Politique

L'Italie suspendue à l'élection régionale en Emilie-Romagne

  • Publié le 26 janvier 2020 à 07:55
  • Actualisé le 26 janvier 2020 à 08:01

L'Italie a les yeux braqués dimanche sur l?Émilie-Romagne, riche région du nord dont l'élection régionale a valeur de test national, la fragile coalition au pouvoir redoutant qu'une victoire de l'extrême-droite dans ce bastion de gauche n'entraîne une chute du gouvernement.

Les représentants de la majorité formée par le Parti démocrate (PD, gauche) et les 5 Étoiles (M5S, anti-establishment) ont eu beau marteler que ce scrutin n'aura aucune incidence sur le gouvernement, le chef de la Ligue (extrême droite) Matteo Salvini a prévenu: si son parti l'emporte en Émilie-Romagne, il exigera dès lundi des législatives anticipées.

Fort des sondages montrant la Ligue en tête des intentions de vote à 30%, et premier parti d'Italie, le souverainiste espère qu'un retour des Italiens aux urnes sera synonyme pour lui de reconquête du pouvoir.

Région prospère du centre-nord de la péninsule, baignée par l'Adriatique, l?Émilie-Romagne a longtemps été un bastion inexpugnable de la gauche dont les valeurs prévalent toujours dans ses villes, même si la droite a fait de sérieuses incursions dans ses villages et ses campagnes.

Les derniers sondages publiés avant le silence médiatique imposé par la loi ont montré que la droite, menée par la Ligue, était au coude-à-coude avec le Parti démocrate.

Quelque 3,5 millions d'électeurs sont appelés à voter dimanche entre 07H00 (06H00 GMT) et 23H00 pour élire leur exécutif régional. Une des clés du scrutin sera la participation alors que deux électeurs sur trois n'avaient pas voté aux dernières régionales en 2014.

Soutenue par l'ancien chef du gouvernement Silvio Berlusconi, la candidate d?extrême-droite Lucia Borgonzoni, 43 ans, a été éclipsée par Matteo Salvini qui a sillonné la région, inondant les médias sociaux d'images le montrant en train de déguster les spécialités "Made in Italy" que sont le jambon de Parme et le parmesan.

Le leader d'extrême-droite a mis la gauche en colère samedi en rompant le silence préélectoral par un tweet sur l'"avis d'expulsion" qu'il ira remettre au gouvernement après sa victoire.

Dans le camp adverse, le président de région sortant et candidat de la gauche Stefano Bonaccini lui a opposé pendant sa campagne la bonne gestion et les résultats économiques de la région qui affiche un taux de chômage de 5,9% (contre 9,7% au plan national) et une croissance de 2,2% en 2018.

L'élu de gauche pourrait aussi profiter de la dynamique anti-salvinienne créée par les Sardines, mouvement de jeunesse né dans la région il y a deux mois et rapidement devenu un symbole national de la protestation contre l'extrême-droite.

Certains analystes affirment toutefois que nombre d'entreprises familiales et artisanales locales sont mécontentes et se sentent les laissées-pour-compte de la mondialisation.

D'autres expliquent que la gauche traditionnelle a abandonné ceux qu'elle cherchait autrefois à défendre pour satisfaire d'autres intérêts.

- "S'accrocher au pouvoir" -

Pour la première fois de son histoire, la Ligue a triomphé en Émilie-Romagne aux élections européennes de mai, devenant le premier parti régional avec près de 34% des voix, dépassant les 31% du PD. Cinq ans plus tôt, elle n'avait recueilli que 5% des suffrages, contre 53% au parti de gauche.

Le principal facteur de stabilité de la majorité au pouvoir en Italie, affaiblie par les divisions, est la crainte commune d'un retour prématuré aux urnes qui pourrait permettre à Matteo Salvini de revenir aux affaires.

Le gouvernement "s'accrochera au pouvoir à court terme", a déclaré Agnese Ortolani, analyste à l'Economist Intelligence Unit.

Mais une victoire de la Ligue accroîtrait les tensions au sein de la majorité, le PD reprochant alors probablement au M5S d'avoir refuser de présenter un candidat unique, divisant ainsi le vote anti-Salvini.

Les experts estiment qu'un tel résultat pourrait provoquer l'effondrement du M5S, rongé par les luttes internes et dont une quinzaine de parlementaires ont fait défection ces dernières semaines.

Le chef du M5S, Luigi Di Maio, a démissionné mercredi pour tenter d'éviter une crise, mais les observateurs ont averti que cela pourrait ne pas être suffisant. "Si le Parti démocrate devait perdre un autre bastion régional, comme ce fut le cas en Ombrie il y a trois mois, il pourrait en conclure qu'il a plus à perdre en restant allié au M5S, toujours plus faible, qu'en risquant de nouvelles élections", a déclaré vendredi le cabinet Berenberg.

 AFP

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