Santé

Hôpital: après 8 mois de grève, le gouvernement dévoile son "plan d'urgence"

  • Publié le 20 novembre 2019 à 07:01
  • Actualisé le 20 novembre 2019 à 10:06

Pris de court par un mouvement social inédit de l'hôpital public, le gouvernement doit dévoiler mercredi matin "un plan d'urgence" censé "renforcer" et "accélérer" une stratégie annoncée il y a plus d'un an.

"La situation est encore plus grave que celle que nous avions analysée": Emmanuel Macron lui-même a fini par l'admettre lors de son allocution impromptue en marge d'un déplacement à Epernay (Marne) jeudi dernier, promettant des "décisions fortes" pour l'hôpital.

Au même moment, plusieurs milliers de chefs de service, médecins, infirmiers, aide-soignants ou encore internes manifestaient partout en France, lors d'une grève suivie par un quart des médecins hospitaliers et plus d'un paramédical sur dix.

A moins de trois semaines d'une grève illimitée contre sa réforme des retraites, le président de la République a dit avoir "entendu la colère et l'indignation" de l'hôpital.

Pourtant, il n'entend pas modifier sa prescription: le plan "Ma Santé 2022" qu'il a lui-même présenté en septembre 2018 "va dans la bonne direction mais ne va pas assez vite", a-t-il affirmé.

Il a donc demandé au gouvernement une "accélération" pour "investir plus fortement", les annonces de la ministre de la Santé Agnès Buzyn en juin et en septembre, chiffrées à 750 millions d'euros sur trois ans, n'ayant pas suffi à mettre fin à la grève inédite des urgences démarrée en mars.

- "Revalorisation des salaires" -

Parti de la capitale, le mouvement s'est étendu à toute la France avec 268 établissements touchés en fin de semaine dernière. "Ils ont joué l'essoufflement, ce qui nous a permis d'avoir une coalition assez forte pour mobiliser", analyse Hugo Huon, infirmier et figure du collectif Inter-Urgences, à l'origine de ce mouvement.

Ce conflit qui ne concernait à l'origine que des soignants a coagulé tous les mécontentements de l'hôpital et fédéré l'ensemble des syndicats. Même les médecins ont fini par s'y joindre en septembre au sein d'un autre collectif Inter-Hôpitaux, qui appelle à une nouvelle manifestation le 30 novembre, dix jours avant une grève illimitée des internes.

Les revendications restent les mêmes: hausse des salaires et des effectifs et arrêt des fermetures de lits.

Mme Buzyn, qui avait longtemps pointé des problèmes d'"organisation", a fini par réviser ses priorités, promettant dès la fin octobre un "plan de soutien" axé sur "l'attractivité de l'hôpital" avec "la revalorisation des salaires notamment en début de carrière", pour endiguer la fuite des personnels.

Pour y parvenir, syndicats et collectifs réclament une augmentation d'au moins 4% du budget des hôpitaux quand le budget de la Sécu pour 2020, en cours d'examen au Parlement, ne prévoit qu'un peu plus de 2%, soit 84,2 milliards pour les établissements publics et privés.

Les dirigeants des hôpitaux publics ont réclamé fin octobre une rallonge d'au moins 250 millions d'euros, certaines sources au sein de la majorité évoquant ces derniers jours un coup de pouce de l'ordre de 400 millions.

- "Tout est ouvert" -

"Des discussions sont en cours" sur le sujet mais "elles nécessitent des arbitrages difficiles", avait indiquéMme Buzyn la semaine dernière au Sénat.

D'autres pistes sont à l'étude, notamment une reprise totale ou partielle de la dette colossale des hôpitaux (environ 30 milliards d'euros) par l'Etat pour faire baisser les taux d'intérêt et économiser ainsi plusieurs centaines de millions d'euros par an.

Bercy, qui avait dans un premier temps affirmé que cette option n'était "pas envisagée", a mis de l'eau dans son vin: "tout est ouvert", a déclaré dimanche le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.

Tout n'est pas qu'une affaire d'argent. Il est aussi question de pouvoir au sein des hôpitaux: M. Macron est prêt à donner "plus de place à ceux qui soignent", ce qui passerait, selon un député, par une révision de la loi Bachelot de 2009, qui avait transféré toutes les responsabilités aux directeurs administratifs au détriment des médecins.

AFP

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