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Guerre commerciale: Pékin et Washington se rendent coup pour coup

  • Publié le 23 mars 2018 à 21:15

Washington qui envisage de taxer les importations chinoises à hauteur de 60 milliards de dollars, Pékin qui réplique en menaçant le porc et les fruits américains et, maintenant, une bataille devant l'OMC: la Chine et les États-Unis poursuivaient vendredi leur bras de fer commercial.


Concrétisant une menace brandie jeudi par le président Donald Trump, le représentant américain au Commerce a indiqué dans un communiqué avoir déposé une "demande de consultation" avec Pékin devant l'Organisation mondiale du commerce à propos de "certaines mesures chinoises relatives à la protection des droits de propriété intellectuelle".
Washington reproche depuis longtemps à la Chine de tirer profit du système de coentreprises imposé aux entreprises étrangères qui s'implantent chez elle pour piller les innovations technologiques américaines.
Donald Trump avait d'ailleurs fustigé "le vol de propriété intellectuelle américaine par les Chinois" en brandissant jeudi la menace de sanctions sur les importations chinoises pouvant atteindre 60 milliards de dollars.
L'administration américaine a désormais 15 jours pour publier une liste de produits qui seront frappés.
- Fruits et viande de porc -
La Chine a répliqué en dévoilant une liste de 128 produits, ou lignes tarifaires, sur lesquelles elle appliquera des droits de douane de 15% à 25%, en cas d'échec des négociations.
Ces échanges de coups entre les deux premières puissances mondiales ont envoyé par le bas les Bourses chinoises, avec des pertes allant de 2,45% à 4,49% vendredi.
Les autres grandes places mondiales ne faisaient pas vraiment meilleure figure: Tokyo a perdu 4,51% en clôture et à la mi-journée en Europe, Paris et Francfort étaient nettement dans le rouge.
L'affrontement des deux premières puissances économiques mondiales se fait pourtant à fleurets plutôt mouchetés pour l'instant. Les produits américains ciblés par la Chine, par exemple les fruits, la viande de porc ou l'aluminium, pèsent à peine 2% du total des exportations américaines vers ce pays.
Et côté américain, les nouvelles sanctions sont avant tout un "prélude à une série de négociations", a assuré le ministre du Commerce, Wilbur Ross.
Un haut responsable américain a toutefois précisé ensuite que Washington ne voulait pas "ouvrir un dialogue" mais bien instaurer un rapport de force en "donnant à la Chine une certaine motivation pour ouvrir davantage ses marchés" aux produits américains.
Si les actes restent modérés, la rhétorique, elle, est toujours plus belliqueuse dans chaque camp :"si une guerre commerciale devait être lancée par les États-Unis, la Chine se battrait jusqu'au bout pour défendre ses propres et légitimes intérêts par tous les moyens nécessaires", avait menacé dès jeudi soir l'ambassade de Chine à Washington.
"L'ère de la reddition économique a cessé", s'est félicité de son côté le vice-président américain, Mike Pence.
Washington déplore un déficit commercial colossal avec Pékin (375,2 milliards de dollars en 2017 selon les douanes chinoises).
- Fragile armistice sur le front européen -
Au-delà du duel entre Washington et Pékin, les Européens, eux aussi très inquiets du risque d'une guerre commerciale généralisée, ont fait savoir qu'ils ne désarmaient pas.
L'Union européenne "se réserve" toujours le droit de répliquer à d'éventuelles taxes américaines sur l'acier et l'aluminium si elle n'en est pas exemptée de manière "permanente", ont averti vendredi dans une déclaration conjointe les dirigeants européens, réunis en sommet à Bruxelles.
Sur cet autre front, celui de la taxation de ces deux métaux très stratégiques, l'administration Trump a joué la carte de l'apaisement avec plusieurs de ses principaux alliés, dont l'UE, en annonçant la suspension de ces taxes jusqu'au 1er mai.
Elle a souligné que c'était bien la Chine, depuis longtemps en surproduction, qui était la première visée par ces taxes de 25% sur l'acier et de 10% sur l'aluminium. Et ce bien que Pékin ne fournisse que 2% de l'acier importé aux États-Unis, et moins de 10% de l'aluminium.

Par Anne BEADE - © 2018 AFP
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