D'un cancer

Détenu 40 ans pour le meutre d'un enfant, Patrick Henry est mort

  • Publié le 3 décembre 2017 à 20:38
  • Actualisé le 3 décembre 2017 à 20:51

Il avait été libéré en septembre après 40 ans passés en prison pour la mort d'un enfant, un crime resté dans les mémoires: Patrick Henry, devenu symbole du combat pour l'abolition de la peine capitale à laquelle il avait échappé de justesse, est mort dimanche à 64 ans d'un cancer.


Depuis la suspension de sa peine pour raisons médicales le 15 septembre, celui qui était un des plus vieux et des plus célèbres détenus de France vivait dans le Nord, où son amie Martine Veys, une visiteuse de prison âgée de 67 ans, lui avait trouvé un logement.
"Il est mort dimanche à 10H30 au CHU de Lille d'un cancer du poumon", a annoncé à l'AFP cette femme qui le soutenait, avec son conjoint, depuis 1992.
Le jour de sa sortie de prison, l'avocat de Patrick Henry, Hugo Lévy, avait déclaré: "Il a le visage émacié de celui qui voit la mort s'approcher".
Depuis sa condamnation à la perpétuité en 1977, cet homme né à Troyes (Aube) le 31 mars 1953 avait vieilli à l'ombre des prisons de Caen, Val-de-Reuil, Saint-Maur puis Melun.
Son crime: le meurtre du petit Philippe Bertrand, 7 ans, enlevé le 31 janvier 1976 à la sortie de l'école de Pont-Sainte-Marie, près de Troyes, contre une demande de rançon.
Le jeune VRP avait ensuite étranglé le petit garçon, avant de cacher son corps sous le lit d'une chambre d'hôtel. Gardé une première fois à vue puis relâché, il avait expliqué à la presse qu'il faudrait tuer les assassins d'enfants.
Ce crime crapuleux et cynique avait provoqué en France une émotion et une polémique considérables. "La France a peur", lançait le présentateur du JT Roger Gicquel au soir de la découverte du cadavre de l'enfant, le 17 février 1976.


- Rédemption manquée -


Glacial pendant son procès, l'accusé n'avait sauvé sa tête que grâce à la plaidoirie historique de l'avocat Robert Badinter, ardent opposant à la peine de mort et qui obtiendra en 1981 son abolition en tant que garde des Sceaux de François Mitterrand.
Aux jurés de la cour d'assises de l'Aube qui avaient décidé de l'épargner, le jeune homme blond à grosses lunettes avait lancé: "Vous n'aurez pas à le regretter!". "Depuis, cette promesse m'a servi de bâton de pèlerin pour parcourir les vingt années suivantes", confiait-il en 1996.
Pourtant, le parcours judicaire de Patrick Henry apparaît comme celui d'une rédemption manquée.
Libéré pour bonne conduite en 2001, l'ex-détenu devenu informaticien est arrêté pour vol à l'étalage l'année suivante. Quelques semaines plus tard, il est ensuite de nouveau interpellé en Espagne, cette fois avec 10 kilos de cannabis. Une affaire qui lui vaut un retour en prison.
Depuis, le détenu avait demandé à plusieurs reprises, sans succès, une libération conditionnelle. En 2011, il avait même entamé une grève de la faim.
Patrick Henry, qui avait abandonné l'école en 5e avant de s'orienter vers un CAP de cuisine, a obtenu en prison son bac scientifique par correspondance, puis une licence de mathématiques et un DUT d'informatique. Il se disait convaincu que s'il avait reçu plus tôt une culture générale, il n'aurait pas été un assassin.
Ses codétenus se rappelaient, eux, un homme détesté pour son crime, au comportement de pacha dont le centre de détention de Caen était le royaume. Il a d'ailleurs aussi été condamné en prison en 1989 pour trafic de drogue.
Pour son amie Martine Veys, qui évoquait dimanche "la haine véhiculée par son nom", Patrick Henry, depuis sa libération de prison et "malgré la douleur physique et la lourdeur des soins, a eu des moments de bonheur comme jamais il n'en a connu".

Par Sippachai KUNNUWONG - © 2017 AFP

guest
0 Commentaires