Spéléologie - Tunnels de lave

Des sentiers sous le volcan

  • Publié le 4 février 2011 à 07:00

Les tunnels de laves existant sur l'île pourraient être aménagés afin de permettre la pratique "en tout sécurité" et dans "la préservation des environnements souterrains" de la spéléologie à l'intérieur de ces "grottes". C'est une éventualité sur laquelle la Direction de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion sociale va plancher dans les mois qui viennent. Cette proposition fait suite à une expertise effectuée par Serge Fulcrand, cadre technique national de spéléologie au ministère de la jeunesse et des sports, et par Didier Cailhol, président de la commission scientifique de la Fédération française de spéléologie. Les premiers éléments de cette expertise de terrain ont été rendus publics ce jeudi 3 février 2011.

Les deux scientifiques tiennent tout d'abord à être clairs : "les tunnels de laves sont des grottes". Des grottes dans lesquelles la pratique de la spéléologie est possible, ce qui se fait déjà de façon sauvage sur l'île. "Il n'y a aucune interdiction de descendre dans ces tunnels de laves. Mais ce genre de pratique demande une certaine préparation et un certain encadrement", souligne Régis Bertogli, inspecteur principal de la Jeunesse et des Sports.

Et pour cause, les tunnels de laves sont ce que les deux experts appellent des "environnements spécifiques". "Rien n'est figé dans un tunnel de laves. Le milieu évolue du fait du mouvement des sols et des plafonds. Si on dit que la zone est sécurisée à un moment, ce ne sera pas forcément le cas plus tard", explique Serge Fulcrand. Il prend l'exemple des tunnels de laves nés de l'éruption de 2004. "Ils ne sont pas encore stabilisés par rapport aux éruptions plus anciennes et donc sujets à davantage de risques d'effondrements", détaille t-il.

Pour les deux scientifiques, la sécurité, c'est avant tout "la connaissance du milieu par l'encadrant". "C'est lui qui dira si les conditions sont réunies pour descendre dans un tunnel de laves", explique Serge Fulcrand. Il rappelle la nécessité pour le spéléologue encadrant d'être diplômé. "Au delà, il y a aussi le besoin d'avoir un matériel conforme à la règlementation", signale t-il. "L'équipement doit être encore sous la garantie du constructeur, il doit être vérifié après chaque sortie et tous les ans", affirme l'expert du ministère de la jeunesse et des sports.

Les deux experts soulignent que "l'exploration des tunnels de laves n'ont pas qu'un intérêt économique". "Il y a aussi un intérêt patrimonial, éducatif, sportif mais aussi touristique", analyse Didier Cailhol. "Ce n'est pas une activité tendance qui n'aura du succès que durant 2 années. C'est une activité sur le long terme, ancrée dans le sol et dans l'histoire. Pour qu'elle puisse perdurer, il faut donc l'organiser", recommande le président de la commission scientifique de la Fédération française de spéléologie.

Cette organisation passe notamment par la mise en place d'une politique de "conservation du milieu souterrain", en partenariat avec les collectivités, l'ONF ou encore le Parc national. "Cette activité aura forcément un impact sur le milieu souterrain. L'objectif est de limiter cet impact pour permettre à la reconquête végétale de se poursuivre", indique Didier Cailhol. Il évoque notamment la mise en place d'itinéraires balisés qui auraient un double objectif : "permettre de pratiquer l'activité dans une plus grande sécurité et préserver le milieu dans lequel les spéléologues évolueront". Serge Fulcrand met néanmoins en garde contre l'afflux massif de personnes dans ces tunnels de laves. "Cette zone reste un milieu spécifique. Il est impossible d'assurer la sécurité des explorateurs si l'encadrant est accompagné d'une colonne de 30 personnes", illustre t-il.

Ces premiers éléments d'expertise feront l'objet d'études de la part de la Direction de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion sociale. La mise en place de zones aménagées notamment n'est pas exclue. "Nous allons aussi nous pencher sur la question de l'encadrement", affirme Denise Hong-Hoc-Cheong, directrice de la Direction de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion sociale. Un rapport plus détaillé devrait par ailleurs être remis par les deux scientifiques dans les semaines qui viennent. "Par la suite, nous prendrons des décisions concrètes", annonce Régis Bertogli.

Selon Didier Cailhol, La Réunion compte 50 tunnels de laves connus. Il évalue à 100 le nombre de tunnels qui pourraient exister. "Il y a un important travail de référencement à effectuer", concède le scientifique.

Mounice Najafaly pour
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