Fouilles archéologiques préventives

Doit-on sacrifier notre histoire au profit de nouvelles constructions ?

  • Publié le 23 février 2018 à 10:24

Détruire le passé pour reconstruire l'avenir. Tel est en somme l'aboutissement des fouilles préventives menées par les archéologues sur l'île depuis 2010. Malgré des découvertes exceptionnelles et des vestiges racontant les premiers pas de l'homme sur le territoire, les fouilles dites préventives ne servent qu'à mieux reconstruire après avoir déconstruit. Quitte à ne faire que peu de cas de nos origines.

C'est sur les terres du "berceau du peuplement" à Saint-Paul, première commune habitée de l'île Bourbon au 17ème siècle, que les équipes de l'Institut national des recherches archéologiques préventives (Inrap) travaillent depuis le 22 janvier. À l'entrée sud de Saint-Paul près du cimetière marin, sur environ 7.000 m2, les fouilles archéologiques ont permis de révéler les vestiges d'un habitat du XVIIIe siècle. Les recherches se poursuivront jusqu'au 9 mars et devraient laisser place à un chantier de construction logements par la Sédré.

Ce samedi 24 février, des visites organisées du site sont prévues pour faire découvrir aux Réunionnais l'habitat des premiers habitants du territoire. Des visites qui résonnent comme un "au revoir" à une partie du patrimoine historique réunionnais, où chacun pourra observer les fouilles dites préventives réalisées par les archéologues de l'Inrap avant de voir le site devenir chantier. Les fouilles préventives prévoient en leurs termes "un rapport de diagnostic" qui peut donner lieu à une "prescription de modification de la consistance du projet" ou même à "un classement au titre des monuments historiques de tout ou partie du terrain". Une dernière "éventualité (qui) reste très rare" précise le ministère de la Culture dans son guide de l'archéologie préventive.

Alors, à quoi bon fouiller pour détruire le site à coup de pelle mécanique ensuite ? La Réunion devrait-elle se faire si peu de cas de ses origines ? Avec des travaux de recherches longs, coûteux demandant une précision et des connaissances historiques, sommes-nous obligés au détriment de notre histoire, de laisser place à des constructions nouvelles ?

- Des lieux chargés d'histoire -

Sur le site de Saint-Paul à deux pas de la Grotte des Français, les découvertes réalisées sont nombreuses. Des maçonneries diverses aux restes de services à thé en porcelaine en passant des vestiges de cultures agricoles, le site regorge de trésors anciens. Après avoir été déterrées, les différentes trouvailles seront analysées afin de donner des réponses aux premières hypothèses émises par les archéologues.

Des réponses qui finiront leur course dans des rapports sûrement, des musées peut-être, mais les lieux, eux, ne seront plus jamais les mêmes. Et c'est l'histoire d'une île à l'histoire récente à l'échelle de l'Humanité, mais ô combien chargée et nécessaire à enseigner et rendre compte aux générations d'aujourd'hui et de demain. Dans ces vestiges de la seconde moitié du XVIIIe siècle de Saint-Paul ? L'histoire des premiers habitants de l'île. Leur mode de vie, leur culture, leur environnement.

Le 16 mars prochain, pendant que les premières analyses des découvertes de Saint-Paul débuteront dans les laboratoires de l'Inrap, les dents métalliques des pelleteuses de la Sédré se mettront en action sur le site de près de 7.000 m2. Là où le sable meuble et les traces d'inondation, sans doute dues à un débordement de la ravine, pourraient expliquer l'abandon du site par ses locataires au début du XIXe siècle… Et où donc des logements sociaux verront le jour dans les mois à venir.

www.ipreunion.com

guest
2 Commentaires
Jose
Jose
6 ans

Réunionnais est plus tourné vers la création de traces géologiques, fonds de ravines, champs de cannes, bref la moindre occase pour déverser ses déchets est bonne. Les traces du passé, rien à péter !

VIVE L\'EXTINCTION !
VIVE L\'EXTINCTION !
6 ans

Naturellement. Il ne faut surtout rien changer et respecter tous les vestiges de notre histoire. Il ne faut pas construire de routes, d'écoles, d'hôpitaux, de logements, d'hôtels, de commerces ... parce que l'on risque de détruire les vestiges de notre glorieuse histoire tels que deux os, le lieu sacré où trois esclaves ont été tués au 18ème siècle, une prison ou se sont succédés les rebuts de notre société ....
Les musées, les stèles, les manuels scolaires sont là pour préserver notre mémoire - bonne ou mauvaise - et pour nous apprendre à y puiser ce qui nous rend plus fort.
Le culte systématique de tout ce qui est passé et notamment des blessures vives de notre histoire comme justification à la médiocrité présente ne nous conduit pas vers le progrès mais nous enferme dans une fausse démarche expiatoire qui, in fine nous condamne à la régression.
Nous, réunionnais, valons mieux que cela. Prouvons le enfin !