Saint-Denis - Le tribunal correctionnel a souligné "la nécessaire liberté" du journaliste dans son "travail d'information"

La SIDR perd son procès contre Imaz Press Réunion

  • Publié le 30 septembre 2016 à 11:34

Ce 1er septembre 2016, le tribunal correctionnel a rendu son jugement concernant l'affaire opposant la SIDR à Imaz Press Réunion. La directrice de publication de notre organe de presse était poursuivie pour diffamation, à la suite d'un article rapportant des propos tenus en conférence de presse par Erick Fontaine, administrateur de la CNL (Confédération nationale du logement). Ce dernier dénonçait des menaces dont il aurait fait l'objet. Avant d'insister sur la " nécessaire liberté (des journalistes - ndlr) dans le cadre de leur travail d'information", le tribunal a souligné qu'Imaz Press a " fidèlement rapporté" les propos de l'administrateur de la CNL en étant "particulièrement prudent", et a mis fin à toutes poursuites à notre encontre.

Tout est parti d’un article publié le 30 juillet 2014. Intitulé "Saint-Denis – Projet de réhabilitation urbaine – Les locataires des Camélias dénoncent des manœuvres d’intimidation", il rapportait des propos tenus par Erick Fontaine, administrateur de la Confédération nationale du logement. Lors d’une conférence de presse, le responsable de la CNL assurait alors avoir "subi des menaces". Il affirmait ainsi : "quatre individus ont fait irruption pendant que je mangeais et m’ont demandé d’arrêter de m'occuper des locataires de Camélias sous peine de me faire la peau"... Le groupe d'habitations dont il est question appartient à la SIDR.

Le bailleur social a estimé que l’article publié sur notre site à l'issue de la conférence de presse, comportait des "passages gravement diffamatoires", pour lui et portait plainte contre Erick Fontaine d'une part, contre Imaz Press Réunion d'autre part le 21 octobre 2014.

Au cours de l'instruction du dossier le procureur de la République avait demandé le non lieu pour notre média. Le magistrat instructeur avait finalement renvoyé l'affaire devant le tribunal correctionnel. Le procès a eu lieu le 7 juillet dernier, le jugement a été rendu le 1er septembre et vient de nous être signifié.

Erick Fontaine ayant indiqué avoir effectivement tenus les propos reprochés a été déclaré coupable de diffamation. Il a été condamné à une amende de 500 euros et à verser un euro symbolique à la SIDR. Quant à la directrice de publication d'Imaz Press, le tribunal l'a renvoyée "des fins de la poursuite" et n'a donc pas retenu contre elle l'existence d'une quelconque diffamation.

Les magistrats ont très clairement motivé leur jugement. Ils commencent par rappeler qu'aux termes de l’article 10 alinéa 1 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales intitulé liberté d’expression : toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend  la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publique (…)". 

Ils ajoutent ensuite : "ces propos (ceux d'Erick Fontaine – ndlr) ont été tenus par un tiers à la rédaction, et fidèlement rapportés. M. Fontaine n’ayant  pas dénié les avoir tenus. Ils sont bien présentés comme les siens". Le tribunal souligne aussi : "le journaliste est particulièrement prudent et ne fait montre d’aucune animosité à l’égard de la partie civile, puisqu’il rapporte les accusations sur le mode conditionnel".

A méditer par les "Je suis Charlie" du dimanche devant les caméras

Ce constat fait écrire au tribunal : "il est acquis qu’un journaliste qui rapporte fidèlement les propos tenus par un tiers dans un cadre légitime d’information, ne saurait se voir reprocher de ne pas avoir vérifié la vérité des déclarations en application de l’article 10 de la Convention Européenne de Sauvegarde  des Droits de l’Homme".

Les magistrats expliquent ensuite : "en effet sanctionner un journaliste pour avoir aidé à la diffusion de déclarations émanant  d’un tiers dans un entretien, entraverait gravement la contribution de la presse aux discussions de problèmes d’intérêt général et ne saurait se concevoir sans raison particulièrement sérieuse"

La juridiction correctionnelle poursuit : "les journalistes qui rapportent les propos tenus par un tiers doivent bénéficier d’une nécessaire liberté dans le cadre de leur travail d’information". Et les magistrats concluent très justement : "le fait d’exiger de manière générale que les journalistes se distancient systématiquement et formellement du contenu d’une citation qui pourrait insulter des tiers, les provoquer ou porter atteinte à leur honneur, ne se concilie pas avec le rôle de la presse d’informer sur les faits  ou  des opinions et des idées (…)".

Clair, net, précis.

A méditer. Surtout par ceux – ils se reconnaitront et il ne s'agit pas de la SIDR -, proclamant "Je suis Charlie" un dimanche de manifestation en se dépêchant de renier leur profession de foi dès les caméras et les appareils photos éteints, les micros fermés et les carnets de notes des journalistes rangés…

www.ipreunion.com

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3 Commentaires
Ti-Louis
Ti-Louis
7 ans

Bravo à IPR et ses journalistes. Très précieux jugement qui pourra resservir pour bien d'autres cas semblables et, peut-être, dissuader les "Je suis Charlie … quand ça m'arrange" de saisir la justice sitôt que les journalistes font leur travail.

Encouragement
Encouragement
7 ans

Effectivement clair, net et précis! Un encouragement pour vous à continuer votre travail d'information .

CHABAN
CHABAN
7 ans

500 euros pour Mr Fontaine, qu'il continue le combat.

Continuez à nous informer !