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Ambiance de règlement de comptes sur la loi travail, vers un probable 49.3

  • Publié le 10 mai 2016 à 14:42

Le gouvernement pourrait lever rapidement le suspense sur le recours au 49.

3 pour faire adopter la loi travail, les ultimes discussions mardi avec les socialistes semblant confirmer l'absence de majorité sur le projet et tournant au règlement de comptes.
Manuel Valls "n'a visiblement pas l'envie d'aller vers un compromis" en "refusant" de modifier son article le plus polémique (renforcement des accords d'entreprise par rapport aux accords de branche), a dénoncé mardi matin le chef de file des députés PS frondeurs, Christian Paul, à l'issue d'une réunion à Matignon avec le Premier ministre.
Surtout, il a évoqué un débat "collectif" chez les frondeurs sur leur position vis-à-vis d'une motion de censure si le gouvernement dégaine le 49.3, qui permet l'adoption d'un texte sans vote avec engagement de la responsabilité du gouvernement.
"Christian Paul a passé la ligne jaune en annonçant ce matin vouloir voter la censure de la droite en cas de 49.3", a immédiatement accusé le patron du PS, Jean-Christophe Cambadélis, sur Twitter. "Ce n'est pas digne", a répondu M. Paul, ajoutant dans un tweet: "Ne pas souffler sur les braises SVP".
Responsables PS et "frondeurs" se renvoient crescendo la responsabilité du blocage sur le texte, vanté comme "de progrès" par François Hollande, mais jugé "de régression" par une partie de la gauche, affaibli par la droite, et contesté depuis deux mois dans la rue.
Le président du groupe PS Bruno Le Roux espérait encore mardi matin "éviter" l'engagement de la responsabilité gouvernementale sur ce texte, susceptible d'"évoluer un peu".
Ce proche de François Hollande, qui recensait lundi "30 à 40" voix manquantes, a néanmoins averti: "Si jamais il y a une minorité qui veut empêcher la majorité d'avancer, il faudra bien adopter ce texte".
"Il faut savoir terminer les positions d'opposition systématique", a aussi jugé la ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine.
- Le 49. 3, "une brutalité" -
La réunion des députés socialistes à la mi-journée, en présence du Premier ministre, promettait d'être houleuse.
M. Valls pourrait y annoncer sa décision de dégainer le 49.3. L'exécutif, qui doit obtenir le feu vert du conseil des ministres avant de l'activer, y a eu recours trois fois pour faire passer la loi Macron en 2015.
"Les choses sont réglées", affirmait lundi soir une source gouvernementale. "On ne peut pas ne pas utiliser" cet outil vu les blocages sur l'article 2 sur les accords d'entreprise, et "les choses seront dites" dès mardi si ça "ne se dénoue pas", ajoutait cette source, selon laquelle "beaucoup de députés en ont marre et veulent qu'on arrête tout ça".
L'article 2, qui n'a pas été abordé lundi et sur lequel le rapporteur a proposé un nouveau "compromis", vise à donner la primauté à l'accord d'entreprise en matière de temps de travail. Il concentre plus d'un tiers des amendements et beaucoup de critiques à gauche, au-delà des "frondeurs", sur le risque d'ouvrir "des brèches énormes" dans une "course au moins-disant social", mais est au "coeur" du texte, selon Manuel Valls.
Si le gouvernement recourt au 49.3, le projet de loi est considéré comme adopté. Sauf si une motion de censure, déposée dans les 24 heures, est votée par l'Assemblée, obligeant le gouvernement à démissionner.
"Le 49.3 n'est pas un accélérateur mais une brutalité", a dénoncé mardi sur son blog le député apparenté PS Jean-Luc Laurent (MRC).
Décidé à déposer une motion de censure "pour condamner l'action du gouvernement" si le scénario se confirme, le chef de file du groupe LR, Christian Jacob a invité les "frondeurs" socialistes à "être cohérents" et voter la défiance "puisqu'ils bloquent et ne votent plus aucun texte".
Lundi, les débats avaient pris une tournure étrange, le gouvernement ayant repoussé, dès l'article 1er, les votes sur les amendements "jusqu'à nouvel ordre".
De quoi énerver une partie des députés et alimenter le sentiment d'un "simulacre", selon une formule de l'ex-ministre PS Aurélie Filippetti également employée par la droite et des écologistes, ou d'une "fébrilité" gouvernementale, aux yeux des centristes.
Les députés n'ont en théorie que jusqu'à jeudi soir pour débattre des quelque 5.000 amendements, avant le vote solennel, prévu le 17 mai.

Par Fran BLANDY, Francois BECKER - © 2016 AFP
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