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Autisme: l'Assemblée dit non à un texte "anti-psys", mais le débat pas clos

  • Publié le 8 décembre 2016 à 21:46

Pas question d'aller jusqu'à "condamner et interdire" la psychanalyse pour prendre en charge l'autisme : l'Assemblée a rejeté jeudi une proposition signée d'une centaine de députés LR mais le sujet, sensible, a provoqué de vifs débats et partagé les camps.


"Entreprise malheureuse", a lancé la secrétaire d?État chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre l'exclusion, Ségolène Neuville, regrettant que cette proposition de résolution ait "pour effet de raviver des tensions qui n'ont plus lieu d'être".
Hasard du calendrier, était remis jeudi le prix de l'Inserm au professeur de pédopsychiatrie Catherine Barthélémy pour ses 40 ans de recherche sur l'autisme. Elle-même est défavorable à une approche psychanalytique, par laquelle "on continue de soigner la mère".
Le texte de Daniel Fasquelle, paraphé par Laurent Wauquiez, Bernard Debré ou Nathalie Kosciusko-Morizet, entendait inciter le gouvernement à ne plus financer les traitements psychanalytiques et à pénaliser les professionnels de santé "qui s?opposent aux avancées scientifiques et commettent des erreurs médicales en matière d'autisme".
Une personne sur cent environ est touchée par ce trouble du neuro-développement précoce.
"Sortons du Moyen-Âge dans le traitement de l'autisme" pour éviter une nouvelle "crise" type "Mediator", a lancé à la tribune M. Fasquelle, défenseur des "méthodes éducatives et comportementales" recommandées par la Haute Autorité de santé (HAS) depuis 2012. Elles sont mises en oeuvre au Canada et en Belgique, où sont contraintes de se rendre des familles de sa circonscription du Pas-de-Calais.
"Les principales instances de la psychiatrie française d'obédience psychanalytique refusent d'appliquer" ces méthodes, a dénoncé ce coprésident du groupe d'études sur l'autisme de l'Assemblée, évoquant une "colère" des proches.
Mais il n'a trouvé le soutien d'aucun autre groupe politique, son collègue LR Nicolas Dhuicq, psychiatre de profession, épinglant même "un texte dépassé". "Il n'y a pas un autiste mais des autistes", donc une pluralité d'approches, et que le législateur impose des méthodes ou techniques aux soignants serait une "dérive dangereuse", selon lui.
- 'Amalgame psychanalyse-maltraitance' -
Il a été rejoint par des députés de tous bords, le socialiste Denys Robiliard invitant à ne pas définir de "science officielle" ni suivre "les préconisations d'un Lyssenko au petit pied", référence au généticien stalinien Trofim Lyssenko.
Gérard Sebaoun (PS), médecin, a aussi critiqué un "amalgame entre psychanalyse et maltraitance".
Les socialistes, élus du Front de gauche et centristes ont indiqué voter contre, mais avec des nuances, les radicaux de gauche s'abstenant.
Pour le PS, Philip Cordery, député des Français du Benelux, s'est élevé contre le texte, "non pas contre l'orientation générale mais parce qu'il divise par ses excès".
Au nom du groupe UDI, Meyer Habib, a refusé toute "interférence politique dans le contenu des soins" mais affirmé, après les débats, qu'il voterait en son "âme et conscience" pour la proposition.
Les principales associations dédiées à l'autisme, rassemblant notamment les familles (Agir et vivre l'autisme, Vaincre l'autisme, Asperger aide France, Maison de l'autisme...) avaient appelé à soutenir le texte. SOS autisme a déploré un "échec cuisant" après le rejet.
Les défenseurs de la psychanalyse avaient fustigé par avance un projet "funeste", "diffamatoire et calomnieux".
Les deux camps se sont affrontés par pétitions interposées sur la plateforme internet change.org, avec entre 5 et 6.000 signatures chacune.
Sans surtout jamais "prétendre faire de la médecine à la place des médecins", Mme Neuville, elle-même médecin, a martelé son "engagement total pour promouvoir les recommandations de bonnes pratiques" de la HAS, qui sont une simple aide aux praticiens.
Outre la défense d'une politique envers les autistes ayant déjà évolué, elle a rappelé le lancement en janvier de la concertation sur un 4e plan pluriannuel, qui prévoit de renforcer l'offre de scolarisation.
Et, avec le programme de François Fillon, "combien de postes seraient amenés à disparaître" dans l'Education nationale s'il était élu en 2017, a-t-elle lancé à la droite.

- © 2016 AFP
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