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Une conseillère agricole "traînée et tuée" dans une ferme aveyronnaise

  • Publié le 17 février 2016 à 23:40

Une jeune conseillère agricole a été "traînée et tuée" mercredi dans une ferme laitière aveyronnaise, où elle "serait morte étouffée, noyée", a déclaré le procureur, écartant a priori un lien avec l'actuelle crise de l'agriculture.


Son agresseur présumé, Xavier Espinasse, un éleveur de 47 ans, a été placé en garde à vue, tôt mercredi à Rodez, peu après la mort de la jeune Élodie dans l'exploitation laitière où elle était venue pour une visite sanitaire de routine.
Le drame s'est déroulé sur la ferme familiale des frères Espinasse au lieu-dit "Les Farguettes" à Mayran, une commune de 600 habitants de la campagne aveyronnaise à une vingtaine de kilomètres de Rodez.
La technicienne de la chambre d'agriculture de Rodez, spécialiste de contrôle laitier, venait d'achever son travail de conseil, lorsqu'elle a été "attaquée et agressée" par Xavier Espinasse, qui "l'a prise à bras-le-corps, l'a traînée vers un étang" situé à une centaine de mètres derrière la ferme, a indiqué le procureur Yves Delperié.
La jeune femme de 26 ans a été repêchée sans vie dans la retenue d'eau par les secours, appelés vers 8h du matin, soit une heure environ après les faits. Elle avait des "traces d'ecchymoses" mais "rien qui puisse entraîner la mort", a ajouté le magistrat devant la presse. "Les premières indications sont qu'elle s'est noyée", a-t-il conclu.
Le gardé à vue "ne donne aucune raison de son geste", a ajouté le procureur, ses "motivations sont extrêmement floues" et seule l'autopsie, prévue jeudi, dira avec certitude si la victime était morte avant d'être jetée dans l'étang.
Selon les déclarations de l'agresseur présumé, et en l'absence de témoin direct, il n'y a "pas eu d'altercation, pas de dispute, pas de contentieux", a encore rapporté M. Delperié, selon lequel une expertise psychiatrique serait conduite jeudi.
Le procureur a en revanche écarté, a priori, tout lien avec la crise que vit actuellement le secteur agricole. "Les premières déclarations de l'intéressé ne vont pas dans le sens du malaise du monde agricole", a-t-il dit.
La ferme familiale, qui produit du lait et de la viande, n'avait apparemment pas de difficultés financières, selon le voisinage.
Les deux frères vivaient seuls "enfermés" avec leur père de 78 ans, dont ils avaient repris l'exploitation, a rapporté à l'AFP Gilbert Pouget, qui avait employé Xavier Espinasse pendant une dizaine d'années comme saisonnier dans son entreprise de construction.
- 'pas de femme pour faire la soupe' -
"Il n'y avait même pas de femme pour faire la soupe", a-t-il lancé. "Ce sont deux frères qui s'engueulent tout le temps (...) ils ne sortent que pour la traite des bêtes", a expliqué ce voisin. Xavier "a dû péter un câble", il est "dépressif depuis le décès de sa mère, a ajouté M. Pouget, pas "étonné" par le drame.
"Ce n'est pas un problème d'argent", a encore déclaré l'entrepreneur. "Ici, la plupart des agriculteurs ont des emprunts, eux, ils payent toujours cash" pour leurs dépenses (tracteurs et autres), a-t-il ajouté.
Le maire de Mayran, Yves Mazars, agriculteur retraité, "ne pense pas non plus que les frères Espinasse avaient des problèmes d'argent". Il s'est dit "attristé" devant les journalistes, évoquant ses "voisins" comme une "famille très vaillante et tranquille".
Autour de la bâtisse en pierre, érigée le long de la départementale, on pouvait distinguer quelques hangars, des citernes de lait et des tas de fumier recouverts de bâches et de pneus.
Et la retenue d'eau entre les collines aveyronnaises, où le corps de la jeune femme a été retrouvé. Son décès a été déclaré à 09H00.
En attendant les détails de l'enquête, le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll n'avait pas souhaité "faire de lien entre ce fait gravissime et le contexte que l'on connaît".
Les agriculteurs multiplient depuis des semaines les actions pour dénoncer la faiblesse des cours de leurs productions.
Selon le président de la chambre d'agriculture d'Aveyron, Jacques Molières, la prestation de la jeune femme, initialement prévue lundi matin, avait été "décalée de deux jours, je ne sais pourquoi".
Il a expliqué à Centre-Presse que la conseillère était venue "assister à la traite du matin pour conseiller l'éleveur", non pas pour sanctionner, "mais pour aider, accompagner l'agriculteur".

Par Maja CZARNECKA et Michel VIATTEAU - © 2016 AFP
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