpital de " fous "). Mais avant même précisait Louis Payen, dans les années 1753, les esclaves agités, violents, des rébellions, dont leurs maîtres pour se débarrasser d'eux, on les plaçait dans des hospices ou hôpitaux.

Cependant, la grande mutation de la psychiatrie réunionnaise est survenue au moment de la Départementalisation et par la suite l’application de la Loi hospitalière. A partir de là, on commence à parler de soins psychiatriques avec l’arrivée du premier et seul psychiatre le docteur Le Mappian, venu de la Métropole, qui a pris ses fonctions en juin 1953. Pour son arrivée dit-on, la pancarte trônant " Asile " à l’entrée, fût enlevée pour la remplacer par " hôpital psychiatrique ".

A partir de ces quelques données historiques, cet édifice visible encore aujourd’hui, devenu Centre hospitalier Spécialisé (CHS) au dessous du viaduc. Puis, suite au déménagement au site de Cambaie, l’hôpital psychiatrique s’est évolué en Établissement Public en Santé Mentale de la Réunion (EPSMR) et Il porte à lui seul tout un pan de l’histoire de la Réunion, une fascinante histoire de la santé mais surtout de la psychiatrie dont la charge symbolique du lieu reste impressionnante et fascinante.

De l'intra à l'extra-hospitalier

C’est dans ce vestige, ce petit " bijou " chargé d’histoire que je suis tombé en 1978, il y a plus de 40 ans. Tellement passionnant,  un peu comme Obélix tombé dans la marmite de potion magique !

Et, il ne fait guère de doute que c’est dans cet environnement " énigmatique " du débutant, que je me suis nourri d’année en année de cette passion de la psychiatrie, de son histoire et de ses mutations. C’est là que  j’ai pu découvrir, observer, apprendre, vivre et participer aux diverses évolutions de l’organisation des soins à l’EPSMR.

Nous sommes passés d’une offre exclusivement intra-hospitalière à un ensemble de soins en structures ambulatoires (extrahospitalière) variées et diversifiées aussi bien pour les adultes que pour les enfants. Pour mémoire,  la coordination et la continuité des soins entre les différents lieux sont assurées par une équipe comprenant psychiatres ou pédopsychiatres, soignants, psychologues, psychomotriciens, travailleurs sociaux (qui ne sauront pas les bienvenus voire dévaloriser à l’époque), secrétaires, agents de services etc.

En attente de moyens nouveaux

Les années ont passé, aujourd’hui, avec une stratégie encore plus lisible, l’EPSMR s’est affiché au mieux à répondre aux besoins de la population. Ainsi, toutes synergies ont été déployées dans la construction de notre projet d’établissement, alors même que l’EPSMR est devenu un établissement pivot de l’Océan Indien. Finalement, nous trouvons injuste que notre psychiatrie soit encore sous-dotée par rapport à la Métropole.

D’ailleurs, la Ministre des Solidarités et de la Santé, Mme Agnès Buzyn, le 28 juin dernier a jugé nécessaire et prioritaire, le renforcement de la dotation pour les trois régions sous-dotées, dont la Réunion. Elle a prévu encore d’augmenter le budget de la psychiatrie, " parent pauvre " de la médecine, dit-elle.

C’est pour cela que nous attendons de la part de la nouvelle Directrice Générale de l’ARS-OI, Mme Martine Ladoucette, des actes forts à la feuille de la route esquissée du projet d’établissement avec des moyens nouveaux, pour que l’EPSMR devient demain le pôle d’excellence et de recherche en santé mentale et psychiatrie de l’Océan Indien. C’est pour cela qu’il y a des rendez-vous avec l’histoire qu’il ne faut surtout pas rater.

 

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