Tribune libre de Bruno Bourgeon

Surpopulation : facteur de surconsommation planétaire ?

  • Publié le 29 avril 2020 à 18:16

Entre 100 et 300 millions de Terriens il y a 2000 ans, le milliard franchi entre 1810 et 1830, 7.5 milliards en 2017, 7.7 milliards en 2019, 9.7 milliards en 2050, 11 milliards en 2100 : la surpopulation serait le dernier fléau écologique. Vraiment ? (Photo AFP)

En 1798, un pasteur anglican économiste du nom de Thomas Malthus, publie : " Essai sur les principes de la population ". Il montre que la population anglaise croît de manière géométrique quand les ressources alimentaires croissent de manière arithmétique. Le chaos par la famine guette la couronne. Malthus a la solution : contrôle des naissances partout où elles sont le plus problématiques, i.e. chez les pauvres. Il écrit avec tact : " nous devons rendre les rues plus étroites, entasser plus de gens dans les maisons, et encourager le retour de la peste. " La mortalité des plus démunis comme facteur de régulation de la démographie.

En 1968, Anne et Paul Ehrlich publient : " The Population Bomb ". Remake hollywoodien de Malthus : trop de voitures, trop d’usines, trop de détergents, trop de pesticides, la cause en est toujours la même : trop de monde sur Terre.

Prenons ces théoriciens à la lettre. Le Jour du Dépassement (JD) est la date à partir de laquelle l’Homme consomme plus de ressources naturelles que la Terre ne peut en fournir en une année : en 1970, c’est le 29/12, en 1990, le 11/10, en 2019, le 21/07 : nous avons consommé 1.75 planètes pour 2019. Mais qui est ce " nous " ? Dans les 30 prochaines années, la moitié des 2 milliards à naître seront issus de 9 pays : Inde, Pakistan, Nigéria, République Démocratique du Congo, Ethiopie, Tanzanie, Indonésie, Egypte, et Etats-Unis. 5 sont situés en Afrique, laquelle quadruplera sa population d’ici 2100.

Revenons sur le JD. Si l’Humanité consommait comme le Qatar, le JD serait le 11/02 ; les USA, le 15/03 ; l’Allemagne, le 03/05 ; la France, le 14/05 ; le Royaume-Uni, le 17/05 ; Pour les champions de la démographie galopante : l’Egypte, le 25/11 ; l’Indonésie, le 18/12, les 6 autres n’ont pas de JD.

Pour autant, pourra-t-on nourrir tout le monde ? la production céréale annuelle est de 2.5 milliards de t, de quoi nourrir 10 à 12 milliards d’Humains : 43% pour les Hommes, 36% pour le bétail (chiffres de 2015), bétail racheté par une minorité assez riche pour s’offrir de la viande. Le problème est la répartition.

La peur est tenace, Malthus revient à la mode. En 1950, les USA vantent le contrôle des naissances pour le tiers monde, par peur du communisme rampant dans un monde empli d’inégalités sociales. D’autres pointent les mères africaines. Et si nous inversions la logique ?

Si l’Inde exhortait les USA à lancer des politiques de contrôle du poids ? En 2012, une étude montre que l’obésité représente l’équivalent d’un demi-milliard de personnes à nourrir en plus.

Si l’Ethiopie exigeait de la France un contrôle du vieillissement ? En 2050, un quart de la population française aura plus de 65 ans. Qui dit vie plus longue dit empreinte écologique plus lourde.

On continue dans l’absurde ? En 2050, quoi qu’il advienne, nous serons deux ou trois milliards de plus. Même avec une politique de l’enfant unique, une pandémie, ou une guerre meurtrière. Cependant la fécondité évolue : de 5 enfants par femme en 1950, on est passé à 2.5 enfants en 2020. A l’échelle mondiale. Il y a 50 ans, la croissance démographique était de 2%/an. Aujourd’hui, elle est de 1.1%/an. Ce n’est pas la démographie qui est incontrôlable, mais la peur qu’on en a.

Agiter le fanion de la surpopulation nous évite de questionner nos modèles de société. Regardons la démographie en face : elle a d’autres choses plus essentielles à nous raconter. Elle n’est pas le seul facteur humain impactant l’environnement. On dit que les Occidentaux redoutent l’enrichissement et la surconsommation du tiers monde : ne serait-ce pas plutôt ces mêmes Occidentaux qui veulent vendre leur système et générer plus d’argent pour leur propre profit ? Ne nous laissons pas leurrer par de sombres pasteurs anglicans, d’hier ou d’aujourd’hui. Et surtout ne raisonnons pas, en terme de population, de manière globale : il faut toujours contextualiser.

