Saint-Louis

Le préfet a bien suggéré la révocation de Claude Hoarau

  • Publié le 21 septembre 2010 à 22:30

Le préfet de La Réunion, Michel Lalande, n'a pas demandé la révocation du maire de Saint-Louis Claude Hoarau. Il n'en a pas légalement le pouvoir. Mais dans un courrier adressé début août 2010 à Marie-Luce Penchard, ministre de l'Outremer, il indique : "une lettre a été adressée le 30 juillet 2010 au ministère de l'intérieur et au ministère de l'outremer pour décrire la situation financière de Saint-Louis et suggérer une probable demande de révocation du maire". L'information a été révélée ce mardi soir 21 septembre 2010 par Télé Réunion. Saint-Louis souffre d'un déficit budgétaire de 21 millions d'euros et son budget 2010 a été réglé d'office par le préfet. Dans une lettre cinglante - en possession d'Imaz Press Réunion -, Michel Lalande avait mis en cause la gestion "calamiteuse" de Claude Hoarau.

Ce mardi matin 17 septembre Radio Réunion avait déjà annoncé l'engagement d'une procédure de révocation de Claude Hoarau par le préfet pour cause de déficit financier récurrent des finances communales. Quelques heures plus tard ce mardi 17 septembre, un bref communiqué de la préfecture affirmait: le préfet "dément catégoriquement avoir engagé à ce jour une procédure de révocation ou de suspension à l'égard du maire de la commune de Saint-Louis". Démenti justifié. Le préfet n'a pas la compétence légale de lancer ce type de procédure. Seul le ministre de l'Intérieur peut proposer cette révocation et il revient au conseil des ministres d'accepter ou pas.

Le préfet est par contre libre de "suggérer" la révocation. C'est donc ce qu'il a fait dans sa lettre du 30 juillet au ministère de l'intérieur et au ministère de l'outremer. Dans ce même courrier il a aussi dressé la liste de toutes les affaires mettant en cause le maire saint-louisien. Elles portent essentiellement sur des faits supposés d'achat de voix et de harcèlement du personnel.

Interrogé à propos de ce courrier dans la journée de mardi par Télé Réunion, Michel Lalande n'a pas répondu directement. Mais il a affirmé "je ne laisserai pas les Saint-Louisiens dans cette situation". Allusion aux 21 millions d'euros de déficit enregistrés par la commune de Saint-Louis. Après avoir rappelé que l'initiative d'une procédure de révocation ne dépendait pas de lui et estimait qu'il ne s'agissait pas là du fond du problème, il ajoutait : "le sujet, c'est le redressement des finances locales. Car derrière ces finances, il y a des contribuables qui travaillent dur pour payer des impôts".

Michel Lalande disait aussi "le préfet à des responsabilités pour garantir le redressement des finances communales". Il poursuivait, en substance, : "je souhaite que Saint-Louis retrouve la voie du progrès social grâce à une amélioration de la gestion de son budget". Et il terminait son interview sur cette déclaration tranchée : "je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que Saint-Louis retrouve les voies de la sagesse dans la gestion financière".

Une déclaration dans le ton du courrier adressé le 30 à Claude Hoarau. Ce jour là, (le même que celui la lettre au ministère de l'Intérieur), Michel Lalande annonce au maire de Saint-Louis qu'il a "décidé de prendre un arrêté de règlement d'office du budget primitif 2010" de commune de Saint-Louis. Long d'une page et demie, la lettre est extrêmement critique à l'encontre de la gestion financière développée par le maire saint-louisien. Le préfet commence par rappeler au maire qu'il "n'a pas respecté les termes de l'arrêté préfectoral du 13 août 2009 réglant d'office le budget 2009" de la commune, "en adoptant deux décisions modificatives, postérieures à cet acte administratif, qui ont accru les charges et, par conséquent, le déficit de fonctionnement de plus de 1,6 million d'euros". Michel Lalande écrit ensuite "De surcroît, vous n'avez pas mobilisé corrélativement les recettes nécessaires ce qui est contraire à la loi".

Le préfet ajoute "j'observe également à la lecture de l'avis de la chambre régionale des comptes que le budget primitif 2010 s'écarte des mesures de redressement énoncées dans l'arrêté du 13 août 2009 - ndlr) pour les exercices 2010 à 2012 en matière de fiscalité locale". Notant que l'augmentation des impôts locaux avait été de 40% alors que le plan de retour à l'équilibre prévoyait une hausse de 2%, le préfet souligne que "cette très forte hausse", "contre toute attente" n'a pas amélioré la situation financière de votre municipalité. "En effet, alors que le déficit de la section fonctionnement prévu dans le plan de retour à l'équilibre devait s'élever à - 5 899 141 euros pour 2010, le budget primitif que vous avez fait adopter pour ce même exercice, présente un solde négatif de - 18 611 415 euros" énumère Michel Lalande. Il es fait ensuite lapidaire : "en définitive, votre gestion a, simultanément aggravé la situation des contribuables et celle des finances locales ce qui, vous en conviendrez, constitue un résultat remarquable en même temps que calamiteux".

Le courrier précise ensuite tout aussi lapidairement à Claude Hoarau que "le budget réglé d'office est établi à partir des propositions de la chambre régionale des comptes formulées pour rétablir la sincérité de certaines dépenses budgétaires inscrites au BP 2010" voté le 12 mai. Dans une menace à peine voilée, le préfet souligne : "j'attache le plus grand prix, à l'instar de la juridiction financière, à ce que les dépenses réelles 2010 ne dépassent pas les dotations".

À la fin de son courrier, Michel Lalande rappelle à Claude Hoarau "lors de la réunion du comité de suivi du 9 avril dernier, vous vous étiez engagé à réduire de 230, le nombre de contractuels, dès juillet 2010, ce qui n'a pas été réalisé". Aussi, dit-il "je prends note de votre nouvel engagement de diminuer de 191, le nombre de CDD au 31 décembre 2010". Il va de soi, termine le préfet "que la compression de la masse salariale nécessite de proscrire tout recrutement nouveau (titulaire ou non) ainsi que toute pérennisation ou transformation d'emploi, qui ne serait pas obligatoire au regard de la loi".

Dans la journée de mardi, Claude Hoarau a rédigé un communiqué et réservé des espaces publicitaires dans les journaux de ce mercredi. Il note que le préfet a démenti avoir engagé une procédure de révocation contre lui. Il annonce que son équipe et lui "se réserve le droit de porter plainte pour divulgation de fausses nouvelles et diffamation. Le maire saint-louisien poursuit "le travail partenarial avec l'Etat, la chambre régionale des comptes, les banques, les partenaires économiques et sociaux commencent à payer dans l'intérêt de la population". Claude Hoarau affirme ensuite "la ville s'est engagée dans de nouvelles pratiques et, même si pour l'heure notre image n'est pas à la hauteur de nos ambitions pour Saint-Louis, nous maintiendrons, avec détermination, le cap fixé pour l'avenir. L'ensemble de nos partenaires peut être rassuré".

La rédaction de ce communiqué et l'achat d'espaces publicitaire dans les journaux ont été réalisés avant la diffusion du reportage de Télé Réunion dans son journal de 19 heures mardi.

Mahdia Benhamla pour
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