Tribune libre d'associations de lutte contre le risque requins

Crise requin : lettre ouverte à Madame la Ministre de des Outre-mer

  • Publié le 26 octobre 2018 à 10:57

Madame la ministre, nous constatons que " le requin " n'est pas au menu de votre visite officielle, alors que vous aviez redoublé de promesses à ce sujet lors de votre précédent passage en octobre 2017. S'agissait-il de paroles en l'air, ou avez-vous été, vous aussi, recadrée depuis à ce sujet ? Car tout le monde connait et mesure, à travers des situations telles que celle-ci, l'incommensurable mépris du gouvernement français s'agissant du sort de ses territoires ultra marins, justes bons, semble-t-il, à offrir sa richesse maritime. Doit-on vous rappeler que 97 % des océans français se situent en outre-mer ? Et que c'est à nous que la France doit son statut de seconde puissance maritime mondiale ?

Plus que jamais, les politiques publiques françaises sont tournées vers l’océan, notamment celles relatives au développement futur des outre-mer, comme l’a encore confirmé l’IEDOM début 2018. C’est pourquoi aujourd’hui vous venez présider chez nous une conférence sur " l’économie bleue ". Mais comment arrivez-vous dans le même temps à fermer les yeux sur notre océan " rouge " du sang de nos enfants, sur 5 ans et demi d’interdiction " provisoire ", sur 1917 jours de privation d’accès à notre environnement ? Comment pouvez-vous prétendre porter ici " l’économie bleue " alors même que cette gestion désastreuse du risque requin nous prive de notre principal atout maritime, à savoir l’océan récréatif ?

Chaque année, 35 millions le nombre de touristes s’amusent l’été dans les eaux métropolitaines, apportant 50 milliards d’euros de valeur ajoutée. Avec juste deux mois de saison, cette manne économique providentielle permet de faire vivre l’ensemble du littoral national, pour presque toute une année. À l’île de la Réunion nous n’avons même pas droit à un mois, un jour, une heure, et cela alors même que nous avons un territoire fantastique, bénéficiant de conditions exceptionnelles pour la pratique des activités nautiques, avec un climat tropical permettant de fonctionner en toutes saisons. Comment la France peut-elle, au nom d’une prétendue exemplarité " écologique ", décider de nous priver de ce pan économique essentiel, de tuer notre poule aux " eaux " d’or ? Nous ne demandons rien de plus que l’égalité avec l’ensemble des autres régions littorales métropolitaines.

Nous vous implorons de ne plus simplement continuer de gaspiller des millions d’euros à " jouer au requin ". Les solutions de bon sens, simples, efficaces et gratuites sont proposées depuis des années par les acteurs du terrain : réoccupation raisonnée de la zone balnéaire par la pêche traditionnelle et retour à la commercialisation (sous condition) de la chair des requins côtiers. Mais celles-ci restent obstinément refusées par le pouvoir central.

Cette situation, qui constitue la plus grande privation de liberté que connaît notre peuple réunionnais au XXIe siècle, n’a que trop duré. Notre île a suffisamment de difficultés économiques et sociales, elle n’a vraiment pas besoin d’une crise requin en plus.

Gardez votre pitié et vos colliers de perles, mais rendez-nous notre dignité. Laissez-nous enfin décider de notre avenir, pour nous mêmes et pour nos enfants.

Association Océan Prévention Réunion (OPR), Association Elio Canestri, Association Protégeons Nos Enfants (PNE), Association Vérité et Responsabilités sur les attaques de Requins (VRR), Association Sécurisation, Prevention Ocean Tansalé (SPOT), Association Planète Bleue Saint-Benoît (PBSB), Association Sports Industries Réunion (ASIR), Collectif Citoyen Handicap, Collectif des familles et proches des victimes de la crise requin, Collectif Humanisme Océan Indien (CHOI)

guest
0 Commentaires