Moyen-Orient

Israël poursuit la traque en Cisjordanie, Netanyahu sous pression

  • Publié le 14 décembre 2018 à 14:58
  • Actualisé le 14 décembre 2018 à 16:35

Les forces israéliennes traquent vendredi les auteurs du dernier en date d'une série d'attentats palestiniens, qui remet en cause des mois de calme relatif en Cisjordanie occupée et soumet le Premier ministre Benjamin Netanyahu aux ultimatums de sa droite.

Territoire occupé depuis plus de cinquante ans et où 400.000 colons mènent une coexistence souvent conflictuelle avec plus de 2,5 millions de Palestiniens, la Cisjordanie a connu jeudi sa troisième attaque anti-israélienne en deux mois. La presse israélienne se demande, comme la une du quotidien Yediot Aharonot, "comment éviter une intifada", du nom de soulèvements palestiniens passés. Deux soldats ont été tués et un soldat et une civile grièvement blessés jeudi quand un homme descendu de voiture a ouvert le feu contre un arrêt de bus près de la colonie de Givat Assaf, non loin de Ramallah, dans un secteur où les implantations israéliennes jouxtent les localités palestiniennes. Le tireur a pris la fuite. L'armée a ensuite annoncé l'envoi de renforts. Ramallah, siège d'autorités palestiniennes aux pouvoirs restreints par l'occupation, a été bouclée.

Des heurts entre Palestiniens et forces israéliennes ont éclaté à différents endroits. Des colons criant vengeance ont caillassé des véhicules palestiniens. Le chauffeur arabe d'un bus public israélien a été sévèrement battu par des ultra-orthodoxes juifs à Modiin Illit. Vendredi, un soldat israélien a été sérieusement blessé dans une nouvelle attaque près de la colonie de Beit El par un Palestinien à l'aide d'une arme blanche et d'une pierre, a indiqué l'armée. La Cisjordanie va au-devant de violences potentielles, les mouvements palestiniens, dont le groupe islamiste Hamas, ayant appelé à manifester après la prière hebdomadaire. Le Hamas a revendiqué l'attentat qui a tué deux Israéliens le 7 octobre et, un autre dimanche qui a causé la mort d'un bébé, provoquant un vif émoi. Israël voit la main du Hamas dans l'attaque de jeudi.

Effet de balancier ?

Le Hamas gouverne la bande de Gaza, territoire distant de quelques dizaines de kilomètres de la Cisjordanie. Ses activités ont été jugulées en Cisjordanie, à la fois par Israël et par l'Autorité palestinienne, à couteaux tirés avec le Hamas. La température augmente en Cisjordanie au moment précis où elle retombe à Gaza après des mois de violences à la frontière qui ont causé la mort de plus de 230 Palestiniens. Le Hamas active des cellules réduites en Cisjordanie, avec trois objectifs, écrit le quotidien Israel Hayom: "Se venger de la situation à Gaza, saper les positions de l?Autorité palestinienne, poursuivre le jihad contre Israël". Le Hamas, qui refuse l'existence d'Israël, fête le 31e anniversaire de sa création vendredi. "L'ennemi ne doit rêver ni de sécurité, ni de stabilité en Cisjordanie", a-t-il juré. Les forces israéliennes ont abattu cette semaine deux Palestiniens auteurs ou impliqués dans les attaques d'octobre et de dimanche, et membres du Hamas. Poursuivant leur chasse à l'homme, elles ont arrêté dans la nuit une quarantaine d'agents du Hamas selon elles. Après avoir frôlé une nouvelle guerre, Israël et le Hamas ont conclu un cessez-le-feu à Gaza le 13 novembre. Mais M. Netanyahu a fait passer un message au Hamas: pas de trêve à Gaza en même temps que des violences en Cisjordanie, selon les médias.

"Des canards"

M. Netanyahu, à la tête d'une majorité réduite au minimum précisément par l'opposition d'une partie de sa coalition au cessez-le-feu à Gaza, fait face à présent aux pressions des colons et à leurs avocats, auquel son gouvernement fait la part belle. Il a annoncé jeudi vouloir "légaliser" des milliers de logements de colons dépourvus des autorisations nécessaires en Cisjordanie. Toutes les colonies en Cisjordanie sont illégales au regard du droit international. La colonisation, qui rogne peu à peu les territoires sur lesquels les Palestiniens souhaitent créer leur Etat, est aussi considérée par une grande partie de la communauté internationale comme un obstacle majeur à une paix de plus en plus élusive. Israël distingue lui entre les colonies qu'il a approuvées et d'autres, dites "sauvages". Pour la majorité des colons, la Cisjordanie -ou Judée-Samarie- doit faire partie intégrante d'Israël, pour des raisons religieuses ou idéologiques.

M. Netanyahu a ordonné plus de troupes et plus de checkpoints sur les routes de Cisjordanie. Il veut que les maisons d'auteurs d'attentat puissent être détruites sous 48 heures. Il a décidé un recours accru à la pratique controversée de la détention sans inculpation ni procès. C'est encore insuffisant pour la frange la plus à droite des colons. Des centaines d'entre eux ont manifesté jeudi devant la résidence du Premier ministre, où son nom a été conspué.
Les exigences vont de la fermeture des routes de Cisjordanie pour les Palestiniens aux mesures de rétorsion contre la population palestinienne, en passant par une opération militaire d'envergure. "S'ils (les Palestiniens) continuent à se déplacer librement et à nous massacrer comme des canards, ce gouvernement n'a pas de raison d'exister une journée de plus", a dit le député nationaliste religieux Bezalel Smotrich, lui-même un colon.

© 2018 AFP

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