Renversement de Mohamed Bacar à Anjouan

Manifestation à La Réunion, émeutes à Mayotte

  • Publié le 28 mars 2008 à 00:00

Une trentaine de ressortissants comoriens ont manifesté ce vendredi 28 mars devant la préfecture et le commissariat central de Saint-Denis où le colonel Bacar, président déchu d'Anjouan est en garde-à-vue depuis la nuit de jeudi. Les manifestants demandent qu'il soit renvoyé vers les Comores afin d'y être jugé pour actes de tortures. Le procureur de Saint-Denis a annoncé que l'ancien président sera jugé samedi pour entrée illégale sur le sol français. À Mayotte, un calme précaire régnait ce vendredi matin après les violentes émeutes de jeudi.

Le président anjouanais déchu est arrivé dans la nuit du jeudi 27 mars 2008 à la Réunion. Avec 22 de ses partisans, il est retenu en garde-à-vue au commissariat Malartic de Saint-Denis où les auditions, menées par la Police de l'Air et des Frontières, devraient se poursuivre jusqu'à samedi 29 au matin. Il sera ensuite jugé, probablement dans la journée, par le parquet de Saint-Denis pour entrée illégale sur le sol français (à savoir Mayotte) et port d'armes illicite.
Mohamed Bacar est donc arrivé sur le sol réunionnais vers 1 heure du matin à bord d'un transall de l'armée de l'air. Il a été immédiatement transféré au commissariat Malartic en compagnie de sa garde rapprochée. D'après François Muguet, procureur de la République de Saint-Denis, l'ancien dictateur sera jugé " sous le régime de la comparution immédiate ", en fin de matinée, ce samedi 29 Mars. Les chefs d'accusation retenus contre lui sont l'intrusion illégale sur le territoire et l'importation, le transport et la détention d'armes prohibées de première catégorie (armes de poing utilisées en temps de guerre). " Le tribunal de Saint-Denis appréciera de la suite à donner au sort de Mohamed Bacar, a conclu François Muguet


Mandat d'arrêt international

Sachant qu'il n'existe pas de procédure d'extradition entre la France et les Comores et que le colonel Bacar a fait une demande, en marge de son jugement, d'asile politique, nul ne peut encore prédire le sort judiciaire de l'ancien président d'Anjouan. La République des Comores dit avoir émit un mandat d'arrêt international contre le fuyard, en l'accusant notamment de tortures, et insiste pour qu'il soit traduit dans les plus brefs délais devant la justice comorienne.
Le colonel Bacar n'a, pour sa part, pas du tout intérêt à être renvoyé dans son pays d'origine où la peine de mort est toujours en vigueur (elle n'a cependant été appliquée que deux fois depuis 1975). À Mayotte, où les tensions sont restées vives jusque tard dans la nuit, le calme semble être revenu. Partis de La Réunion, deux pelotons de gendarmerie mobile, soit une quarantaine de militaires, sont arrivés hier en renfort. Un véhicule blindé roulant de gendarmerie (VBRG), utilisé lors d'émeutes, a également été expédié sur place.

Émeutes à Mayotte

Rappelons par ailleurs que jeudi à Mayotte près de 1000 Comoriens ont manifesté dans les rues de Mamoudzou, 200 en Petite Terre, pour l'extradition de Mohamed Bacar qu'ils veulent voir jugé en Grande Comore, dans son pays d'origine. La rotation des barges entre les deux îles a dû être longuement interrompue pour raisons de sécurité. La tension est quelque peu retombée dans la soirée, après que les forces de l'ordre soient intervenues, à coup de grenades lacrymogènes. Le premier bilan officiel faisait état de 18 blessés, enregistrés au centre hospitalier de Mamoudzou.

Une crise de grande ampleur

C'est la nouvelle de la prise en charge de Bacar par les autorités françaises qui a mis le feu aux poudres. En effet, la situation à Mayotte s'est envenimée quand les Anjouanais ont appris que l'ancien Président et ses proches étaient réfugiés au sud de Grande terre, chez son frère.
Des barrages ont été érigés dans plusieurs villages du sud et des échauffourées ont eu lieu. L'annonce de l'extradition de Bacar vers la Réunion, intervenue dans la matinée, n'a fait qu'exacerber les rancoeurs et relancer la mobilisation des Anjouanais. Certains ont même pu gagner l'aéroport de Pamandzi (d'où décollait Bacar) : " nous voulons qu'ils nous rendent Bacar ", expliquait l'un des manifestants présents à l'aéroport.

Imprévisible

C'est pour éviter une trop forte affluence en Petite terre que le Préfet a décidé d'interrompre le trafic des barges. Loin de faire revenir le calme, cette mesure a encore fait monter la pression. D'après des images diffusées par RFO Mayotte, certains métropolitains ont été littéralement passés à tabac par des jeunes Anjouanais. C'est le rond-point de la barge, centre névralgique de Mamoudzou, qui a cristallisé toutes les tensions. De nombreuses personnes ont dû se réfugier dans les magasins, les commissariats et gendarmeries. Si l'apaisement était revenu en début de soirée dans le chef-lieu, la suite des événements demeure imprévisible.
guest
0 Commentaires