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Motion de défiance, départ d'une plume: la situation se tend à L'Express

  • Publié le 14 octobre 2015 à 00:10

La situation s'est tendue mardi à L'Express où les salariés ont voté une motion de défiance contre leur nouveau propriétaire Patrick Drahi et le directeur des rédactions, Christophe Barbier, pour protester contre un vaste plan social, alors qu'une plume du magazine, François Busnel, a annoncé son départ.


Cette motion, en réaction à l'annonce faite la semaine dernière d'un plan social visant 125 salariés, a recueilli 115 voix pour et 85 contre, a-t-on appris de source syndicale.
Une partie de la rédaction a préféré cependant ne pas prendre pour cible Christophe Barbier, considérant qu'il peut la défendre. C'est pourquoi une autre motion de défiance, visant uniquement les actionnaires, a recueilli une majorité nettement plus franche (175 voix pour, 19 contre).
Depuis son rachat en juin par Patrick Drahi, le groupe L'Express (L'Expansion, Mieux vivre votre argent, Point de vue, Studio Cinélive, L'Etudiant, Lire...) subit une coupe claire dans ses effectifs. Au plan social qui doit voir le départ de 125 salariés, s'ajoutent 115 autres départs dans le cadre d'une clause de cession ouverte cet été.
Parmi eux, l'une des plumes du groupe : François Busnel, directeur de la rédaction de "Lire" et éditorialiste à L'Express, qui a annoncé son départ mardi. Autre figure de la rédaction, Renaud Revel, rédacteur en chef à "L'Express" et spécialiste des médias, a évoqué son départ en interne mais "n'a pas encore pris sa décision", a-t-il expliqué à l'AFP.
Au bout du compte, le groupe passera de 700 à 500 salariés, avec une réduction d'environ un tiers des effectifs des rédactions. 200 salariés (ceux de L'Etudiant et de la régie publicitaire) seront placés dans des filiales, avec une convention collective beaucoup moins favorable que celle de la presse.
Contactée par l'AFP, la direction du groupe Altice n'a pas fait de commentaires. Elle compte présenter son nouveau projet éditorial fin octobre.

- Christophe Barbier fragilisé -

Ce vote fragilise Christophe Barbier, rédacteur en chef emblématique du newsmagazine, nommé en juin à la tête des rédactions du groupe Altice Médias, qui a exprimé un soutien sans faille à la nouvelle direction.
Il a toutefois expliqué la semaine dernière sur France Inter être dans une "position schizophrénique". "Je suis à la fois avec la rédaction, car je suis journaliste, en même temps je suis directeur général délégué donc je contribue avec l'ensemble des managers, et avec le nouvel actionnaire, au redressement de ce groupe qui a des difficultés économiques graves". "C'est aussi douloureux socialement que c'est nécessaire économiquement", a-t-il ajouté, en promettant un magazine "beaucoup plus haut de gamme".
Pour lui, pas question de partir. "Je préfère accompagner ce PSE (plan de sauvegarde de l'emploi) plutôt que prendre mes sous et partir", avait-il expliqué fin septembre à l'AFP, au sortir d'une AG où il avait été fraîchement accueilli.
"Il reste à Christophe à se positionner", a commenté Jacques Trentesaux, délégué CFDT pour l'hebdomadaire. "Maintenant, à nous de trouver les arguments pour convaincre Patrick Drahi. Il commence à entendre le bruit qu'on fait. Il nous faut quelques millions pour relancer le titre", a expliqué le syndicaliste.
La motion votée mardi dénonce "des services entiers voués à disparaître et la contradiction flagrante entre l'objectif annoncé - des médias de grande qualité - et l'attribution des moyens". "Malgré nos demandes répétées, l'incertitude sur le devenir éditorial et la pérennité de nos titres se confirme", protestent les salariés.
Comme la plupart des magazines, L'Express, deuxième news magazine français après L'Obs, a vu ses recettes publicitaires et ses ventes reculer depuis trois ans, avec une baisse des ventes en France de 6% depuis douze mois. En 2014, l'ex-groupe L'Express-L'Expansion a perdu 9 millions d'euros.
Signe des difficultés de la presse magazine, cette motion intervient le jour même où les salariés du groupe Lagardère Active ont adopté une motion de défiance contre leur président Denis Olivennes. Ils protestent contre le "démantèlement du groupe", alors que la direction a annoncé la cession prochaine du mensuel "Parents" et évoqué d'autres cessions de titres jugés non stratégiques.

- © 2015 AFP
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