Bruno Bourgeon, porte-parole d’AID

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5 Commentaires
Gilles
Gilles
3 ans

Là où Malthus s'est trompé c'est qu'il ne prévoyait pas que la terre pourrait nourrir 8 milliards d'êtres humains. Le problème c'est que ces humains ont, pour y parvenir, gravement détruit la nature (air, sols, eaux, océans), en particulier en exterminant la faune sauvage, au point de compromettre leur propre survie. Le résultat est catastrophique, encore n'en voyons-nous que les prémices. Moralité : se défier des militants altermondialistes du début du XXIe siècle autant que des pasteurs anglicans de la fin du XVIIIe.

Vermicelle
Vermicelle
3 ans

Voilà un article de bon ton. Il dit ce qu'on doit dire : ce sont les Occidentaux et leur mode de consommation qui sont nocifs. Après s'être battu la coulpe, on peut tout de même rétorquer à ce monsieur, que la plupart des pays qu'il cite (Egypte, Inde, Pakistan, RDC et les autres pays africains...) commencent à être débordés par leur démographie en matière d'éducation, soins, formation, emploi..., et ont pris conscience que celle-ci va stopper toute possibilité de développement et provoquer de graves troubles sociaux, ethniques, religieux. Que faire d'une masse de jeunes sans formation et sans avenir...En 2050 nous serons 9,5 milliards dont environ 1 milliards de "nantis". Même si ce milliard accepte de vivre comme Gandhi, cela permettra-t-il aux 8,5 autres milliards de survivre? De préserver la nature et la biodiversité et donc de faire survivre l'humanité? De faire une agriculture respectueuse de ce qui restera de terres arables? L'aveuglement idéologique est parfois criminel. Il le sera en premier lieu pour les populations fragiles que le discours de cet article feint de défendre.

Denis Garnier
Denis Garnier
3 ans

Publier un article niant les conséquences néfastes de la croissance démographique et ce en pleine pandémie mondiale aurait presque de quoi faire sourire si la situation n'était pas aussi dramatique et si tant de gens ne décédaient pas de par le monde.En effet, au-delà des erreurs de tel ou tel gouvernement qui ne s'est pas préparé ou qui n'a pas osé fermer les frontières de son pays pour des raisons idéologiques, l'origine de la catastrophe actuelle est essentiellement due à la surpopulation. La très forte augmentation de la population mondiale, passée de 1 à presque 8 milliards d'humains en à peine plus de deux siècles, a conduit à l'agrandissement des villes, à la construction de vastes infrastructures routières et industrielles ainsi qu'à l'extension des terres agricoles. Cela s'est inévitablement traduit par le recul de la nature et la colonisation de territoires sauvages.Ces territoires, souvent des forêts, abritent une riche biodiversité et en particulier des espèces susceptibles d'infecter les humains, leurs animaux d'élevages ou les animaux de brousse qu'ils consomment.Ces contacts, associés à la forte densité de population de nombreuses régions, favorisent la transmission des maladies émergentes puis le développement des épidémies.La mondialisation des échanges, générant de vastes mouvements de personnes et de biens vient renforcer ces facteurs, offrant ainsi une voie royale pour nombre de pathogènes.La rapidité des déplacements conduit les maladies à se répandre très vite dans toutes les zones urbanisées du monde à forte densité telle la région parisienne qui compte plus de 1.000 habitants au kilomètre carré, une densité élevée étant un obstacle à toute distanciation sociale. A chaque étape de ce funeste parcours la démographie joue donc un rÃ'le prépondérant dans la propagation des maladies infectieuses.Et on ne parlera évidemment pas ici de tous les autres domaines impactés par la prolifération humaine...https://www.demographie-responsable.org/

Didier Barthès
Didier Barthès
3 ans

C'est au contraire le discours centré sur le mode de vie qui nous évite de nous poser les bonne questions sur la surpopulation. Cet article passe sous silence deux éléments essentiels qui valident la nécessité de revenir à des effectifs beaucoup plus modestesSi les pays les plus pauvres polluent et consomment moins c'est justement parce qu'ils sont pauvres, or, peut on leur demander de le rester ?Mais surtout, sur le plan écologique il faut prendre conscience que les effectifs de notre espèce (qui ont été multipliés par 5 depuis 1900 !) sont environs 1000 à 2000 fois plus importants que ceux que la nature autorise à toute espèce animale de taille comparables . Inévitablement, par notre nombre, nous réduisons le monde sauvage à presque rien. Doit-on continuer dans ce sens ? Je ne pense pas, nous devons au contraire partager la Terre, c'est la seule voie du respect et de la durabilité.

JMT97400
JMT97400
3 ans

article complet: http://www.aid97400.re/spip.php?article488