Actualités du monde

Al-Qaïda en Syrie enlève deux importants militants antirégime

  • Publié le 10 janvier 2016 à 19:22

Les jihadistes d'Al-Qaïda en Syrie ont enlevé dimanche deux militants antirégime très connus qui animent une radio dans la province d'Idleb, dans le nord-ouest du pays en guerre.


Dans cette même province, des raids samedi de l'aviation russe contre un bâtiment servant de prison d'Al-Qaïda ont fait 81 morts, selon un nouveau bilan fourni dimanche par l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH) et qui n'a cessé de s'alourdir.
Les militants Hadi al-Abdallah et Raëd Fares "ont été kidnappés le matin par le Front Al-Nosra (la branche syrienne d'Al-Qaïda), dans les locaux de la radio Fresh FM" à Kafranbel, a indiqué Soner Taleb, en charge des médias à la Coalition nationale syrienne, principale formation de l'opposition en exil.
Selon un communiqué de Fresh FM, les jihadistes ont envahi la radio, confisqué le matériel technique et les générateurs. "Ils ont rassemblé tous les drapeaux de la révolution et les ont brûlés devant l'équipe", puis ont emmené les deux responsables, très connus dans le pays depuis le début du conflit en mars 2011.
Le Front Al-Nosra reproche à la radio "son penchant laïque et favorable aux apostats". La radio diffuse localement des programmes politiques et de variétés ce qui ne plaît pas aux jihadistes, a dit M. Taleb.
Raëd Fares s'est rendu célèbre par ses pancartes, écrites souvent avec beaucoup d'humour, en anglais et en arabe, en soutien à la révolte contre le régime de Bachar al-Assad. Ses pancartes, qui critiquent aussi la passivité de la communauté internationale, sont largement diffusées sur les réseaux sociaux.
"Il est le fondateur de Fresh FM. Il n'a jamais porté d'arme (...) et aspire à un monde meilleur", a confié à l'AFP le militant Ibrahim al-Idlibi.
- 81 morts dans des raids russes -
Selon Ahmad Bouyouch, un employé de Fresh FM, "Raed c'est la révolution dans tous les sens du terme". A travers cet enlèvement, le Front Al-Nosra "veut terroriser. Il veut imposer sa vision du monde et a commencé par nous".
Sur ses comptes Twitter, le groupe jihadiste justifie les arrestations par le fait que Fresh FM diffuse "des idées maléfiques et immorales", a ajouté M. Bouyouch.
Les locaux de la radio ont déjà été visés dans le passé par les jihadistes, notamment par une voiture piégée une grenade.
Kafranbel est contrôlée depuis l'été 2015 par "l'Armée de la conquête", une coalition regroupant des organisations islamistes et le Front Al-Nosra.
Ailleurs dans la province d'Idleb, contrôlée en grande partie par les rebelles et les jihadistes, l'aviation russe a mené samedi des raids contre un bâtiment servant de prison au Front Al-Nosra dans la localité de Maaret al-Noomane.
Le bilan, qui était de 57 morts, "est monté à 81 morts, dont 52 civils et détenus", a précisé l'OSDH. Vingt-trois combattants d'Al-Nosra et six rebelles ont aussi péri dans les frappes, a ajouté l'ONG. Le centre de détention est situé près d'un marché populaire.
- Aides humanitaires lundi ? -
La Russie est intervenue fin septembre dans le conflit pour venir en aide aux troupes du régime face aux rebelles et aux jihadistes. Fin décembre, l'OSDH avait affirmé que les frappes russes avaient fait en trois mois 2.371 morts, dont près d'un tiers de civils.
La guerre en Syrie a été déclenchée par la répression de manifestations pacifiques réclamant des réformes. Opposant au départ le régime à des rebelles syriens elle s'est ensuite complexifiée avec l'implication de groupes jihadistes ainsi que des grandes puissances.
Plus de 260.000 personnes ont péri en près de cinq ans de conflit et des millions ont été poussés à la fuite, alors que la situation humanitaire y est catastrophique.
Selon le Comité international de la Croix-Rouge, une aide humanitaire doit en principe être acheminée lundi aux quelque 60.000 habitants au bord de la famine des villes assiégées de Madaya, dans la province de Damas, de Foua et de Kafraya, dans la province d'Idleb.
"Nous travaillons dur pour que (l'aide soit acheminée) lundi", a dit le porte-parole du CICR à Damas, alors que le Conseil de sécurité de l'ONU doit évoquer à huis clos la situation dans les trois villes ce même jour.

Par Glenn CHAPMAN - © 2016 AFP
guest
0 Commentaires