La région est coupée du monde

Inde: Modi clame avoir fait oeuvre de "pionnier" au Cachemire

  • Publié le 15 août 2019 à 10:02
  • Actualisé le 15 août 2019 à 10:30

Le Premier ministre indien Narendra Modi a défendu jeudi sa décision controversée de révoquer l'autonomie constitutionnelle de la partie du Cachemire contrôlée par l'Inde, clamant à l'occasion du Jour de l'indépendance avoir fait oeuvre de "pionnier".

Le Jammu-et-Cachemire, région himalayenne majoritairement peuplée de musulmans, aussi revendiquée par le Pakistan, est depuis le 4 août totalement coupé du monde.

Un black-out des communications et de fortes restrictions à la circulation ont été imposés par les autorités indiennes avant l'annonce de la révocation de l'Article 370 de la Constitution qui conférait un statut spécial à cette zone.

Dans un discours prononcé à l'occasion de la fête célébrant l'indépendance indienne, sur les remparts du Fort rouge, à New Delhi, M. Modi a affirmé que cette révocation s'inscrivait dans une série de décisions au travers desquelles son gouvernement récemment réélu a fait oeuvre de "pionnier".
Le dirigeant nationaliste a affirmé que des "idées neuves" étaient nécessaires après sept décennies d'échec des politiques dans la région déchirée.

- "Corruption et népotisme" -

"Nous ne croyons pas dans le fait de créer des problèmes ou de les perpétuer", a-t-il expliqué. "Moins de 70 jours après l'avènement du nouveau gouvernement, l'Article 370 est devenu une histoire ancienne. Et dans chaque chambre du Parlement, les deux tiers des membres ont approuvé cette mesure".

Outre la révocation de l'autonomie constitutionnelle, le gouvernement Modi a également présenté au Parlement un projet de loi pour diviser le Jammu-et-Cachemire, dont sera séparée la partie orientale, le Ladakh à majorité bouddhiste.

Le Jammu-et-Cachemire restant, qui comprendra les plaines à majorité hindoue de Jammu au sud et la vallée de Srinagar à majorité musulmane dans le nord, va perdre le statut d'État fédéré, pour être rétrogradé au statut de "territoire de l'Union". Cela signifie que la région sera sous l'administration directe de New Delhi et n'aura presque plus aucune autonomie.

"Le Jammu-et-Cachemire et le Ladakh seront une grande source d'inspiration pour le voyage de l'Inde vers la croissance, pour le progrès et la paix", a ajouté le dirigeant de 68 ans.

"Les anciens arrangements au Jammu, au Cachemire et au Ladakh encourageaient la corruption et le népotisme, ainsi que l'injustice en ce qui concernait les droits des femmes, des enfants, des dalits (ndlr: autrefois appelés "intouchables"), des communautés tribales." "Leurs rêves vont prendre leur envol", a-t-il ajouté.

- "Vive l'Inde" -

A l'issue de son allocution de 90 minutes, le Premier ministre a lancé des "Jai Hind" ("Vive l'Inde") repris par des écoliers vêtus aux couleurs du drapeau indien, avant que ne retentisse l'hymne national.

La révocation de l'autonomie de la région et sa dislocation ont été qualifiées d'"illégales" par le Pakistan, les deux pays se disputant le Cachemire depuis leur partition en 1947, au terme de la colonisation britannique.

Mercredi, jour de l'indépendance du Pakistan, le Premier ministre Imran Khan a adopté un ton guerrier mettant l'Inde en garde contre toute agression dans sa partie du Cachemire.

"L'armée pakistanaise dispose d'informations solides selon lesquelles ils ont l'intention de faire quelque chose au Cachemire pakistanais", a-t-il dit. "Nous allons leur donner une réponse ferme."

Dimanche, il avait comparé l'inaction de la communauté internationale face aux événements au Cachemire au silence ayant entouré l'émergence d'Hitler en Allemagne dans les années 1930.

Le Cachemire est divisé de fait entre l'Inde et le Pakistan depuis la partition de l'empire colonial britannique des Indes en 1947, qui le revendiquent tous deux. Les deux pays se sont livrés depuis trois guerres, dont deux à propos de cet ancien Etat princier.

Une insurrection séparatiste fait aussi rage depuis 1989 au Cachemire indien et a coûté la vie à plus de 70.000 personnes, principalement des civils. New Delhi accuse son voisin pakistanais de soutenir en sous-main les groupes armés à l'oeuvre dans la vallée de Srinagar, ce qu'Islamabad a toujours démenti.

En prévision de possibles troubles, les autorités indiennes avaient déployé avant la révocation plus de 80.000 paramilitaires supplémentaires dans cette zone déjà hautement militarisée, où sont déjà cantonnés un demi-million de soldats indiens.

AFP

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