Agressions sexuelles

La parole mondiale libérée sur Twitter

  • Publié le 16 octobre 2017 à 22:27
  • Actualisé le 16 octobre 2017 à 23:03

#MoiAussi, #balancetonporc, #quellavoltache (cette fois où?) en italien)... La parole se libère dans le monde entier à coups de mots-dièse sur Twitter pour dénoncer les agressions sexuelles et provoquent des centaines de commentaires.


L'actrice américaine Alyssa Milano ("Madame est servie", "Charmed") a posté samedi un message incitant les femmes victimes de harcèlement sexuel à témoigner sur Twitter en utilisant le mot-dièse "#MeToo" (#MoiAussi) dans le contexte de l'affaire Harvey Weinstein. Le célèbre producteur est accusé de viol, d'agression ou de harcèlement sexuel par de nombreuses comédiennes qui ont brisé le silence sur un comportement qui dure depuis des années. M. Weinstein a nié toutes les accusations de relations sexuelles non consenties.
"Si vous avez été harcelée ou agressée sexuellement, écrivez +moi aussi+ dans votre réponse à ce Tweet", a lancé Alyssa Milano depuis son compte @Alyssa_Milano, qui n'a pas porté d'accusations contre le producteur déchu.


- Honte à l'agresseur -


L'initiative a rencontré un fort écho mondial auprès de femmes, anonymes ou non, qui semblent évoquer pour la première fois leur expérience en public.

En Grande-Bretagne, le mot-dièse a notamment été utilisé par la député travailliste Stella Creasy. "J'ai été harcelée comme des millions de femmes et de filles dans le monde. La honte est sur les agresseurs, pas sur moi", a-t-elle écrit dimanche.

En Tunisie, plusieurs femmes ont repris lundi le mot-dièse tel quel, arabisé ou francisé, pour décrire les incidents dont elles ont été victimes dans la rue, au travail ou dans les transports, ou pour dénoncer une "culture du viol" banalisée.

En Egypte, où le mot-dièse s'est aussi propagé (#MeToo, ), les femmes partagent leurs expériences de harcèlement sexuel, un fléau qui sévit largement dans le plus grand pays du monde arabe. Selon une étude de l'ONU, 99,3% des Egyptiennes affirmaient en 2013 avoir été victime d'au moins une forme de harcèlement, et 82,6% estimaient ne pas être en sécurité dans les rues.

En France, un appel semblable à dénoncer le harcèlement sexuel au travail est lui aussi devenu viral ces derniers jours sur Twitter. Sous le mot-clef #balancetonporc, la journaliste Sandra Muller invite à raconter, "en donnant le nom et les détails, un harceleur sexuel que tu as connu dans ton boulot". Beaucoup de femmes racontent aussi celles du quotidien, les attouchements dans les transports, les injures.

L'actrice et réalisatrice italienne Asia Argento, qui accuse M. Weinstein de l'avoir violé en 1997, a repris dimanche soir le mot-dièse #balancetonporc, en lançant sa version anglaise: #denounceallpigs. Elle a aussi utilisé le mot-dièse #quellavoltache (cette fois où?) pour accuser "un grand réalisateur d'Hollywood avec un complexe de Napoléon" de l'avoir drogué pour ensuite abuser d'elle alors qu'elle avait 26 ans et "un réalisateur/acteur italien" d'avoir "sorti son pénis devant moi quand j'avais 16 ans".

Lancé vendredi soir par la journaliste italienne Julia Blasi, #quellavoltache a donné lieu à une série de récits courts ou longs, pratiquement jamais sans aucun nom, dénonçant des mots glaçants, des gestes déplacés, des agressions, des viols. Christiana Stradella évoque notamment "cette fois où un homme a tenté de me traîner dans le vestibule d'un immeuble. +C'est ta faute, tu es trop mignonne+. J'avais 10 ans".


- Briser un tabou -


Le mouvement lancé par Alyssa Milano n'est pas le premier. La mannequin new-yorkaise Cameron Russell, 30 ans, a invité la semaine dernière ses homologues à partager leurs expériences d'agressions sexuelles sous le mot-dièse #MyJobShouldNotIncludeAbuse ("mon métier ne devrait pas inclure d'abus"). Sa page Instagram a déjà récolté environ 820 témoignages.

L'Ukrainienne Anastasia Melnytchenko a lancé en 2016 le mot-dièse #Jen'aipaspeurdeparler en ukrainien et en russe. La militante pour les droits de la femme a inspiré plusieurs centaines de femmes russes, ukrainiennes, mais aussi arméniennes ou azerbaidjanaises, qui ont évoqué des traumatismes aggravés par le tabou qui règne dans leurs sociétés face aux victimes de violences sexuelles.

En 2014, la campagne (#OuiToutesLesFemmes) avait été lancée après qu'un homme jugé pour des meurtres en Californie avait motivé ses actes par sa haine envers les femmes. En 2012, la militante féministe britannique les actes sexistes subies dans leur vie de tous les jours.

En France, le gouvernement veut présenter l'an prochain au Parlement un projet de loi "contre les violences sexistes et sexuelles", et notamment harcèlement de rue. Le président Emmanuel Macron a promis dimanche une "procédure de verbalisation plus simple" des actes de harcèlement "pour qu'il y ait une réponse immédiate", en déplorant que les femmes n'osent actuellement pas porter plainte.
AFP

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