Prisons

A Condé-sur-Sarthe, des surveillants en colère au lendemain de la prise d'otages

  • Publié le 12 juin 2019 à 18:01
  • Actualisé le 12 juin 2019 à 18:56

Des surveillants de la prison de Condé-sur-Sarthe (Orne) ont manifesté et refusé de prendre leur service mercredi pour demander des "réponses concrètes" en termes de sécurité et en soutien à leurs collègues, au lendemain d'une nouvelle prise d'otages de deux d'entre eux par un détenu, dans ce centre pénitentiaire ultra-sécurisé.

"On a décidé de ne pas prendre le service ce matin à 7H00 en soutien à nos collègues", a déclaré à l'AFP Frédéric Eko, membre du Snepap-FSU, précisant qu'une rencontre avec la direction n'avait "rien donné" et que des discussions étaient en cours sur la suite à donner au mouvement.

"Nous demandons plus d'écoute, car nous savions que ce détenu allait passer à l'acte, il avait changé de comportement et nous avions fait remonter l'information. Pourtant, il était classé auxiliaire, c'est-à-dire qu'il aidait à servir les repas, à faire le nettoyage, tout cela pour acheter la paix sociale", a-t-il ajouté.

Une cinquantaine de personnels ont pris position devant le centre pénitentiaire mercredi matin mais ils n'étaient plus qu'une dizaine en début d'après-midi, selon les syndicats et l'administration pénitentiaire.
Selon Olivier Pothin (FO), seuls "des stagiaires" sont entrés ce mercredi dans la prison, où le service "est réduit au maximum".

Contactée par l'AFP, l'administration pénitentiaire a indiqué que la situation "ne semblait pas évoluer vers un blocage de l'établissement, comme en mars après l'agression au couteau de deux surveillants par un détenu radicalisé, un événement qui avait provoqué un vaste mouvement social dans les prisons françaises. "Une partie du personnel de nuit est toujours à l'intérieur, d'autres ont pu partir et d'autres entrer avec le service de 13H00", a-t-elle précisé sans être en mesure de fournir de chiffres.
Le directeur de l'établissement Jean-Paul Chapu est venu à la rencontre des surveillants, les encourageant à discuter entre eux "pour verbaliser" ce qui s'est passé, tout en leur rappelant l'obligation "d'aller travailler".

- Incarcéré depuis ses 16 ans -

"On nous demande de faire remonter toutes les informations auprès de la direction mais cela n'est pas suivi de mesures. Quand un détenu est susceptible de passer à l'acte, nous voulons qu'il soit isolé des autres", insiste Frédéric Eko, qui demande des "réponses concrètes de la direction" et déplore que le matériel qui devait être livré ne l'ait été "qu'en partie" ou alors sans formation.
"C'est comme si on donnait une arme à un agent et qu'on lui disait de se débrouiller avec, c'est de la négligence", assure le syndicaliste.

La prise d'otages s'est déroulée mardi soir pendant cinq heures, nécessitant l'intervention des équipes du RAID et des ERIS (équipes régionales d'intervention et de sécurité) dans ce centre de détention qui abrite des détenus particulièrement dangereux, radicalisés ou posant des problèmes de discipline.

Le détenu, Francis Dorffer, "armé visiblement d'une arme artisanale, un pic", selon une source syndicale pénitentiaire, a retenu dans sa cellule un surveillant et une stagiaire. Libérés en deux temps, avant et après minuit, les personnels pénitentiaires sont sains et saufs. Le détenu s'est rendu vers 0H30.

Né en 1984 en Moselle, Francis Dorffer a eu une enfance chaotique et a grandi en foyer. Il est incarcéré depuis ses 16 ans dans une vingtaine de prisons différentes après des condamnations pour vols, viol et assassinat d'un codétenu. Son nom est associé au moins à cinq autres prises d'otages, la plupart du temps pour réclamer un rapprochement familial. Classé "DPS" (détenu particulièrement signalé), selon le ministère de la Justice, et connu pour des troubles psychiatriques, il "n'est pas incarcéré pour des faits de terrorisme", selon l'administration pénitentiaire.
En 2006, il avait retenu une psychiatre à la prison de Nancy, en 2009 un surveillant à Clairvaux (Aube), en 2010 un psychiatre à la Santé (Paris) et en 2011 un gardien à Poissy (Yvelines).

AFP

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