Complémentaire du traitement médical

Socio-esthétique : retrouver sa féminité après une ablation du sein

  • Publié le 22 octobre 2018 à 02:58
  • Actualisé le 22 octobre 2018 à 06:17

La maladie et les traitements ayant des effets délétères sur l'apparence et souvent sur l'estime de soi, des soignants et des esthéticiennes proposent aux malades un cocooning encouragé par le corps médical. A La Réunion, une association, Un autre regard, présidée par un aide-soignant affecté à la mission d'encadrement de la socio-esthétique au CHU Nord et à la Clinique Sainte-Clotilde, intervient auprès de nombreux malades du cancer, notamment des femmes devant ou ayant subi une ablation du sein et en attente d'une reconstruction mammaire.

Depuis une bonne dizaine d’années, l’annonce du cancer n’est plus assénée de manière brute : " Le médecin est souvent accompagné d’un psychologue et notre équipe de socio-esthétique est aussi mobilisée. La prise en charge est désormais pluridisciplinaire ", explique Guillaume Kichenama, président de l’association Un autre regard. En 2003, alors que cet aide-soignant d'origine réunionnaise travaillait à Créteil, il a eu l’occasion de se former en socio-esthétique. " Quatre ans plus tard, j’ai été repéré à l’APHP par un médecin réunionnais. " D’où sa mutation en 2007 à l’Ile de La Réunion, dans le cadre du plan Cancer mis en place par l’ARS OI.

Agent hospitalier, Guillaume Kichenama intervient au CHU et à la Clinique Sainte-Clotilde :" Nous travaillons sur la restauration de l'image corporelle, un chemin qui peut être très douloureux après un traitement ou une opération. Pas seulement auprès des femmes, les hommes ont aussi besoin de reprendre confiance en eux pendant un traitement contre le cancer. Prodiguer des soins à quelqu'un redonne de la valeur au corps ", précise-t-il.

Depuis 2007, Guillaume Kichenama a eu l’occasion de former 13 socio-esthéticiennes. " Ce sont des esthéticiennes D.E., qui font une année de spécialisation pour pouvoir prendre en charge des patients sur le côté esthétique. "

Partie intégrante de l'équipe soignante

Pour les femmes qui subi une ablation du sein, le rôle de l'accompagnant en socio-esthétique est crucial : "Nous participons même à la consultation d'annonce, dans l'accompagnement du patient sur les effets secondaires des traitements et cela afin mettre en place les outils esthétiques et cosmétiques adaptés à chaque patiente. Ensuite, je les conseille aussi pour le choix d'une prothèse externe, en attendant la reconstruction mammaire. Les aider à se projeter dans leur silhouette transformée est une mission motivante. Il faut leur montrer qu'elles sont belles, qu'il existe des artifices efficaces, comme les prothèses externes du sein et les perruques, pour compenser les effets de la maladie et des traitements en attendant la reconstruction mammaire et la repousse des cheveux. "

Au-delà de la consultation d'annonce, le champ de mission de la socio-esthétique est large. " Pendant les traitements, en hospitalisation complète ou en hôpital de jour, ou à domicile ou encore en institut d'esthétique, il y a les soins quotidiens, explique Guillaume Kichenama. On leur masse la peau avec de la vitamine A pour assouplir et hydrater. On leur propose un massage relaxant, un maquillage, une séance de coiffure, une manucure ".

Si l'équipe de socio-esthétique intervient de manière autonome sur son champ de compétences, il s'agit d'un travail pluridisciplinaire. Par exemple, pour choisir les soins esthétiques, les conseils de l’équipe médicale sont précieux, voire indispensables. A charge pour le (ou la) socio-esthéticien(ne) de déterminer les soins esthétiques les plus appropriés selon le cas de chaque patiente, et d'en référer régulièrement, dans un souci de partage d'informations, à l'équipe médicale .

Une porte ouverte sur une facette de soi insoupçonné

Apprendre au patient à redessiner son image, à retrouver son identité et sa dignité, c'est ce qui fait vibrer Guillaume Kichenama. Et parfois les patientes découvrent, dans cette approche thérapeutique innovante, des richesses inexploitées. ". "J'étais très loin de tout ce qui est piercing ou tatouage, explique Corinne, 55 ans, qui a subi une ablation du sein. L’ablation, la chimio, tout cela a été très difficile. J’ai perdu mes cheveux, mes sourcils, mes cils et mon compagnon m’a quittée pendant le traitement. L’esthéticienne qui m’accompagnait m’a incitée à tenter le tatoo sur le décolleté, avec des décalcomanies. Ce qui m'a m’a beaucoup aidée à me réapproprier mon image, à me voir comme une femme sexy, attirante. Dans ces moments dramatiques, on a eu de vrais fous-rires avec mes filles. en jouant avec les tatoo ".

Pour Guillaume Kichenama, "ces moments de détente permettent de mettre la maladie entre parenthèses"

Depuis, Corinne, qui entretemps a refait sa vie, maintient ce look tendance qu'elle n'aurait jamais osé avant le cancer, et avant sa rencontre avec l'équipe de socio-esthéticiennes. "La maladie m'a ouvert une porte que je n'aurais jamais osé pousser moi-même, conclut-elle, mais sans le soutien de l'esthéticienne, je n'aurais pas sauté le pas."

ml/www.ipreunion.com

 

guest
0 Commentaires