Yémen

La ville de Hodeida aux mains des rebelles se prépare à la guerre

  • Publié le 19 juin 2018 à 19:34
  • Actualisé le 19 juin 2018 à 21:31

Monticules de sable, va-et-vient de véhicules militaires, habitants vivant dans l'angoisse: la ville portuaire de Hodeida tenue par les rebelles, dans l'ouest du Yémen, attend dans la fébrilité un assaut des forces progouvernementales.


Ahmed vit dans le sud de Hodeida, dans un quartier voisin de l'aéroport où ont pénétré mardi les forces progouvernementales sur fond d'intenses combats avec les rebelles Houthis. Jusque-là, le jeune Yéménite avait résisté à l'idée de fuir, il croyait qu'une solution politique pouvait encore être trouvée pour épargner sa ville. Mais ses espoirs ont été douchés mardi avec l'intensification des affrontements dans le secteur de l'aéroport.

"L'écho des violents combats résonne depuis ce matin. Des familles qui voulaient fuir n'ont pas été en mesure de partir à cause de ça", a-t-il raconté à l'AFP par téléphone. Ahmed a passé les derniers jours derrière sa fenêtre à guetter l'avancée des combats. Lorsque les oiseaux perchés sur son toit s'envolaient soudainement, il savait qu'un obus était tombé pas très loin.

A la faveur d'une offensive lancée le 13 juin, les forces progouvernementales yéménites, soutenues par une coalition emmenée par l'Arabie saoudite qui les appuie depuis 2015, tentent de déloger les rebelles de Hodeida, une ville aux mains des insurgés depuis 2014.
Depuis, les forces loyalistes ont rapidement progressé le long de la côte vers l'aéroport, situé à la limite sud de Hodeida, même si les rebelles opposent une farouche résistance.

Après plusieurs jours de combats sporadiques, les affrontements ont gagné en intensité mardi quand les forces loyalistes ont lancé l'assaut sur l'aéroport.
Il s'agit des combats les plus violents depuis le début de l'offensive, assure Ahmed.

- "Très tendue" -

Hodeida, située sur la mer Rouge, est la principale porte d'entrée pour les importations et l'aide humanitaire destinée à une population éprouvée par plus de trois années de guerre.

Alors que la ville compte quelque 600.000 habitants, l'offensive des forces progouvernementales fait craindre une interruption de la livraison des aides, alors que l'ONU estime déjà que le pays connaît "la pire crise humanitaire du monde". Comme Ahmed, d'autres habitants de Hodeida avaient l'espoir qu'un règlement politique serait trouvé in extremis à l'occasion de la visite ce week-end de l'émissaire des Nations unies, Martin Griffiths, dans la capitale Sanaa, également tenue par la rébellion.

Mais le responsable onusien est reparti mardi, sans faire de déclarations, se heurtant visiblement à l'intransigeance des belligérants. Le Premier ministre de l'administration rebelle, Abdel Aziz ben Habtour, avait insisté dimanche devant M. Griffiths sur le fait qu'il n'était pas question d'accepter une trêve dans les conditions actuelles.

Les Emirats, autre membre important de la coalition, ont exigé lundi de leur côté un retrait "sans condition" des insurgés de Hodeida pour mettre un terme à l'offensive contre la ville. Signe que les combats sont attendus très prochainement dans la ville, les rebelles ont commencé lundi à couper les principaux axes de la ville avec des monticules de sables, a indiqué à l'AFP un habitant ayant requis l'anonymat

La circulation était paralysée mardi, selon lui. "La situation est très tendue", a renchéri un autre habitant. Les rebelles "interdisent à quiconque de prendre des photos avec un téléphone portable dans la rue". La perspective de combats à Hodeida fait craindre un nouveau déplacement de population.

Environ 32.000 personnes ont quitté leur foyer dans toute la province depuis le 1er juin, dont environ 3.000 dans la ville même d'Hodeida, selon l'ONU.
Le flux de déplacés fuyant à bord de voitures et de bus est continu, raconte Mohamed, un habitant du centre de Hodeida. "Ce sont les pires jours depuis le début de la guerre", confie Abir Mohamed. "Les avions volent jour et nuit au dessus de nos têtes". "Pour l'instant, la ville est assez sûre mais nous ne savons pas combien de temps cela va durer", s'inquiète cette habitante.

AFP

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