France

La fin des hydrocarbures largement approuvée à l'Assemblée, malgré des failles

  • Publié le 11 octobre 2017 à 00:27
  • Actualisé le 11 octobre 2017 à 08:50

L'Assemblée a adopté largement mardi, en première lecture, le projet de loi sur la fin de la recherche et l'exploitation des hydrocarbures en France d'ici 2040, texte aux lourds enjeux industriels et environnementaux mais jugé insuffisant par des ONG et certains groupes politiques. "La France signe une voie de sortie des énergies fossiles qui sera irréversible", s'est réjoui dans l'hémicycle le ministre de la Transition écologique et solidaire Nicolas Hulot, après le vote.


Le résultat initial de 316 voix pour, 69 contre et 47 abstentions a été revu à la hausse dans la soirée à 388 pour, 92 contre et 70 abstentions, le président de l'Assemblée François de Rugy expliquant qu'"un problème technique" avait empêché la prise en compte des délégations de vote. Le Sénat examinera le texte à partir du 7 novembre, en vue d'une adoption définitive d'ici à la fin de l'année. M. Hulot a souhaité dans un communiqué que le Sénat poursuive "l'enrichissement" du texte "dans le même esprit de consensus" que l'Assemblée.

La majorité et la Nouvelle gauche ont voté pour. Communistes et Insoumis se sont abstenus, les Constructifs se sont partagés, une majorité des Républicains a voté contre.
Pour son premier texte au Parlement, l'ancien militant écologiste s'est livré à un exercice d'équilibriste. Pour concrétiser la promesse d'Emmanuel Macron de "sortir la France des énergies fossiles" (pétrole, gaz, charbon...), le projet de loi prévoit de ne plus délivrer de nouveaux permis d'exploration d'hydrocarbures, liquides ou gazeux. Les concessions d'exploitation existantes ne seront pas renouvelées au-delà de 2040.

Chef de file LREM sur ce texte et ex-bras droit du ministre à la Fondation Hulot, Matthieu Orphelin a vanté "de vraies avancées, n'en déplaise à certains". L'ex-ministre de l'Ecologie Barbara Pompili (LREM, ex-écologiste) s'est dite sur Twitter "fière d'avoir participé aux débats pour une autre société".
Le MoDem Bruno Duvergé a salué "un texte historique par sa portée". "On va jusqu'au bout de la logique" de la transition énergétique, a renchéri le socialiste Christophe Bouillon.

Pour LR, Julien Aubert a ironisé à propos d'un texte traitant "0,00018%" de la production mondiale d'hydrocarbures. Seules 815.000 tonnes de pétrole sont produites par an, essentiellement dans les bassins parisien et aquitain, soit 1% de la consommation nationale. "Vous traitez de la production, pas de la consommation. Vous mettez la charrue avant les boeufs", a-t-il aussi déclaré. Des voix divergentes se sont fait entendre dans chaque groupe, comme chez les socialistes, où David Habib (Pyrénées-Atlantiques) est convaincu qu'"aucun pays au monde ne suivra la France".

- "Truffé de trous" -

Dans l'hémicycle la semaine dernière, les députés ont cependant voté des exceptions, au motif de mieux "sécuriser" juridiquement le projet de loi. Ainsi la production pourra se poursuivre au-delà de 2040 si l'industriel titulaire d'un permis n'est pas rentré dans ses frais par rapport aux recherches préalables.
Une autre dérogation a été votée pour permettre la poursuite de l'exploitation du soufre du bassin de Lacq, sous l'impulsion de députés des Pyrénées-Atlantiques et au nom de l'emploi.

"Ce projet de loi est truffé de trous", a regretté Loïc Prud'homme (LFI), concluant son intervention par un appel à "Make Nicolas Hulot green again", écho à l'appel d'Emmanuel Macron au président américain Donald Trump, qui a décidé de s'affranchir de l'accord de Paris sur le climat. Globalement, Les Amis de la Terre, Attac France et 350.org jugent que "l'Assemblée nationale gâche une opportunité unique".

Pour Europe-Ecologie-Les Verts, "la riposte des lobbies pétroliers a conduit à nombre de reculs". Les industriels se sont conduits "en représentants de commerce" à tous les niveaux de décision, ont dit à l'AFP plusieurs parlementaires. Même si jusqu'à ses plus farouches opposants au Palais Bourbon ont salué sa capacité d'"écoute", le ministre ne sort pas indemne de ces débats.

L'ex-titulaire du portefeuille, Ségolène Royal (PS), a tiré dimanche une "petite sonnette d'alarme" sur plusieurs de ses dossiers, dont celui des hydrocarbures.
Peu avant le passage du projet de loi, Nicolas Hulot a en effet prolongé un permis exclusif d'exploration détenu par Total au large de la Guyane, ce à quoi Ségolène Royal a dit s'être refusée malgré de "très fortes pressions".
 

AFP

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