Un mal pour un bien

"Vélotaf": avec la grève, une génération de convertis au tout vélo

  • Publié le 24 janvier 2020 à 19:22
  • Actualisé le 24 janvier 2020 à 19:39

Pour des milliers de parisiens, d'abord contraints et forcés par la grève, prendre son vélo tous les jours s'est finalement avéré une expérience moins traumatisante que prévu, voire agréable.

De quoi nourrir durablement les rangs des "vélotaffeurs", ces adeptes du trajet quotidien en vélo. "La grève de 2019 est celle qui m'aura mis sur un vélo", témoigne Damien Steffan, qui dès le 5 décembre a emprunté un vélo, investi dans tout l'équipement du parfait cycliste et renoncé à ses trajets en tramway jusqu'à la Défense, pour parcourir à bicyclette les bucoliques allées givrées du Bois de Boulogne.

"J'ai trouvé ça pas si désagréable. J'ai réalisé que j'allais plus vite et que j'arrivais dans un état tout à fait présentable au bureau", reconnait ce cadre de chez Total, prêt à transformer l'essai durablement.

La pratique du "vélotaf", qui consiste à se rendre tous les jours au travail à vélo, parfois même sur de très longues distances et qu'elles que soient les conditions météorologiques, réunit de plus en plus d'adeptes en France.

Ils se retrouvent au sein d'associations et échangent volontiers sur les réseaux sociaux des recommandations d'itinéraires protégés ou le relevé de leurs performances. Mais surtout les "vélotaffeurs" aiment documenter, parfois vidéos à l'appui grâce aux caméras légères dont certains équipent leurs casques, les incivilités (obstruction de la piste cyclable, dépassement dangereux) et les agressions dont ils sont victimes de la part d'autres usagers.

"Sociologiquement, il y a de tout, on est passé d'une pratique plus masculine à une pratique plus mixte, une pratique très 30-40 ans à monsieur et madame tout le monde, on a même vu des enfants, et sans parents, ce qui est courant dans d'autres capitales européennes mais qui aurait été encore inimaginable à Paris il y a quelques années", analyse Olivier Schneider, Fédération des Usagers de la Bicyclette (FUB).

- Tout lycra -

Blaise Vignon les a rejoints pendant la grève et se dit aujourd'hui un "Raymond" heureux. Dans l'argot des vélotaffeurs, la référence au célèbre coureur Raymond Poulidor, désigne les néo-cyclistes "tout lycra" à l'allure de "sapins de Noël" et qui se lancent, hésitants, à l'assaut des pistes cyclables.

Il parcourt 40km par jour, en à peu près deux heures, pour relier son domicile de la Celle Saint-Cloud à son bureau du centre de Paris. "En prévision de la grève, j'ai augmenté la fréquence depuis cet été jusqu'à trois fois par semaine", explique le néo-cycliste qui se considère en surpoids et qui se dit attiré par l'aspect santé de ce changement de mode de transport.

Avec plus de 1.000 km de pistes prévues d'ici 2020 et la création d'autoroutes pour vélo sur les principaux axes de la capitale, la politique provélo de la maire de Paris, Anne Hidalgo, a fini avec la grève par trouver son public.

Selon le comptage effectué par l'AFP, en analysant une cinquantaine de bornes installées par la Ville de Paris, l'effet avant/après de la grève est net: l'augmentation du nombre de passage de vélos est d'environ 155%, pour atteindre une moyenne de près de 200.000 passages chaque jour.

Depuis le retour à la normale lundi des transports franciliens, une autre tendance se dégage: le nombre de vélo dans la capitale parisienne se maintient à un niveau très significativement haut par rapport à son niveau d'avant la grève.

"Un sacré nombre d'entre eux ont découvert à cette occasion que c'était simple, efficace et surtout fiable, parce que l'on sait à quelle heure on part et à quelle heure on arrive", corrobore Charles Maguin, président de Paris en Selle, principal lobby des cyclistes auprès de la Mairie de Paris.

"La grève est arrivée à peu près en même temps que la fin des travaux du plan vélo, donc les gens qui ont découvert que la ville avait changé, ça peut aussi expliquer ces convertis", ajoute le lobbyste.

AFP

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