On ne court plus, on marche

Le football en marchant commence à faire bouger les seniors français

  • Publié le 26 décembre 2017 à 23:08
  • Actualisé le 27 décembre 2017 à 05:37

Interdiction de courir ! Le football en marchant, ou "walking football", de plus en plus populaire au Royaume-Uni, a débarqué en France dans les valises d'expatriés britanniques, qui souhaitent maintenant développer ce sport, principalement destiné aux plus de 50 ans.


C'est un choc des générations qui se joue en cette fraîche soirée de décembre, sous l'éclairage jaunâtre du gymnase de Saint-Jean-Brévelay (Morbihan) : un match de football pas comme les autres entre les jeunes de la section sportive départementale et leurs adversaires, aux cheveux blancs et ventres rebondis.

Sur le papier, les chances sont maigres pour les anciens, âgés de 52 à 70 ans, mais les règles du football en marchant nivellent un peu les valeurs. La première : défense absolue de courir, sous peine d'être sanctionné d'un coup franc ou d'un carton, en cas d'infractions répétées. Le ballon ne doit pas non plus dépasser la hauteur de la tête et les tacles ne sont pas autorisés. De quoi déstabiliser les plus jeunes, contraints de réprimer leur instinct.

"C'est difficile de ne pas courir, il faut bien jouer dans les pieds et ne pas mettre de balles en profondeur. C'est super de découvrir un autre sport, qui donne aux personnes âgées l'opportunité de jouer", témoigne Alan, du haut de ses 14 ans, soit presque cinq fois moins que l'un de ses adversaires du soir, Jeff Smith.

Installé en France depuis quelques années avec sa femme, ce retraité de 68 ans a fondé en 2016 l'Association bretonne de football en marchant, afin de faire connaître ce sport. Inventeurs du beau jeu, les Anglais sont aussi à l'origine de sa version douce, très populaire au Royaume-Uni où l'on compte un millier de clubs.

"Elle n'est malheureusement pas encore très populaire auprès des Bretons et des Français", regrette Jeff Smith, soucieux que son association ne soit pas "perçue comme un groupe d'expatriés".

- Sociabilité et santé -

Alors que quelques équipes se montent dans plusieurs autres régions françaises, le sexagénaire a réussi à attirer l'attention de la Fédération française de football, à travers le district du Morbihan, qui suit de près l'implantation du football en marchant dans le département. "Cette pratique est intéressante dans l'optique du sport santé, afin de continuer une activité après un certain âge. Il est recommandé de marcher une demi-heure par jour. Là, c'est un peu plus intense, mais aussi plus motivant pour des passionnés de football", explique Gwendal Le Breton, conseiller technique du Morbihan.

S'il ne jouait pas au "walking football", John, expatrié anglais de 55 ans, passerait sans doute son temps "à jardiner pendant l'été ou devant la télé l'hiver". "Il n'y a pas beaucoup d'autres choses à faire par ici. Nous sommes après tout venus en France pour profiter de son train de vie tranquille", note-t-il.

Le doyen de l'équipe, un autre John, 70 ans, semble à bout de souffle après quelques minutes de jeu, mais il assure que le football en marchant, qu'il pratique en plus de la pétanque ("un sport encore moins difficile"), lui permet de "(se) sentir mieux au quotidien". "Les bienfaits du sport chez les personnes âgées sont très diversifiés et dépendent de chaque individu", explique Raymonde Feillet, chercheuse et auteure de "Souci du corps, sport et vieillissement" (Érès).

"Le sport aide évidemment sur les plans musculaire et cardiaque à lutter contre l'arthrose, ou l'ostéoporose chez les femmes, à brûler les mauvais cholestérols, mais aussi en terme de sociabilité, puisqu'il permet de faire des rencontres." Elle observe que les pratiques ont largement évolué ces 25 dernières années : "Les seniors ne se contentent plus de gym douce. On en voit de plus en plus faire du canoë, de la plongée, du VTT ou du parapente." Même si les risques, articulaires, ligamentaires ou cardiaques, "augmentent logiquement avec l'âge".

Bob, qui a joué plusieurs années au football en marchant chez lui, au Pays de Galles, avant de débarquer en Bretagne, confie n'avoir vu qu'une seule crise cardiaque sur le terrain.... "Un homme de 45 ans". Le corps humain est imprévisible.

AFP

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