Un programme inscrit dans sa campagne

Emmanuel Macron, le premier des gilets jaunes rattrapé par le mouvement

  • Publié le 4 décembre 2018 à 10:08
  • Actualisé le 4 décembre 2018 à 11:03

Emmanuel Macron est depuis presque 3 semaines confronté aux Gilets jaunes. Mouvement spontané, inattendu mais, si on y regarde de plus prés, qu'il aurait pu prévoir, en ayant été lui-même le premier bénéficiaire. Car oui, Emmanuel Macron a été le premier des gilets jaunes ! Les deux caractéristiques principales de ce mouvement résident dans la défiance envers "l'ancien monde" (apolitique, asyndical...) et la dénonciation de la détérioration continue des conditions de vie. C'est ce que le candidat Macron avait bien pressenti lorsqu'il s'est présenté aux élections présidentielles - hors du cadre d'un parti politique et avec comme mot d'ordre principal de redonner du pouvoir d'achat aux Français.

Or, aujourd'hui, les Français lui demandent des comptes dans la mesure où son comportement et ses mesures ont très largement déçu. Ainsi, sur le plan politique, il a commencé par créer un parti politique, par se comporter comme tous ses prédécesseurs, donnant l'impression de prendre seul l'ensemble des décisions.

Dans le domaine économique et social, les mesures sur le pouvoir d'achat ne sont absolument pas à la hauteur des attentes. La hausse de la CSG lamine les petites retraites et ne sera pas compensée chez les fonctionnaires à partir de 2020.

La baisse des cotisations salariales a été graduelle. Or, avec la reprise de l'inflation et la hausse globale des prix, elle est passée presque inaperçue. La suppression de la taxe d'habitation n'a pas concerné les revenus moyens qui voient leur pouvoir d'achat fondre (notamment les fonctionnaires dont le point d'indice est gelé depuis 2010). Et, la goutte d'eau qui a fait déborder le vase est la hausse de la taxe écologique censée rapportée 17 milliards en 3 ans, qui se concrétise par
une hausse du coût de l'essence... alors qu'aucune solution alternative n'est mise en face.

Je m'explique, une taxe sur les cigarettes est acceptée car un fumeur peut décider d'arrêter de fumer. Mais une taxe supplémentaire sur les carburants devient inacceptable dans les régions où il n'existe pas de solution alternative, en somme 90% du territoire national.

Le Président est-il le seul responsable la situation ? Non ! La colère couve depuis de longues années, elle devait s'exprimer un jour ; c'est tombé sur lui, certainement parce que justement il l'avait en partie pressentie. Un élément chiffré : au début des années 1960, le taux de prélèvement obligatoire est environ de 30 %, il est de plus de 45 % aujourd'hui. Cette crise ne concerne-t-elle que la France ? Non ! Tous les pays "riches" sont peu ou prou touchés car il s'agit d'une remise en cause globale de tout le système planétaire de consommation des ressources naturelles, de répartition des richesses...

Restons en France, pourra-t-on sortir de la crise avec des mesures uniquement sociales ou économiques ? Non ! Il faut aussi redéfinir le jeu politique et un nouveau pacte social, bref un nouveau projet global pour notre pays (redéfinition du mille-feuille administratif, du rôle des élus, nouvel aménagement du territoire, réforme complète du système fiscal, etc.). C'est un défi immense à relever !

Joël de Palmas
Docteur en Histoire contemporaine

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